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La tuberculose gagne, à nouveau, du terrain

Depuis 2010, la tuberculose bovine connaît une forte augmentation dans le Sud-Ouest. Dans les seules Pyrénées-Atlantiques, le nombre de foyers dépistés est passé de 3 en 2009 à 12 en 2012, 13 en 2013 et 14 sur 2014-2015

L’agent de la tuberculose bovine Mycobacterium bovis est une bactérie qui appartient au genre Mycobacterium, très répandu dans le milieu naturel, dont quelques espèces seulement sont susceptibles de provoquer des maladies, en général caractérisées par l’apparition de lésions chroniques.

Mycobactérium bovis atteint principalement les bovins, mais il peut également contaminer d’autres espèces, quoique plus rarement, telles que les caprins, les porcs, certaines espèces de la faune sauvage et l’homme.
Chez l’homme cependant, sont connus plus particulièrement Mycobactérium tuberculosis, agent de la tuberculose, et Mycobacterium Leprae, agent de la lèpre. Ces germes sont très résistants dans le milieu extérieur, notamment dans les endroits sombres, tempérés et mal tenus (on qualifiait autrefois la tuberculose de «maladie des taudis»). Ils sont résistants aux désinfectants usuels, mais sensibles à la chaleur (importance de la pasteurisation du lait) et aux ultra-violets. Ils se développent lentement (1 à 6 mois), d’où des difficultés à les identifier par culture au laboratoire.

Déjà 60 ans de lutte

Depuis 1954, différents plans de lutte ont été mis en place contre la tuberculose, avec au moins trois phases principales:
- Une phase de lutte volontaire de 1954 à 1965, initiée par les GDS de Vendée et de l’Ouest.
- Une phase de lutte avec prophylaxies annuelles et abattage obligatoire de tous les animaux positifs à l’intradermo-tuberculination de 1965 à 1999 (abattages partiels).
- Une phase d’allégements des prophylaxies (plus de deux tiers des départements n’effectuent plus de contrôles systématiques), avec report du dépistage en abattoir associé à des mesures d’abattage total des cheptels infectés (1999 à 2014).

Au plan national, le nombre de cheptels infectés a ainsi chuté, de 25% en 1954 à moins de 0,1%, et était considéré jusqu’en 2005 comme un exemple de réussite de prophylaxie sanitaire, permettant à la France de bénéficier du statut «pays officiellement indemne de tuberculose», c’est-à-dire de pouvoir commercialiser ses bovins sans contrainte particulière dans les pays voisins.

Pour autant, on observe depuis 2005 une relative augmentation des cas (de 63 cas/an en 2004 jusqu’à 165 cas/an en 2010, soit un taux d’infection de 0,08%), lié à des situations locales préoccupantes sur quatre secteurs principaux: la Camargue, la Côte-d’Or, la Dordogne et le côté atlantique du Piémont pyrénéen (plus d’une centaine de cas par secteur sur les 10 années écoulées).

Différentes souches

Il est possible de différencier les souches de Mycobactérium bovis, appelées spolygotypes. Ainsi, de nombreux spolygotypes ont pu être mis en évidence, traduisant la variété des souches initiales, avec une émergence de quatre qui prédominent actuellement sur le département des Pyrénées-Atlantiques. Le spolygotype F007 présent depuis plus de 10 ans sur le canton d’Arzacq et les cantons environnants. Le spolygotype F015 qui est réapparu en 2011 sur la commune d’Ogenne-Camptort et touche à présent les communes avoisinantes. Le spolygotype F005 qui vient de réapparaître au Pays basque. Le spolygotype GB54, plutôt localisé dans les ganaderias du département des Landes.

La détermination de ces spolygotypes est très utile pour suivre les contaminations entre cheptels et préciser l’origine de l’infection: voisinage, achat d’animaux, prêt de matériel, résurgence suite à une mauvaise désinfection des locaux ou présence d’un porteur sain, contamination croisée avec la faune sauvage… Le fait que ces spolygoptypes soient plus fréquents fait penser qu’ils ont acquis un pouvoir infectieux supérieur, et/ou qu’ils sont plus difficiles à dépister, laissant au sein de chaque cheptel des animaux potentiellement contaminants non ou mal dépistés.

Il a été démontré en Espagne que de fortes concentrations d’animaux sauvages peuvent permettre l’entretien de foyers autonomes de tuberculose bovine, sur des populations de sangliers de concentration supérieure à 30 au km. De même, en Angleterre, des concentrations de blaireaux de l’ordre de 20 à 50 au km permettent une propagation autonome de la maladie.

Pour autant, le rôle exact de la faune sauvage reste à préciser en France en fonction des concentrations observées (concentrations de 5-15/km pour les sangliers et de 2-8/km pour les blaireaux). Ces espèces sont-elles uniquement réceptrices, ou bien peuvent-elles, au contraire, être vecteurs de la maladie?

Le rôle de la faune sauvage

Depuis 2012, des prélèvements réguliers sont effectués avec les gestionnaires de la faune sauvage (ONCFS, FDC, lieutenants de louveterie et piégeurs agréés) dans le cadre d’un plan national appelé SYLVATUB. Ces prélèvements ont montré la contamination concomitante de sangliers et de blaireaux sur les zones où la maladie persiste, à l’instar de ce qui avait été dépisté en Bourgogne et en Dordogne.

Cette surveillance des animaux sauvages repose sur trois plans:
- SYLVATUB 1: analyse de toutes lésions suspectes sur gibier tué par action de chasse et apporté par les chasseurs référents au laboratoire.
- SYLVATUB 2: analyse des blaireaux trouvés morts au bord des routes.
- SYLVATUB 3: analyse d’échantillons prélevés sur les zones à risques.
Sur les deux dernières campagnes, des taux de contamination compris entre 3 et 4% ont été mis en évidence sur la zone d’Arzacq (16 blaireaux et sangliers positifs en F007) et d’Ogenne – Lagor (4 positifs en F015).

Pour les blaireaux, qui ont des rayons d’activité usuelle faibles, de l’ordre du kilomètre, des corrélations claires sont souvent observées entre la majorité des terriers trouvés infectés et la présence d’un ancien foyer bovin à proximité.

Il n’est cependant pas possible de savoir précisément, en l’état actuel des connaissances sur l’épidémiologie de la maladie, si la faune sauvage est capable de réinfecter des troupeaux bovins. Des résurgences sont apparues après plusieurs années autour de foyers d’infection, matérialisant une contamination «de zone», sans qu’il soit possible de déterminer comment la source d’infection s’est maintenue. Voisinage, achats ou introductions, contamination du milieu, faune sauvage sont des facteurs identifiés rendant indispensable la mise en œuvre de mesures de biosécurité adaptées.

Pierre Jabert - DDPP64

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