Le jambon de Bayonne débride ses exportations
Après avoir décroché la semaine dernière l'agrément pour exporter aux États-Unis, la filière du Jambon de Bayonne entretient ses relations avec la Chine. Une délégation de la province de Hubei était en visite à la station expérimentale d'Arzacq.
Encore un peu et les responsables de la filière du Jambon de Bayonne finiront à coup sûr par prononcer quelques mots de Mandarin. Exportations, échanges, ou encore transferts de technologies seront peut-être les termes les plus vite assimilés. En effet, la filière conduit des échanges de plus en plus fréquents avec la Chine. Une habitude vertueuse selon Bernard Dupont, aux yeux duquel ce pays représente «de vraies opportunités commerciales».
Le président du Consortium du Jambon de Bayonne se souvient avoir effectué son premier voyage dans la province de Hubei, à la fin des années quatre-vingt-dix. Un déplacement qui s'inscrivait alors dans le cadre d'un jumelage mis en oeuvre par la région Aquitaine. Mercredi 21 janvier, une délégation de cette région du centre de la Chine était en visite à la station expérimentale Pyragena, à Arzacq. Des représentants de l'administration — parmi lesquels le directeur de l'agriculture de la province — et des patrons composaient la dizaine de membres.
Un vif intérêt pour les techniques françaises
Au sein de la filière porcine du Sud-Ouest, les relations avec la Chine ont trouvé un nouvel élan depuis quelques années. En 2011, plusieurs entreprises ont envisagé un agrément pour exporter leurs produits vers cette contrée asiatique. Pour les salaisons Delpeyrat à Aicirits et la société Fipso de Lahontan, les fastidieuses démarches ont été conclues avec succès au printemps 2014. Elles sont également sur le point d'aboutir pour l'entreprise Oteiza, aux Aldudes, les Salaisons de l'Adour, basées dans les Hautes-Pyrénées, ainsi que pour la station Pyragena.
«Les premiers jambons devraient partir bientôt», souffle Bernard Dupont. Cette nouvelle dynamique est également favorisée par la volonté de la Région Aquitaine de promouvoir ses produits agroalimentaires là -bas. Avec le réseau des Maisons du Sud-Ouest, déployé en Chine sous l'impulsion des conseils régionaux d'Aquitaine et de Midi-Pyrénées, le Jambon de Bayonne trouve un nouveau moyen d'exposition sur place.
Trouver des relais de croissance
Ce souhait de lorgner vers de nouveaux débouchés constitue une nouvelle étape dans la vie de la filière. Elle vient après une période de profonde consolidation de la place du Bayonne sur le marché intérieur. Il s'agit maintenant de développer de nouveaux relais de croissance. «Il y a trois ans, on s'est donné pour mission de faire connaître notre produit à l'export, commente Bertrand Écomard, secrétaire général du Consortium. Plus de 100.000 jambons sont désormais exportés».
L'Europe, mais aussi le Japon, le Canada et Hong Kong constituent déjà des destinations de prédilection, mais de nouvelles terres de conquête sont également espérées. La Chine en fait partie, de même que les États-Unis, pays vis-à -vis duquel des avancées réglementaires ont également été obtenues: la station expérimentale Pyragena s'est vue délivrer la semaine dernière son agrément pour y exporter des jambons.
Pour le Jambon de Bayonne, l'Empire du milieu forme d'abord un formidable marché potentiel. S'il reste difficile d'émettre des projections, les possibilités sont immenses. La classe la plus aisée, celle visée, représente désormais près de 5% des 1,4 milliard d'habitants du pays. «Le porc est une viande consommée tous les jours chez nous, explique M. Huang, le directeur de l'agriculture de la province de Hubei. À partir du moment où votre produit obtient l'agrément nécessaire, il ne devrait avoir aucun mal à pénétrer le marché chinois. En outre, les dispositifs de certification français sont très renommés chez nous».
Développer la coopération
Au-delà des enjeux liés à la vente de marchandises, la Chine semble également très intéressée par l'expertise de ses partenaires français. C'est sur ce point que les professionnels asiatiques présents mercredi se sont surtout focalisés. Ils apparaissent avides d'informations sur des aspects tels que la mise en oeuvre des dispositifs de certification, à l'image de l'IGP. «Ce sont des démarches qui commencent à voir le jour chez nous», indique M.Huang.
Directeur d'un élevage porcin d'État réunissant plus de 8.000 employés, M.Xiaoran a aussi clairement exprimé son intérêt pour les compétences françaises en matière de transformation de la viande. Sans détour, il n'a pas hésité à proposer des opérations de collaboration dans ce domaine. «Nous produisons beaucoup de porcs, mais nos méthodes de transformation sont peu développées, indique-t-il. Nous n'avons pas de tradition de salaison».
Conscient des difficultés à finaliser de tels projets, Bernard Dupont a écouté d'une oreille attentive, mais s'est aussi montré prudent. «Pourquoi ne pas imaginer des transferts de compétences, au travers d'une démarche gagnant/gagnant, souffle-t-il. D'abord, il convient d'aller voir leurs besoins puis d'encadrer parfaitement tout cela À l'avenir, on peut penser par exemple réaliser des échanges de personnels». Pour le coup, quelques mots de Mandarin ne seront pas de trop
Fabien Brèthes