15.000 agriculteurs attendus à Paris
À deux semaines de la manifestation du 23 juin à Paris, Xavier Beulin rappelle les principaux enjeux de cette mobilisation : l'allègement des contraintes administratives et environnementales, la revalorisation immédiate des prix à la production ou encore la question de la compétitivité des filières.
Xavier Beulin veut « faire prendre conscience que quand le consommateur dépense 100 euros pour son alimentation, seulement 7,80 euros reviennent au producteur ».
Pourquoi appelez-vous à manifester le 23 juin?
Xavier Beulin » Nous sommes, depuis plusieurs mois, dans un mouvement de mobilisation des filières animales. Il y a eu les manifestations du 12avril et d'autres plus récemment comme celle des producteurs de porcs. Le premier objectif est d'obtenir une revalorisation immédiate des prix à la production de la part de la distribution et des partenaires de l'aval pour toutes les productions animales.
À court terme, nous allons également interpeller les pouvoirs publics pour que des décisions immédiates soient prises au regard des contraintes administratives et environnementales qui pèsent sur les agriculteurs. Mais notre mobilisation ne se limite pas au court terme. Les questions posées sont celles de la compétitivité de la ferme France, de l'empilement des normes réglementaires qui finissent par plomber toute initiative et des investissements dans les filières. N'oublions pas non plus les négociations sur la PAC.
Pourquoi avoir choisi Paris?
X.B. » Notre mobilisation à Paris vise à sensibiliser les Parisiens et l'opinion publique sur le rôle essentiel que joue l'agriculture comme secteur économique en termes de valeur ajoutée, de création d'emplois, d'occupation et d'aménagement du territoire. Nous voulons placer l'agriculture comme un pôle d'excellence, au regard du redressement productif que les pouvoirs publics appellent de leurs voeux. Nous souhaiterions aussi que les citadins portent un autre regard sur l'agriculture qui est souvent éloigné des réalités. C'est la raison pour laquelle nous avons imaginé un slogan qui servira de fil rouge à la mobilisation: «L'agriculture est un métier, ce n'est pas un jeu ».
Notre dernier objectif est d'interpeller les dirigeants politiques, notamment le ministre de l'agriculture qui ne doit pas se contenter de propos faciles consistant à nous expliquer que la réforme de la politique agricole commune va rééquilibrer le revenu des agriculteurs. Nous considérons, au contraire, que la PAC peut être un outil complémentaire pour corriger un certain nombre de dysfonctionnements ou compenser des handicaps dans les zones de montagne et défavorisées par exemple. Ce n'est pas la PAC qui réglera les problèmes de fond que traverse l'agriculture française.
Notre mobilisation s'adresse aussi à Benoît Hamon, ministre de la consommation, et son projet de loi sur la consommation: nous tenons à ce que les deux amendements sur l'affichage des conditions générales de vente par les entreprises comme base de discussion et la clause de renégociation en cas de fortes variations des prix des matières premières soient inscrits dans le marbre.
«Un risque d'appauvrissement de l'activité agricole»
Combien d'agriculteurs attendez-vous et comment va se dérouler la manifestation?
X.B. » Nous attendons 15.000 agriculteurs et autant de Parisiens. La manifestation se déroule en deux temps: d'abord un défilé avec tracteurs et animaux de Montparnasse aux Invalides et un deuxième temps plus convivial sur l'Esplanade des Invalides où les Parisiens seront invités à déguster des produits de terroir. Nous voulons que cette journée soit un moment fort de rencontres et d'échanges avec le public dans la continuité de ce que nous faisons au salon de l'agriculture.
Les grandes cultures sont-elles associées à la manifestation?
X.B. » Même si l'accent est mis sur la problématique de l'élevage, il nous appartient de montrer que l'agriculture est diverse et que tous les secteurs agricoles sont interdépendants des uns des autres. Tout le monde est concerné. Les fruits et légumes et la viticulture seront également parties prenantes de cette mobilisation.
Le 12 avril dernier, la FNSEA avait évoqué un cahier de doléances
X.B. » À l'occasion de cette manifestation, les responsables professionnels et syndicaux interviendront pour valoriser notre cahier de doléances. Si l'on n'y prend pas garde, il y a un véritable risque d'appauvrissement de l'activité agricole et notamment des productions animales ce qui aboutira à une céréalisation de la ferme France. Ce qui n'est souhaitable pour personne.
Le message que nous voudrions faire passer est aussi celui qu'on ne peut demander aux agriculteurs de veiller à une identification forte des produits agricoles et alimentaires, de respect du bien-être animal, de prise en compte de considérations environnementales et leur imposer en même temps un alignement sur les marchés mondiaux pour les prix.
Nous voudrions faire prendre conscience que quand le consommateur dépense 100 euros pour son alimentation, il y a seulement 7,80 euros qui reviennent au producteur agricole. L'idée n'est pas de faire supporter au consommateur la revalorisation des prix, mais de lui faire comprendre que quand dans un produit alimentaire, sa valeur comporte souvent deux à trois fois plus de marketing, d'emballage que de contenu réel, et qu'il y a des questions à se poser. Surtout quand l'emballage finit par remplir la poubelle!