Dans les estives, la traite se met sous abris
Les bergers pyrénéens ont réussi à maintenir l'activité pastorale dans les vallées béarnaises gràce à des aménagements et entendent transmettre cet héritage aux plus jeunes. Ces aménagements se sont traduits par la rénovation des cabanes et, désormais, intéressent les aires et abris de traite.
Jean-Louis Laborde-Boy, actuellement sur la cabane de Sesques en vallée d'Ossau, salue l'arrivée des abris de traite dans les estives. « Il fallait des surfaces que l'on puisse racler. Ce n'est pas bon de traire dans la boue et les déj
Didier Hervé, directeur de L'Institution Patrimoniale du Haut-Béarn (IPHB), explique : «En ce qui concerne l'aménagement des aires et des abris de traite, la réflexion a été entamée en 1996. Cependant, il a fallu classer les priorités, la première étant d'apporter des conditions normales de vie aux bergers en estive».
C'est ainsi que la cabane de Sesques fut entièrement rénovée en 2006, de même que le saloir de l'autre côté du ruisseau. «Ce confort était indispensable pour maintenir la production qui, aujourd'hui, rappelons-le, s'élève à 250 tonnes de fromages fermiers, du Soulor à la vallée de Barétous. Sur la zone IPHB, nous avons réalisé 70 cabanes».
Néanmoins, cette idée d'aménagement d'aires de traite n'était pas abandonnée. «Dès 1996, nous avons mis en place un appel d'offres sur performance avec un cahier des charges précis (approche des animaux plus facile, taille des troupeaux), explique le directeur de l'IPHB. Cinq entreprises ont répondu, dont trois rendant des maquettes à 50%. C'est finalement la Scoop Alkar de Mauléon qui a été retenue, et lorsque les mises aux normes se sont calmées, nous avons décidé de nous lancer».
Une structure métallique et démontable
Le résultat, c'est une structure métallique démontable, un outil destiné à deux ou trois trayeurs. «Il fallait un système simple et fonctionnel, capable de résister au vent, à la grêle avec une vue à 360°, une entrée et une sortie pour les brebis». L'ossature métallique est complétée par une bàche de type camion et des panneaux démontables. Il faut à peu près 2heures pour assembler le tout. Avant le départ des estives, ces abris sont enlevés car ils ne peuvent résister au poids de la neige.
Pour compléter ce dispositif, les aires ont été bétonnées par l'entreprise Casadebeig (40 rotations par hélicoptère) afin de pouvoir être raclées, nettoyées et aménagées de matériel de contention. Comme le précise Augustin Médevielle, maire d'Aste-Béon et responsable à l'IPHB, «l'aire de Sesques (commune de Laruns) fait partie d'un premier dossier concernant également les trois autres sites de Larry (Urdos), Pouey (Lescun) et Tousset (Sarrance)». Le coût de cette première tranche est estimé à 11.7000 euros (25.000 euros pour Sesques financés à 35% par le Feader, 35% par le conseil général, 30% étant à la charge de la commune). Pour l'heure, douze estives sont équipées ou en passe de l'être. «Notre objectif est de parvenir à 50/60 cabanes équipées dans les prochaines années», précise Augustin Médevielle.
Le résultat méritait d'attendre
Le résultat, s'il n'est pas impressionnant, est d'une efficacité saluée par tous. «Il faut savoir que la journée de travail d'un berger s'élève de 15 à 18 heures, dont 8 de traite, et que la qualité du lait compte énormément», précise Didier Hervé. «Il fallait des surfaces que l'on puisse racler, insiste Jean-Louis Laborde-Boy. Ce n'est pas bon de traire dans la boue et les déjections. En bergerie, dans la vallée, on paille bien. Ici on ne pouvait pas. Je me suis vu traire dans des endroits affreux où les brebis ne voulaient même pas entrer dans le parc». Le berger regrette que cet abri ne se soit pas fait avant. «C'était plus important que les ateliers de fabrication, même si ces derniers n'étaient pas aux normes. Mais quand tout s'est décidé, nous n'avons pas réussi à faire passer le message».
Mais il est parfois bon de prendre son temps, comme le soulignaient les élus de Laruns, Simon Ambielle, Régis Carrère et Pierre Mounot, lors de cette inauguration. «On a vu des caisses à traire très mal faites, des accidents avec des brebis étouffées». Au final, tout vient à point à qui sait attendre et Jean-Louis Laborde-Boy d'ajouter une petite phrase que lui disait son père: «Qui ne prend pas son temps avec la traite perd son temps».
Philippe Delvallée