L’arrêt du glyphosate imposera des changements profonds
L’INRA a remis, le 1er décembre, un rapport au gouvernement, qui souligne les «changements profonds» imposés par l’arrêt programmé de cet herbicide. Il identifie les alternatives au glyphosate. Le document mentionne également des impasses techniques sur lesquelles le gouvernement et les filières devront prioritairement travailler.
Le vendredi 1er décembre dernier, l’INRA a remis un rapport sur le glyphosate au gouvernement. L’expertise scientifique de l’institut doit permettre l’élaboration d’un plan de sortie, annoncé pour la fin de l’année. Le rapport identifie différentes alternatives techniques pour remplacer l’herbicide : la destruction physique par le désherbage mécanique et le travail superficiel du sol ; le labour ; l’évitement partiel comme le recours au gel hivernal des cultures intermédiaires ; la culture sous mulchs vivants ; l’utilisation ciblée d’autres herbicides homologués.
Cependant, des «freins majeurs» sont signalés qui concernent l’impact économique et le temps de travail, les évolutions du parc matériel, de la motorisation et des automatismes, les modalités d’installation des cultures pérennes, souligne l’institut. «La réflexion sur la transition vers la sortie du glyphosate doit donc se faire sur une échelle de temps qui prend en compte la mise en œuvre de ces techniques alternatives».
L’INRA repère des impasses techniques
L’INRA souligne que, dans certains cas, il reste des impasses au regard des connaissances actuelles. Aucune alternative efficace n’existe pour l’agriculture de conservation des sols, qui couvre environ 4% des surfaces de grandes cultures. Des «situations de difficulté» sont identifiées en cas d’arrêt du glyphosate. C’est le cas pour les agricultures menées dans des conditions à handicap sans bénéficier d’une forte valeur ajoutée : terrasses, zones très caillouteuses ou très fragiles vis-à-vis du risque d’érosion. L’INRA cite des situations de niche comme la récolte des fruits à coques (19.000 hectares en 2014) ou une étape de la culture du lin fibre, dont la France est le premier producteur mondial (88.000 hectares en 2016) : le rouissage.
Autre exemple, les cultures pour des marchés spécifiques avec fortes contraintes techniques : la production de semences (380.000 hectares, dont 70.700 hectares pour les espèces fourragères, potagères et florales les plus délicates à conduire), celle de légumes frais et de conserve cultivés en plein champ (203.560 hectares en 2014 dont 61% en exploitations de grandes cultures), avec un risque de présence de fragments issus d’adventices toxiques.
L’adaptation à un arrêt du glyphosate implique des «changements profonds», souligne le rapport. Et de préconiser une conduite intraparcellaire pour «cibler l’intervention chimique ou mécanique là où elle est essentielle». L’INRA conseille d’aller vers l’agriculture de précision afin de «rendre compte des états du milieu propices aux interventions chimiques ou mécaniques pour garantir leur efficacité».
Un plan présenté en décembre
Une robotisation plus poussée est souhaitable tout particulièrement en maraîchage, selon le rapport. Il s’agit par ailleurs de mettre au point une gamme élargie d’espèces et couverts végétaux d’interculture, faciles à gérer (qualité d’installation, facilité de destruction mécanique), ce qui «peut nécessiter de revoir la réglementation sur les cultures intermédiaires autour de l’usage de l’irrigation pour installation et d’une petite dose de fertilisation», indique l’INRA.
Autres pistes : une extension de la conduite sarclée ; un élargissement de la gamme d’outils de désherbage mécanique pour une meilleure efficacité, à moindre coût, et un assouplissement de la réglementation pour faciliter son usage en période d’interculture.
Le plan de sortie du glyphosate sera présenté «avant la fin de l’année», selon un communiqué commun des ministères de l’écologie, de la santé, de l’agriculture et de la recherche. Avec les autres travaux en cours, le rapport de l’INRA «permettra au gouvernement de présenter, lors de la clôture des États généraux de l’alimentation, une feuille de route ambitieuse visant une agriculture moins dépendante des pesticides, dont le glyphosate. Cette feuille de route, une fois partagée avec les parties prenantes, sera finalisée en début d’année 2018», assurent-ils.