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Assises de l'Origine : la cohabitation des territoires à  organiser

Marques et signes officiels de qualité, sont-ils concurrents ou complémentaires ? La question a alimenté les débats de ces nouvelles assises.

Le territoire, ça rassure et c'est donc vendeur ! Sur ce créneau, les différents signes officiels de la qualité et de l'origine occupent une position historiquement reconnue. Les marques d'entreprise et plus récemment les marques territoriales s'y lancent aussi. Entre concurrence et complémentarité, les contours de la cohabitation se définissent actuellement. Tel était le thème de la 16e édition des Assises de l'Origine qui s'est tenue le 27 mai dernier à  Bordeaux dans le cadre du salon de l'agriculture d'Aquitaine.
« Le lien entre un produit et son origine pose tout de suite la question du cahier des charges, affirme Claude Vermot-Desroches, président du comité interprofessionnel du Comté. Le cahier des charges de l'appellation a des surcoûts importants, mais c'est à  ce prix que le terroir apporte des éléments de spécificités, sans quoi, il reste une simple utilisation d'image, un simulacre de cahier des charges qui ne ferait qu'utiliser le nom de la région Franche-Comté ». 1 La Franche Comté région championne des installations agricoles
L'idée défendue par Claude Vermot-Desroches s'articule autour d'une dynamique dans laquelle la région Franche-Comté profite de la réussite de l'appellation Comté. Avec ses 7 000 emplois et ses 2 700 exploitations agricoles, cette filière est en effet le moteur de l'économie régionale et elle évolue dans une sorte de cercle vertueux d'amélioration qualitative qui fait d'elle la région française « championne » du point de vue des installations en agriculture.
« Si une marque régionale venait à  s'imposer sans concession, cela représenterait clairement un risque d'anéantissement qui banaliserait tout le travail réalisé ». Sans être opposé à  la création d'une marque territoriale, Claude Vermot-Desroches pose comme condition, sine qua non, « une négociation préalable avec les organismes qui régissent l'appellation pour que ce développement ne porte pas atteinte aux signes officiels de qualité et d'origine déjà  en place ». Il conclut en saluant l'INAO « qui s'interdit de travailler sur des marques régionales là  où il existe déjà  des AOP ou des IGP ». 2 L'appellation Champagne traque les fraudeurs et encourage le réflexe pavlovien
La grande question de la lutte contre la fraude, la contrefaçon, les usurpations de marque et les détournements de notoriété a été évoquée à  travers les actions menées par le service juridique de l'appellation Champagne qui protège ses 6 000 marques gràce à  un réseau d'avocats spécialisés dans 70 pays. Plus de 2000 dossiers ont été réglés en 5 ans et plus de 1 000 autres sont en cours.
L'idée maîtresse de ces actions « d'ultravigilance juridique » est, aux dires de Charles Goemaere, responsable des services économiques et juridiques du Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC), de « créer et de renforcer le réflexe pavlovien du consommateur vis-à -vis des produits de l'appellation ». Il serait d'ailleurs faux de croire que cette politique de protection est un phénomène récent. Pour preuve, en 1844 déjà , le tribunal de Vouvray rendait un avis « mousseux » contre « champagne ».
En outre, si la Chine est souvent montrée du doigt comme « grande championne » de la contrefaçon, plus de la moitié des dossiers que traite le service juridique champenois est identifiée sur le territoire français. Enfin, cette lutte est aussi un dossier aux contours inégaux qui varie selon les pays en fonction de leur « conception » de ce qu'est produit générique. Envisager des marques territoriales affichant le mot « champagne » pour quelque produit que ce soit semble donc difficile dans un tel contexte ultra-protectionniste. Quid de l'éventuelle dénomination territoriale « Champagne-Ardennes » : la question, une fois posée, a le mérite de ne pas être balayée d'un revers de manche ! 3 Créer de la valeur ajoutée sur un territoire
Pour la Bretagne, Christophe Miault, représentant de la marque collective privée de produits laitiers “Paysan Breton” oppose un autre point de vue. Cette marque issue de la coopération et créée il y a 45 ans affiche une double appartenance à  la fois coopérative et d'origine bretonne avec une communication qui donne la parole à  l'agriculteur. Quant à  la question de la marque territoriale, il relève d'abord que la marque Paysan Breton ne serait peut-être plus déposable aujourd'hui et précise aussi que désormais « avec sa notoriété, il serait tout de même difficile de la mettre sur la touche » d'autant que si « l'important est la recherche de la valeur ajoutée sur un territoire », on peut dire que la mission est remplie.
Cela dit, si la cohabitation avec une marque territoriale devait se mettre en place, il souligne que cela devrait s'inscrire dans une logique de « cercle vertueux » et pourrait éventuellement se concevoir pour le lancement d'une marque. 4 Bio Sud-Ouest : première marque bio interrégionale
Focus sur le Sud-Ouest où, justement, une marque territoriale a vu le jour avec le témoignage de Jean-Michel Boyer, président de la commission de promotion de la marque “Bio Sud Ouest France”, la déclinaison bio de la marque “Sud Ouest France” créée en 2012 pour promouvoir les produits agroalimentaires des régions Aquitaine et Midi-Pyrénées.
Première marque bio interrégionale, celle-ci offre une double réassurance : garantie au consommateur d'un mode de production et de transformation du produit et garantie d'un cahier des charges strict de la marque avec un agrément des produits soumis à  un comité et à  un contrôle indépendants. À ce jour, cette marque qui concerne près de 400 produits, dont 80 % de produits frais, est attachée à  5 000 exploitations bio et 200 entreprises sur les deux régions. 5 Charte de bonnes pratiques entre SIQO et bannières régionales
Revenant sur l'histoire de la création des signes d'identification de la qualité et de l'origine (SIQO) par les viticulteurs, Jean-Luc Dairien, directeur de l'INAO, a insisté sur le fait qu'ils ont été la réponse à  une crise pour redonner de la valeur à  une production agricole. Nés d'une volonté de s'organiser avec des règles de production exigeantes dans le cadre d'une démarche collective, ils sont désormais devenus une base réglementaire et des outils structurants de stabilisation sociale pour les économies rurales. Sources d'externalités positives, ils sont ancrés dans l'actualité d'autant qu'ils répondent aux attentes des consommateurs. Aujourd'hui, poursuit-il, « Il faut que la complémentarité entre les SIQO et les bannières régionales s'organise pour que ces outils porteurs des politiques publiques aient des effets démultipliés avec un aspect pédagogique évitant toute confusion des consommateurs et une valeur juridique ». C'est dans cet esprit qu'une charte de bonnes pratiques régissant la complémentarité entre la bannière interrégionale “Sud Ouest France” et l'INAO a été signée en décembre 2013. Cette charte « première du genre » préfigure un futur accord-cadre national à  signer avec l'Agence des Régions de France d'ici à  la fin 2014. En prolongement, Jean-Luc Dairien a évoqué l'assignation en justice engagée par l'INAO début mai à  l'encontre du groupe Carrefour pour usurpation de notoriété à  propos des sigles origine et qualité. « Nous ne pouvions pas laisser le monde agricole sans réagir, et comme on a un peu de mal à  être entendu, c'est cette voie que nous avons choisie, même si l'on souhaite un bon compromis plus qu'un bon procès ».
Pour Dominique Graciet, président de la chambre régionale d'agriculture d'Aquitaine, « la charte devrait permettre d'éviter de se retrouver devant les tribunaux pour peu que l'on ait défini le code de la route avec des règles de conduite différenciées selon que l'on avance sur route (NDLR : comprendre ici sur le marché national) ou sur autoroute, comprendre ici l'export ». Marie-Noëlle Charles
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