Au marché de Rungis, le commerce reste perturbé
Le premier marché de produits frais d’Europe subit les conséquences de la fermeture des restaurants mais aussi du Brexit.
Si la chaîne agroalimentaire a tenu le choc de la pandémie ces derniers mois, le commerce des produits agricoles et alimentaires reste perturbé par la fermeture prolongée des restaurants, mais aussi par le récent Brexit. C’est ce qu’ont pu constater Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des Comptes publics, et Clément Beaune, secrétaire d’État chargé des Affaires européennes, lors d’une visite du Marché international de Rungis organisée le 2 mars.
«Fournisseur naturel des commerçants de la région parisienne, le marché de Rungis est aussi résolument tourné vers l’exportation, avec environ 1 milliard d’euros de marchandises expédiées à l’étranger, soit 10% du chiffre d’affaires de ses 1.200 entreprises», a rappelé Stéphane Layani, le président de l’autorité du marché, la Semmaris.
Les grossistes et leurs fournisseurs ont naturellement subi le contrecoup des perturbations du commerce international ces derniers mois mais aussi du Brexit, le Royaume-Uni étant un important partenaire commercial du marché de gros, tant à l’import qu’à l’export.
Pertes de débouché
Les Britanniques achètent essentiellement aux grossistes de Rungis des fruits et légumes (23.000 tonnes) et des produits laitiers (3.000 tonnes) tandis que les commerçants français achètent aux Britanniques de la viande d’agneau et de bœuf mais aussi près de 6.000 tonnes de produits de la mer notamment en provenance d’Écosse.
Or, la sortie du Royaume-Uni a occasionné un alourdissement des procédures douanières et sanitaires à destination de ce pays. L’obtention de certificats sanitaires pour la viande ou phytosanitaires pour les végétaux est notablement plus longue et fait courir le risque de pertes de parts de marché, ont déploré les professionnels. Selon le président d’Interfel, Laurent Grandin, les deux ministres se sont engagés à doubler les moyens humains pour pallier cette situation.
En l’absence de Salon international de l’Agriculture cette année, la visite avait également pour objet d’honorer l’excellence de la production française et de rappeler la nécessité de renforcer la souveraineté alimentaire européenne, ont expliqué les deux membres du gouvernement. «Nous sommes ici pour soutenir l’agriculture, nos producteurs et notre modèle de sécurité et de qualité alimentaires», a notamment expliqué Clément Beaune, le secrétaire d’État chargé des Affaires européennes.
Des produits emblématiques menacés
Si le marché de Rungis est largement ouvert aux produits alimentaires d’importation, il valorise également la fine fleur de l’agriculture française. «Ces produits renommés sont attendus sur les tables françaises comme à l’export», a constaté Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA qui accompagnait la délégation ministérielle. «Les plus belles carcasses de veau de Corrèze ou d’agneau du Limousin, on les retrouve à Rungis», a notamment expliqué Francis Fauchère, le président du grossiste en viandes Eurodis. «Le marché ouvre aux produits de l’agriculture française les meilleurs débouchés et parfois les plus valorisants», a abondé Jérôme Desmettre, le président des grossistes en fruits et légumes.
L’absence du débouché de la restauration, en raison de la crise sanitaire, est particulièrement pénalisante pour certaines denrées emblématiques comme les produits tripiers (foies, rognons, ris, etc.), dont les achats ont fortement baissé depuis un an, a souligné le grossiste en abats Jean-Jacques Arnoult.
Les maraîchers du carreau des producteurs, pavillon réservé aux agriculteurs d’Ile-de-France et très prisé habituellement des restaurateurs parisiens, subissent également le contrecoup de la fermeture prolongée des établissements de restauration. Une situation préoccupante alors que la saison des fruits et légumes de printemps va prochainement démarrer.