Congrès de la FNSEA : la souveraineté alimentaire monopolise les débats
La reconquête de la souveraineté alimentaire était au cœur des débats du 76e congrès de la FNSEA qui s’est tenu à Besançon (Doubs) les 28 et 29 mars.
Après l’intervention émouvante et forte de Mariia Didukh, secrétaire générale du Forum national agricole ukrainien, et celle plus «crispée» de Geneviève Pons, directrice générale du think tank “Europe Jacques Delors”, la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert a insisté sur la nécessité de retrouver une souveraineté alimentaire et énergétique qui se détache de «la vision décroissante» que l’Union européenne tente d’imposer à travers le Green Deal (Pacte Vert) et Farm to Fork.
La FNSEA qui souscrive à pas à cette ambition, ne souhaite cependant pas que ces stratégies soient pilotées par des «lobbys verts qui deviennent les lobbys de la faim dans le monde» ni par «les Garcimore de la Commission européenne», a lâché Christiane Lambert.
Elle souhaite au contraire «redonner une ambition» à ces politiques en s’appuyant notamment sur le rapport d’orientation de la FNSEA dévoilé en septembre 2020, sur les actions concrètes que sont Epiterre, France Carbon Agri, etc.
Le syndicat agricole souhaite aussi que le gouvernement finance, d’ici la fin 2025, les diagnostics carbone complets, «à 360°», de l’ensemble des exploitations françaises. «Nous sommes au rendez-vous et l’agriculture doit être, d’ici 2030, le premier fournisseur de biogaz et d’énergies vertes», a-t-elle précisé.
Agacée par l’accumulation des contraintes qui pèsent sur les exploitations et qui font penser «au syndrome de Diogène», Christiane Lambert entend, comme Samuel Vandaele, président JA (dont c’était le dernier congrès de la FNSEA à cette fonction), en finir avec les lourdeurs administratives. «J’ai le remède : la simplification», a-t-elle martelé, fustigeant au passage les surtranspositions qui mettent à mal des filières.
Récupérer cette souveraineté tant convoitée, c’est aussi «être intransigeant sur l’application totale d’Egalim 2 et s’attaquer au droit de la concurrence, en particulier aux grandes enseignes qui contournent le droit français en s’installant à l’étranger», a-t-elle expliqué.
Simplification
Pourtant astreint au devoir de réserve en cette période électorale, le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie, très habile, a répondu sur le mode de la prétérition : «Je ne peux pas vous parler du Varenne de l’eau, des néonicotinoïdes, du plan stratégique national, de l’ouverture du comptage des loups, de la loi Sempastous, du plan porcin…», a-t-il indiqué.
Partageant la vision de Christiane Lambert sur les conséquences du conflit russo-ukrainien, il a lui aussi évoqué la nécessaire reconquête de la souveraineté alimentaire et énergétique. Il compte pour ce faire s’appuyer sur les récentes mesures gouvernementales : France 2030, Plan de résilience, réouverture des négociations commerciales, mais aussi sur le Plan protéines, la reconquête des parts de marché fruits et légumes, et la consolidation des énergies vertes. Il a aussi suggéré de contrebalancer la vision politique de Farm to Fork par la «vocation nourricière de l’agriculture». Selon lui, en intégrant et en «gravant» cette dimension alimentaire dans cette stratégie européenne, on parvient à «concilier production et protection (N.D.L.R. : de l’environnement)».
Favorable à la vaccination des volailles pour lutter contre la grippe aviaire, il a assuré la FNSEA que le gouvernement «partage son exaspération» sur les exactions commises le 26 mars dernier dans les Deux-Sèvres. «Il ne peut pas y avoir d’agriculture sans eau. N’en déplaise à certains», a-t-il glissé, dénonçant au passage une «instrumentalisation politique» et s’attirant les applaudissements des 1.000 congressistes présents.
Christophe Soulard