Fromage des Pyrénées : la saveur des estives descend sur les étals
L'Association des éleveurs transhumants des trois vallées pyrénéennes Aspe, Ossau et Barétous (80 adhérents), animée par Valérie Casabonne-Angla, a organisé entre Noël et Nouvel An une rencontre chez les bergers autour de l'affinage du fromage d'estive. En effet, depuis le mois de décembre, on trouve les premières productions fruit des pàtures estivales.
Julien Lassalle, berger à Lourdios-Ichère en vallée d'Aspe, transforme le lait tous les deux jours. Les visiteurs ont pu, le temps d'une journée, découvrir l'art de fabriquer le fromage d'estive. © Le Sillon
Six bergers, deux en vallée d'Ossau (Joseph Paroix de Bilhères, Aline Darbary de Gère-Bélesten), deux en vallée d'Aspe (Julien Lassalle et Denis Fourcade de Lourdios-Ichère), un du Gers (famille Cazette) et un dernier du piémont (Alain Diehl d'Aubertin) ont accepté d'ouvrir les portes de leurs exploitations et de leurs saloirs.
Pourquoi cette date ? « Il manquait quelque chose à notre réseau, en ce qui concerne l'animation, entre la transhumance et la commercialisation, explique Mme Casabonne-Angla. La période des fêtes de fin d'année correspond à la mise en marché de nos productions et nous voulions expliquer, en direct au consommateur, toutes les vertus du fromage de brebis fabriqué en estive ».
Des parfums sans pareil
Le fromage d'estive se veut un produit phare dans l'économie de montagne. « Aujourd'hui, précise l'ancien président de l'association, Julien Lassalle, le fromage d'estive concerne quelque 120 bergers produisant 250 tonnes de fromages. De nouvelles demandes de mises aux normes des cabanes parviennent chaque année aux autorités et services compétents ». Et de noter un autre signe incontestable du dynamisme de l'activité pastorale dans les vallées du département : « Cet été, 58 familles se sont rendues en estive pour la fabrication du fromage ».
Comme l'ont expliqué les divers intervenants, le fromage d'estive, c'est non seulement un savoir-faire, une technicité, mais, aussi, un héritage d'une tradition ancestrale laquelle est basée sur la richesse aromatique des herbes d'altitude (réglisse, noisette, etc.). Ce sont elles qui font que l'on obtient un fromage estampillé estive (un pic flanqué d'une Immortelle). Pas un fromage d'estive n'est semblable à l'autre. « La production a augmenté de 20 % ces dernières années et les prix rémunérateurs de 5 % », commente également Julien Lassalle.
Meilleures conditions de vie
Chez Denis Fourcade, ancien berger sans terre durant 5 ans, installé à Lourdios-Ichère depuis un an, la traite se fait à la main. « Ce n'est pas par tradition mais plutôt parce que la mécanisation coûte cher. Mais cela ne me dérange pas. Outre le pacage en estive, je prête mes brebis pour l'entretien des vignes à Olivier Barthélémy du côté de Cuqueron ce qui lui permet d'utiliser moins d'engrais ». Au total, les 280 brebis du berger produisent 1 000 fromages de 5 kg par an dont 250 d'appellation estive.
« Avant, expliquait-il à ses visiteurs, j'utilisais un saloir collectif. Désormais, j'affine moi-même mes fromages produits sur l'estive du Layuns. L'affinage dure 4 mois au minimum et j'écoule tout en vente directe ». Le jeune berger se félicite aussi de la mise aux normes. « Bien sûr il n'y a pas si longtemps encore, on fabriquait le fromage et on mangeait sur la même table et le produit était très bon. Mais au-delà de l'aspect purement sanitaire de nos produits, douches et eau chaudes ont fait évoluer positivement nos conditions de vie ». Car les mises aux normes ont également induit de meilleures conditions de vie et de travail pour les bergers.
L'art d'affiner
Julien Lassalle, avec son employé Nicolas Cassouroumé, transforme le lait tous les deux jours. « Cela le refroidit moins et la flore lactique est mieux préservée. On évite, ainsi, de réensemencer avec les ferments ». Les 1.500 fromages, dont 200 à 300 estampillés estive selon les étés, fabriqués à l'année, sont tous affinés à la ferme durant 5 mois minimum. « L'été, je possède un caisson en estive pour moins redescendre et j'ai une salle de fabrication et une machine à traire sur roues ».
Voilà quelques dessous de fabrication qu'ont pu découvrir ceux qui aiment le fromage de montagne curieux de comprendre toutes les étapes d'un produit disponible jusqu'au printemps. Après il faudra passer au fromage d'hiver, délicieux mais différent.
Philippe Delvallée
Fromage d'estive : un fort caractère Pour le fromage fermier, le qualificatif "estive" sous-entend plusieurs critères de sélection. Cette appellation correspond à des surfaces de pàturage pour l'alimentation estivale des troupeaux, situées en montagne, de statut et à usage privé ou collectif, organisées en parcours découpés par des limites naturelles, entretenues par le bétail, le débroussaillage et/ou l'écobuage, à durée d'usage définie dans la saison d'été par les gestionnaires d'estives et les différentes conventions transvalléennes.
Seul l'épandage de déjections animales produites dans les parcs de contention en estive est autorisé. Outre la pàture, céréales simples et apports de minéraux sont autorisés. La production s'effectue de la fin juin à début octobre au cayolar, cuyala ou extola. Ils doivent avoir fait l'objet d'une demande préalable de statut sanitaire pour la fabrication et la commercialisation. La mention "estive" est réservée aux opérateurs fermiers exclusivement.
Seul l'épandage de déjections animales produites dans les parcs de contention en estive est autorisé. Outre la pàture, céréales simples et apports de minéraux sont autorisés. La production s'effectue de la fin juin à début octobre au cayolar, cuyala ou extola. Ils doivent avoir fait l'objet d'une demande préalable de statut sanitaire pour la fabrication et la commercialisation. La mention "estive" est réservée aux opérateurs fermiers exclusivement.