Réforme de la PAC : la France doit revoir ses plans
La Commission européenne reproche au plan stratégique national français (PSN) d’être insuffisamment ambitieux sur le plan écologique et invite la France à rehausser son niveau d’exigences en la matière.
Ainsi que l’avait annoncé le commissaire européen à l’Agriculture, Janusz Wociejchowski, la Commission européenne a fait parvenir ses observations aux État membres sur les plans stratégiques nationaux (PSN). Soit à ce stade, dix-neuf PSN qui lui avaient été communiqués «dans les temps.» Pour ce qui est de la France, Bruxelles salue la stratégie de consultation mise en œuvre pour prendre en compte les contributions des parties prenantes et l’organisation d’un débat public, via la Commission nationale du débat public. Mais les félicitations s’arrêtent là.
En effet, la Commission accumule un certain nombre de griefs et souligne à l’attention des autorités françaises la nécessité d’apporter un certain nombre de clarifications et de modifications en fixant des objectifs et des indicateurs précis et plus ambitieux. Est particulièrement visée l’architecture verte du projet, jugé insuffisant au regard de la transition écologique souhaitée par Bruxelles et le Pacte vert. Dans le viseur, les choix opérés en matière de conditionnalité qu’il s’agisse de l’application de la directive Nitrates (BCAE 6), de la diversification et de la rotation des cultures et du traitement réservé au maïs (BCAE 7), de la biodiversité (BCAE 8) ou des prairies permanentes (BCAE 9).
L’éco régime sur la sellette
La Commission européenne marque sa préoccupation par rapport à la conception globale de l’éco-régime quant à son niveau d’ambition environnementale et climatique. Ainsi Bruxelles s’interroge sur le fait que la France mette sur le même plan (et le même niveau d’aides) la certification environnementale HVE et l’agriculture biologique, alors que le cahier des charges de celle-ci est plus contraignant. L’exécutif bruxellois recommande d’ailleurs la révision de certaines voies d’accès aux éco-régimes ou l’adaptation de certains niveaux de paiement (introduction d’un troisième niveau).
En matière de bien-être animal, la Commission déplore que la France n’ait pas inclus dans son PSN de mesures significatives en ce sens, par exemple pour encourager l’élevage de porcs sans caudectomie, des systèmes d’élevage sans confinement pour les poules pondeuses, les veaux et les truies. Selon l’exécutif bruxellois, le PSN accorde un soutien trop important au secteur de l’élevage, sans fixer de résultat à atteindre en matière de réduction des gaz à effet de serre et elle ne mobilise pas suffisamment de moyens en faveur des énergies renouvelables et en particulier du biogaz.
Aides insuffisamment ciblées
Globalement, la Commission européenne considère que le PSN français ne tient pas compte des objectifs définis dans la loi européenne sur le climat. Quant à la stratégie de réduction des engrais de 15%, elle est considérée comme insuffisante pour atteindre le bon état écologique des eaux à l’horizon 2027. Dans le même ordre d’idée, Bruxelles invite la France à accroître significativement ses investissements pour réduire la consommation d’eau en agriculture par le changement de cultures ou de variétés, des mesures de rétention naturelle de l’eau, des pratiques alternatives ou de réutilisation des eaux usées.
La Commission formule également d’autres reproches à la France en matière de ciblage des aides, Bruxelles considérant que la France est sur une trajectoire de statu quo et non de convergence qu’il faudrait rehausser. Autre grief, le couplage des aides qui serait insuffisamment argumenté notamment au regard de son impact sur la qualité des eaux ou orienté sur certains secteurs spécifiques. Enfin, en matière de gestion des risques, la Commission invite les autorités françaises à conditionner les interventions à l’adoption de mesures agricoles adaptées, telles que des pratiques d’atténuation comme la diversification des cultures.