Sombres perspectives pour les céréaliers français
Dans leur conférence de presse de rentrée, les dirigeants de l’Assemblée générale de producteurs de blé et autres céréales (AGPB) se sont inquiétés des perspectives pour 2023, en raison de nombreuses incertitudes qui pèsent, notamment sur les engrais.
Dans leur conférence de presse de rentrée, les dirigeants de l’Assemblée générale de producteurs de blé et autres céréales (AGPB) se sont inquiétés des perspectives pour 2023, en raison de nombreuses incertitudes qui pèsent, notamment sur les engrais.
«Notre plus grande crainte, c’est l’effet ciseaux», a alerté Éric Thirouin le président de l’AGPB. Même si l’année 2022 est relativement bonne en blé et en orges, les céréaliers craignent que les cours, jusqu’à présent assez élevés, ne viennent à baisser dans les prochains mois. En effet, ils ne pourront pas forcément baisser leurs coûts de production en raison de prix des intrants et des carburants toujours élevés. D’ailleurs, en ce moment, les marges sont assez faibles entre les premiers et les seconds. «Il faut compter environ 280 €/tonne de blé au départ de l’exploitation quand nos coûts de production avoisinent 260 à 275 €/tonne», a-t-il expliqué.
Effet ciseau
«Tout dépendra de la manière dont les cours vont se comporter», a-t-il ajouté, y compris ceux de l’engrais. Car si le prix du blé a été multiplié par 1,5 ces derniers moins, celui de l’engrais azoté a triplé dans le même temps. «Pour une exploitation de 150 ha, l’agriculteur qui dépensait environ 28.000 euros d’engrais il y a un an, en dépense maintenant 90 à 95.000», a précisé Cédric Benoist, secrétaire général adjoint de l’AGPB.
De plus, les agriculteurs ne savent pas s’il y aura assez d’engrais pour l’an prochain, car avec la hausse des prix du gaz essentiel à leur fabrication, les fabricants pourraient fermer des lignes de production. La rareté faisant augmenter les prix, les céréaliers y regarderaient à deux fois avant d’acheter des engrais. Ce qui pourrait impacter la quantité et la qualité des prochaines récoltes tant en blé qu’en orges.
«Il n’existe pas d’alternative à un manque d’engrais», a souligné Cédric Benoist. Déjà les problèmes de disponibilité se font sentir auprès des organismes stockeurs : «Quand ils commandent 1.000, ils reçoivent 150-200. La campagne morte saison a commencé avec deux mois de retard», a-t-il ajouté.
Arcanes administratifs
Les cours et les engrais ne sont que quelques-uns des paramètres que les céréaliers doivent tenter d’intégrer dans une planification toujours plus complexe. Prenant acte de la validation du Plan stratégique national français (PSN) de la prochaine PAC, les responsables de l’AGPB ne digèrent pas toujours les velléités de l’administration de régenter leur activité.
Ainsi, celle-ci leur demande de respecter l’année civile pour le semis des orges de printemps. «Certains sont tentés d’avancer ces semis de quelques semaines, notamment en raison du changement climatique. Mais ces pratiques ne rentrent pas dans les cases administratives et l’agriculteur, au bout du compte, se retrouve pénalisé», a expliqué Éric Thirouin.
De même s’est-il déclaré «ulcéré et dégoûté» par les propos tenus par le député Julien Bayou (Écologie-Nupes, Paris) encourageant les actes de destruction les réserves d’eau agricoles. Enfin l’AGPB souhaite mettre en place une contractualisation entre les grandes cultures et les éleveurs «avec des prix lissés sur trois ans», a-t-il annoncé. L’association spécialisée de la FNSEA espère avoir un coup de pouce fiscal sur ce point lors de la loi de finances 2023 qui passera bientôt au Parlement. Un amendement est en cours de rédaction au sein du ministère de l’Agriculture.
Christophe Soulard