La vente directe est poussée vers le drive et les livraisons
Privés de nombreux marchés de plein vent et faisant face à une demande croissante sur certains produits, les producteurs en vente directe ont dû se réorganiser.
Dans le cas de la grande distribution, on sait déjà que les grands gagnants de cette période de confinement sont les magasins de proximité, le e-commerce et le drive. L’évolution semble assez similaire dans la vente directe, marquée par la fermeture de nombreux marchés de plein vent. Mais cette affirmation reste difficile à consolider, car en matière de vente directe, il n’existe pas d’observatoires de la consommation aussi fiables que ceux mis en place pour la grande distribution (Nielsen, Kantar, IRI). Rappelons que la vente directe ne concerne qu’un agriculteur sur cinq (Agreste, 2010).
Prenons le principal réseau national de producteurs en vente directe, Bienvenue à la ferme (chambres d’agriculture). Dans les 45 drives fermiers du réseau, l’essor pour ce canal de distribution est palpable : «Durant la crise, nous avons vu le nombre de commandes hebdomadaires passer de 80 à 240-280, rapporte Jean-Marie Lenfant, président de la marque des chambres d’agriculture. Le panier moyen est passé de 45 à 80 euros». Avec la crise, «on observe une accélération des projets. Nous avons une forte demande des agriculteurs et des collectivités.»
Points éphémères
Privés, pour la plupart, de marchés de plein vent, des producteurs ont aussi dû improviser de nouveaux moyens de commercialisation. «Notre réseau a soutenu le développement de points de retrait éphémères, qui sont soumis à autorisation et aux mêmes règles d’hygiène que sur les marchés, et où peuvent se retrouver un ou deux producteurs, rapporte Jean-Marie Lenfant. Les agriculteurs se sont creusé la tête, beaucoup se sont tournés vers des sites de regroupement de commandes comme La Charette».
La Charette est une start-up qui organise des tournées de livraisons pour les agriculteurs : «Depuis le début de la crise nous avons eu plusieurs indicateurs en hausse, confirme Laura Giacherio, chargée des relations publiques. Trois tournées supplémentaires avec nos transporteurs indépendants ; plus d’une centaine de producteurs qui ont rejoint notre communauté ; plus de 1.000 particuliers ou commerçants qui ont rejoint nos villages pour rencontrer nos producteurs».
La Ruche qui dit oui, une start-up qui fédère des points de collecte collectifs d’agriculteurs, a aussi vu son activité évoluer. «Nous nous sommes adaptés en proposant de la livraison à domicile, qui rassure davantage les clients, rapporte Clémence Fernet. Nous avons 100 ruches dont les animateurs livrent à domicile. Et nous avons proposé aux agriculteurs de livrer. 70 se sont déjà inscrits».
La Ruche a même proposé des drives dans certains de ses points de collecte traditionnels. Sur son activité historique, «ces dernières semaines, le panier moyen a progressé de 40% par rapport à la même période l’an passé, rapporte Clémence Fernet, chargée des relations presse de la Ruche. On observe une progression de 89% des clients présents lors des distributions, et beaucoup de premières commandes chez nous. La crise a créé un déclic chez les consommateurs, qui sont rassurés par les circuits courts».
Un déclic, c’est aussi ce qu’espère Jean-Marie Lenfant : «Ce qu’on ressent, c’est qu’il y a un bel élan vers les circuits courts et les produits fermiers. Et l’expérience de tous ceux qui sont venus goûter des œufs fermiers, qui ont vu la différence, on se dit qu’il en restera quelque chose.»