La tomme s'écrit au pluriel
L'Association des fromagers pyrénéens (AFP) vient d'obtenir de l'INAO la nomination d'une commission d'enquête pour l'extension de l'IGP Tomme des Pyrénées © S.B / TUP
Les membres de l'AFP (de gauche à droite : Jean-Pierre Chourrout, Claude Laborde, André Bazerque, Christian Lamary, Valérie Dominé et Claude Floch) ont présenté les étapes qui permettront l'extension de l'IGP Tomme des Pyrénées.
Aboutissement de près de 15 ans de discussions et de négociations plus ou moins houleuses entre les différents groupements de producteurs et d'industriels du secteur, l'Association des fromagers pyrénéens (AFP), qui regroupe presque tous les acteurs des différentes filières fromagères des Pyrénées, vient d'obtenir de l'INAO la nomination d'une commission d'enquête pour l'extension de l'IGP Tomme des Pyrénées, étape cruciale du processus de reconnaissance. Retour sur une histoire qui n'a rien d'un long fleuve tranquille
Au commencement était le label rouge
Avant 1996, il y avait un label rouge tomme des Pyrénées. Ce fameux fromage au lait de vache pasteurisé à pàte pressée est propriété de l'Association des fromagers pyrénéens, qui fédère plusieurs transformateurs autour du groupe laitier 3A. Quand les identifications géographiques protégées ont été créées en 1996, la France a alors automatiquement converti en IGP, au moyen d'une procédure simplifiée, 360 signes officiels de qualité, dont la tomme des Pyrénées.
Problème, cette procédure ne comportant pas d'enquête publique, nul ne s'est inquiété de savoir s'il y avait d'autres fromages traditionnels dans les Pyrénées Ce qui n'a franchement pas été du goût des producteurs de tomme au lait cru, qui se trouvaient de fait dans l'interdiction d'utiliser le nom « Pyrénées » pour leurs produits. Ces derniers se sont alors constitués en Fédération Tomme des Pyrénées aux laits crus, avec sept transformateurs, deux associations de fromagers fermiers et des affineurs. Avec pour but d'obtenir de l'AFP qu'elle rouvre le dossier de l'IGP pour l'élargir aux fromages au lait cru, puisque seul le détenteur officiel de l'appellation est en mesure de déposer une demande de modification.
« On a vécu des moments pour le moins épiques, souriait Claude Laborde, président de l'AFP, lors de la conférence de presse. Il a fallu des années pour que nous nous mettions tous d'accord, avec l'appui de la DRAAF, du conseil régional et des structures professionnelles agricoles de la région, dans le rôle d'arbitres. Mais nous y sommes arrivés et en 2005, AFP et Fédération tommes des Pyrénées aux laits crus se sont rapprochées ».
Depuis, l'AFP est ouverte à l'ensemble des productions fromagères existant sur la chaîne des Pyrénées, qu'elles soient fermières, artisanales ou industrielles, au lait pasteurisé ou cru, au lait de vache, de brebis, de chèvre ou mélangés. « S'il y a eu consensus pour intégrer toutes les productions fromagères dans notre association, il restait tout de même à convaincre l'INAO qu'il était justifié de demander une même IGP pour tous ces produits », ajoutait Christian Lamary, producteur de lait dans l'Ariège et président de la fédération Tommes aux laits crus. Comme on peut s'en douter, ce n'était pas gagné
C'est en décembre 2009 que les véritables choses sérieuses ont débuté. L'Association des fromagers pyrénéens a déposé à l'INAO une demande de modification de l'IGP portant sur deux points. D'une part, l'agrandissement de l'aire géographique de l'appellation, avec l'extension aux zones des massifs de l'Aude et des Pyrénées Orientales. Et d'autre part, son élargissement aux tommes des Pyrénées au lait cru, au lait traité thermiquement, au lait de vache, de chèvre et de mélange de lait (vache/brebis, vache/chèvre ou chèvre/brebis). « C'était à ce point inhabituel que l'INAO n'a pas voulu nommer de commission d'enquête, comme c'est de coutume, poursuit Claude Laborde. L'Institut a préféré désigner, en février 2010, une commission de réflexion, pour comprendre comment on pouvait élire sous un même cahier des charges des produits très différents, aux modes de production variés. Il faudra quasiment deux ans de travail, de nombreux allers-retours de délégations, de dossiers et de courriers entre l'INAO et nous, puis l'intervention décisive de Michel Sallenave, DRAAF de Midi-Pyrénées, à Paris en janvier 2012, pour obtenir qu'une commission d'enquête soit mandatée ».
Même alors, tant que les membres de cette commission n'étaient pas désignés, tout pouvait encore basculer. D'où le « ouf » de soulagement quand, en avril dernier, les noms des commissaires enquêteurs ont été révélés. « Attention, rien n'est encore gagné », relativise Claude Floch, directrice de l'AFP. « La suite risque d'être aussi longue et difficile ». Rapport d'étape en mars 2013
La commission d'enquête doit rendre un premier rapport d'étape en mars 2013. Vue la complexité du dossier, Claude Floch ne pense pas que le comité national IGP validera le travail de cette commission avant fin 2013. Une fois le cahier des charges validé, il y a une procédure nationale d'opposition. Pendant deux mois, toute personne ou organisme peut déclarer être opposé au projet, pour quelque motif que ce soit. Passée cette étape, l'INAO transmet le dossier au ministère de l'agriculture qui l'envoie à Bruxelles.
Compte tenu des délais généralement constatés, cela devrait arriver au mieux fin 2014. L'UE dispose ensuite d'un an pour donner une réponse. Donc à l'automne 2015, si tout va bien, Bruxelles publiera le décret au journal officiel européen. Mais là encore, tout pays de l'Union européenne peut faire opposition, pendant les 6 mois qui suivent la publication. « Dans le meilleur des cas, on sabrera le champagne à la mi-2016, estime André Bazerque, président de l'Association des fromagers fermiers et artisanaux des Pyrénées, membre de l'Association des fromagers pyrénéens. En attendant, notre rôle est de prévenir ou anticiper toute opposition, comme celle de l'Espagne par exemple, en relayant notre action auprès des Pouvoirs Publics et des politiques et en rencontrant l'ensemble des partenaires de la chaîne pyrénéenne ». Sébastien Garcia
Avant 1996, il y avait un label rouge tomme des Pyrénées. Ce fameux fromage au lait de vache pasteurisé à pàte pressée est propriété de l'Association des fromagers pyrénéens, qui fédère plusieurs transformateurs autour du groupe laitier 3A. Quand les identifications géographiques protégées ont été créées en 1996, la France a alors automatiquement converti en IGP, au moyen d'une procédure simplifiée, 360 signes officiels de qualité, dont la tomme des Pyrénées.
Problème, cette procédure ne comportant pas d'enquête publique, nul ne s'est inquiété de savoir s'il y avait d'autres fromages traditionnels dans les Pyrénées Ce qui n'a franchement pas été du goût des producteurs de tomme au lait cru, qui se trouvaient de fait dans l'interdiction d'utiliser le nom « Pyrénées » pour leurs produits. Ces derniers se sont alors constitués en Fédération Tomme des Pyrénées aux laits crus, avec sept transformateurs, deux associations de fromagers fermiers et des affineurs. Avec pour but d'obtenir de l'AFP qu'elle rouvre le dossier de l'IGP pour l'élargir aux fromages au lait cru, puisque seul le détenteur officiel de l'appellation est en mesure de déposer une demande de modification.
« On a vécu des moments pour le moins épiques, souriait Claude Laborde, président de l'AFP, lors de la conférence de presse. Il a fallu des années pour que nous nous mettions tous d'accord, avec l'appui de la DRAAF, du conseil régional et des structures professionnelles agricoles de la région, dans le rôle d'arbitres. Mais nous y sommes arrivés et en 2005, AFP et Fédération tommes des Pyrénées aux laits crus se sont rapprochées ».
Depuis, l'AFP est ouverte à l'ensemble des productions fromagères existant sur la chaîne des Pyrénées, qu'elles soient fermières, artisanales ou industrielles, au lait pasteurisé ou cru, au lait de vache, de brebis, de chèvre ou mélangés. « S'il y a eu consensus pour intégrer toutes les productions fromagères dans notre association, il restait tout de même à convaincre l'INAO qu'il était justifié de demander une même IGP pour tous ces produits », ajoutait Christian Lamary, producteur de lait dans l'Ariège et président de la fédération Tommes aux laits crus. Comme on peut s'en douter, ce n'était pas gagné
C'est en décembre 2009 que les véritables choses sérieuses ont débuté. L'Association des fromagers pyrénéens a déposé à l'INAO une demande de modification de l'IGP portant sur deux points. D'une part, l'agrandissement de l'aire géographique de l'appellation, avec l'extension aux zones des massifs de l'Aude et des Pyrénées Orientales. Et d'autre part, son élargissement aux tommes des Pyrénées au lait cru, au lait traité thermiquement, au lait de vache, de chèvre et de mélange de lait (vache/brebis, vache/chèvre ou chèvre/brebis). « C'était à ce point inhabituel que l'INAO n'a pas voulu nommer de commission d'enquête, comme c'est de coutume, poursuit Claude Laborde. L'Institut a préféré désigner, en février 2010, une commission de réflexion, pour comprendre comment on pouvait élire sous un même cahier des charges des produits très différents, aux modes de production variés. Il faudra quasiment deux ans de travail, de nombreux allers-retours de délégations, de dossiers et de courriers entre l'INAO et nous, puis l'intervention décisive de Michel Sallenave, DRAAF de Midi-Pyrénées, à Paris en janvier 2012, pour obtenir qu'une commission d'enquête soit mandatée ».
Même alors, tant que les membres de cette commission n'étaient pas désignés, tout pouvait encore basculer. D'où le « ouf » de soulagement quand, en avril dernier, les noms des commissaires enquêteurs ont été révélés. « Attention, rien n'est encore gagné », relativise Claude Floch, directrice de l'AFP. « La suite risque d'être aussi longue et difficile ». Rapport d'étape en mars 2013
La commission d'enquête doit rendre un premier rapport d'étape en mars 2013. Vue la complexité du dossier, Claude Floch ne pense pas que le comité national IGP validera le travail de cette commission avant fin 2013. Une fois le cahier des charges validé, il y a une procédure nationale d'opposition. Pendant deux mois, toute personne ou organisme peut déclarer être opposé au projet, pour quelque motif que ce soit. Passée cette étape, l'INAO transmet le dossier au ministère de l'agriculture qui l'envoie à Bruxelles.
Compte tenu des délais généralement constatés, cela devrait arriver au mieux fin 2014. L'UE dispose ensuite d'un an pour donner une réponse. Donc à l'automne 2015, si tout va bien, Bruxelles publiera le décret au journal officiel européen. Mais là encore, tout pays de l'Union européenne peut faire opposition, pendant les 6 mois qui suivent la publication. « Dans le meilleur des cas, on sabrera le champagne à la mi-2016, estime André Bazerque, président de l'Association des fromagers fermiers et artisanaux des Pyrénées, membre de l'Association des fromagers pyrénéens. En attendant, notre rôle est de prévenir ou anticiper toute opposition, comme celle de l'Espagne par exemple, en relayant notre action auprès des Pouvoirs Publics et des politiques et en rencontrant l'ensemble des partenaires de la chaîne pyrénéenne ». Sébastien Garcia