Campagne maïs 2020 : des rendements noyés par les caprices de la météo
Cette année encore, les cultures de maïs ont subi de plein fouet les caprices du climat. Les excès, au printemps, puis les absences d’eau ont entraîné des pertes de rendements. Malgré une sole nationale en hausse de 10%, la production est évaluée à 13,6 millions de tonnes de maïs grain, sur la base d’un rendement moyen de 89,4 q/ha, avec de grosses disparités sur le territoire.
La fin des récoltes 2020 pointe le bout de son nez et le premier bilan de l’AGPM s’avère d’ores et déjà contrasté. Ce mercredi 21 octobre, l’association maïsicole organisait — un mois avant son congrès dématérialisé qui se tiendra le 26 novembre prochain — une rencontre par visioconférence pour livrer à la presse les grandes tendances et les premiers chiffres de cette campagne.
La production annuelle est évaluée à 13,6 millions de tonnes de maïs grain, sur la base d’un rendement moyen de 89,4 quintaux par hectare pour une surface de 1,57 million d’hectares, soit 0,1 quintal de plus que la moyenne de la précédente campagne qui, déjà, n’était pas florissante. De plus, ce bilan laisse apparaître de grandes hétérogénéités…
Climat : du tout au rien
Pour expliquer la hausse des surfaces, il faut retourner un an en arrière. Pour beaucoup de producteurs, l’humidité de l’automne n’a pas permis d’implanter les céréales d’automne. «Nous avons eu un report sur les cultures de printemps majoritairement porté sur le maïs, avec une hausse de 10% par rapport à l’an dernier soit plus de 140.000 hectares cultivés», note Thomas Joly, responsable de la filière maïs au sein d’Arvalis. Globalement, les premiers semis sont intervenus fin mars dans l’Est de la France et plus tardivement pour la façade Atlantique. «Dans le Sud-Ouest, précise-t-il, avril et juin ont été particulièrement arrosés. Cela a provoqué des retards.»
À cette situation se sont ajoutées des températures de saison relativement fraîches. «Pour ceux qui ont pu implanter, le démarrage a été très compliqué.» Et bien que cet épisode n’avait aucun caractère exceptionnel, beaucoup de maïsiculteurs ont dû cependant procéder à plusieurs resemis, avec des levés parfois proches du néant.
Passé cette période, la situation s’est brutalement inversée avec, dès la deuxième quinzaine de juin, des conditions très chaudes, se prolongeant sur le mois de juillet. «Globalement, la pluie s’est stoppée au cours du 15 au 20 juin et, rapidement, on est rentré dans une période très sèche», ajoute-t-il. Le maïs a été mis tout de suite à très rude épreuve. «Et même s’il a les capacités d’aller chercher l’eau en profondeur, quand il n’a pas les conditions optimales pour démarrer, il n’a pas le système racinaire pour le faire, et donc dans cette situation, ça devient plus difficile et il est pénalisé pour lutter face à un stress hydrique marqué durant l’été», résume le spécialiste.
La douche froide des précipitations
Sur les premiers maïs semés, les floraisons sont intervenues quand de l’eau était encore dans le sol, notamment en maïs fourrages. Pour les tardifs, ce fut plus compliqué. «En se penchant sur les demandes estivales avec les bilans hydriques potentiels nécessaires (N.D.L.R. différence de l’évapotranspiration par rapport à la pluie), on se rend compte qu’il y a eu une forte demande qui avoisine les 120 mm sur l’espace d’un mois. C’est le dimensionnement des unités d’irrigation en gros avec quatre tours d’eau à 30 mm.» Les irrigants ont donc pu sauver les meubles. D’autant plus que les arrêtés d’interdiction ou de limitation d’arrosage sont tombés assez tardivement… «Cela a permis aux irrigants de couvrir les besoins en juillet sur les stades plutôt critiques du développement. Mais, encore une fois, tous les producteurs n’ont pas été logés à la même enseigne / certains arrêtés sont tombés en plein remplissage des grains.»
Fort de ce constat, en maïs grain, la moyenne s’établit donc à 89,4 quintaux avec des disparités par terroirs et de meilleurs résultats en irrigué. «En pluvial, pour le maïs grain qui représente 65% de la sole totale, on a du très mauvais et du bon pour ceux qui ont la chance d’être sur le passage d’un orage ou sur des sols profonds. On en voit avec 15 ou 16 tonnes de grain.»
La mince satisfaction de cette campagne est le taux d’humidité observé sur le début de récolte. «On a des maïs relativement plus secs que l’an dernier générant quelques économies de séchage pour les producteurs. Mais il n’empêche que la rentabilité est entamée par la baisse de production», tempère Thomas Joly.
Résultats inférieurs aux objectifs
En maïs fourrage, la déconvenue est quasiment au même niveau qu’en grain, malgré des floraisons plus précoces et donc moins perturbées par les fortes chaleurs pour le développement de la plante.
Pour le maïs semence, les récoltes sont sur le point de s’achever avec une augmentation de 17% de la sole soit 84.000 hectares. Mais le premier bilan révèle le même constat / si l’irrigation a tempéré la situation, «un stress hydrique s’est installé tout l’été pénalisant le potentiel de production. En plus, le maïs semence y est beaucoup plus sensible que le maïs hybride.» Pour l’heure, le responsable Arvalis relève un résultat technique attendu à 90% de l’objectif. «À l’échelle européenne, on sera même inférieur à 90. Donc on peut redouter quelques tensions sur le marché de la semence sur quelques variétés…»
Enfin, sur les 23.000 hectares cultivés en maïs doux, le résultat reste nuancé toujours à cause des aléas climatiques estivaux… Si un planning de production est établi pour cette culture «étalant les risques», l’eau a, une nouvelle fois, commandé / les premiers semis ont été perturbés par les excès de pluviométrie entraînant alors un décalage dans les plannings. «Les plus tardifs ont souffert. Et, plus localement, entre 4.000 à 5.000 hectares de cultures ont versé avec le vent», conclut Thomas Joly, qui relève aussi un résultat inférieur aux objectifs de précampagne.
Mais pas de quoi entamer l’optimisme du président de l’AGPM, Daniel Peyraube. «Le maïs reste une culture qui a du ressort / même sous contrainte hydrique, on obtient des moyennes à 9 tonnes de sec à l’hectare.»
B. Ducasse