Economie
Le destin de la filière bois intimement lié au moral des Français
Le contexte international et la récession économique annoncée font craindre une année 2023 difficile pour la marché du bois Français.
Le contexte international et la récession économique annoncée font craindre une année 2023 difficile pour la marché du bois Français.
Si l’année 2022 fut une année faste pour le marché du bois, tant au niveau national que régional, la situation s’est quelque peu assombrie depuis l’automne. En pleine sortie de la crise liée au Covid-19, tant la demande que les prix étaient repartis à la hausse. Nombre de clignotants étaient alors passés au vert. Ainsi, en bois d’œuvre, les prix de vente des feuillus ont augmenté, surtout pour le chêne, à un niveau record, le hêtre n’étant pas en reste. L’impact moral de sortie de crise jouant son rôle à plein : comme dans d’autres domaines, les ménages ont fortement consommé, réalisant des travaux d’aménagements et autres constructions.
La frénésie consommatrice n’a pas concerné que le secteur de la construction. L’activité événementielle et les secteurs du vin haut de gamme et des spiritueux sont repartis entraînant avec eux celui de la tonnellerie, pour lequel le chêne français a la cote.
Même le conflit russo-ukrainien a favorisé l’économie ligneuse. En effet, l’Ukraine était jusqu’alors un fournisseur important de résineux ou de hêtre pour la fabrication de palette. La guerre a ainsi bénéficié à la filière française. Pour répondre à une forte demande, ces essences se sont négociées au prix du bois de menuiserie. Une situation totalement inédite.
Autre élément pour expliquer les bons chiffres d’une bonne partie de l’année 2022, la flambée des prix du gaz, de l’électricité et du fuel, ainsi que l’attribution de primes pour les équipements à granulés, ont offert de belles opportunités au bois énergie.
Construction en baisse
Mais depuis l’automne, la tendance s’est modifiée. Le contexte international et la récession économique qui s’annonce font craindre une année 2023 plus difficile, avec une baisse de l’activité économique et des prix, notamment sur les résineux. L’inflation qui a fait son apparition fin 2022 diminue le pouvoir d’achat et augmente les coûts de production. La crainte majeure est celle d’un arrêt de la consommation. Et notamment au niveau du bâtiment.
En France, une baisse d’activité sur la construction de logements s’est fait jour. La crise, la hausse progressive des taux d’intérêt et la pénurie de nombreux composants qui engendrent des retards de chantier en sont les motifs majeurs. Une importante baisse de la construction qui a d’importantes conséquences dans un domaine à forte plus-value et qui pèse donc lourd dans la balance économique.
«Depuis 2023 et la forte inflation, la tendance internationale est à la baisse d’activité», précise Gaël Lamoury, coordinateur technique pour la Fibois Nouvelle-Aquitaine. Et de poursuivre : «Les prix sont toujours en hausse, mais celui du Douglas, bois d’œuvre utilisé pour les charpentes et les constructions, est en baisse depuis fin 2022. Ainsi, en ex-Limousin, on assiste à une importante baisse de l’immobilier.»
Plus-value moindre
Côté énergétique, le bois combustible est lui en plein essor : «Malgré l’augmentation des prix, cela reste moins coûteux que l’électricité ou le gaz, et les incitations à l’équipement grâce aux primes dédiées et les chèques énergie participent à la bonne santé dans ce domaine», précise le technicien. Certes, mais la plus-value est moindre sur ce type d’activité.
Un secteur avec une forte plus-value en baisse et un autre avec une plus-value moindre en hausse, le compte n’y est pas. Alors la filière cherche des solutions.
Présente lors de la journée “Itinéraire bois en Nouvelle-Aquitaine” organisée sur Laruns le 4avril dernier, Agnès Pachebat travaille à la prescription bois au sein de l’interprofession régionale Fibois. Une de ses missions consiste à faire tenir une belle place à la filière dans les marchés publics. La rénovation thermique qui se développe, notamment dans les entreprises et les administrations, peut également jouer un rôle moteur dans la reprise.
Concernant le bois de chauffage, la Région Nouvelle-Aquitaine entend combler un retard par rapport à d’autres régions françaises en travaillant sur la technicité concernant les bûches.
Enfin, dernier point essentiel, comme toujours : la communication ! «Il y a un vrai travail à mettre en place pour informer le grand public sur les bonnes pratiques : pour être efficace, tant sur le plan thermique qu’économique, il y a des méthodologies bien spécifiques à mettre en place sur le bois de chauffage» déclare Gaël Lamoury.
Mais l’atout principal pour relancer de façon significative le bois de construction, reste le moral des Français : «Un bon moral, c’est se projeter, avoir envie de bâtir, de s’agrandir, de rénover» conclut le technicien. C’est bien connu : quand le bâtiment va… tout va !
Fabrice Borowczyk