Le salut de la filière palmipèdes passera par une action collective
L’assemblée générale du Comité interprofessionnel du foie gras (Cifog), qui s’est tenue vendredi 23 juin dernier à Mont-de-Marsan, a permis aux représentants de l’État d’apporter des précisions sur les d’indemnisations de la filière, mais aussi sur l’aménagement de nouvelles règles de biosécurité.
Si les virus H5N1 puis H5N8 n’étaient pas passés par là, l’assemblée générale 2017 du Cifog, qui se tenait à Mont-de-Marsan le 23 juin dernier, aurait probablement servi à dignement fêter les trente ans de l’organisme interprofessionnel. Une structure qui a permis de mettre autour d’une même table tous les maillons d’une filière, de l’amont à l’aval, chose quasi inédite jusque-là. Elle peut se targuer d’avoir participé à l’essor de la production de foie gras, aujourd’hui à la base de tout un pan de l’agriculture du Sud-Ouest.
Mais en cette deuxième année consécutive de crise sanitaire, la rencontre revêtait bien sûr un caractère très particulier. Des annonces étaient attendues sur les dispositifs d’indemnisations de la filière de la part des représentants des pouvoirs publics. À l’extérieur de la chambre du commerce et d’industrie où se tenaient les débats, la mobilisation des FDSEA et Jeunes Agriculteurs illustrait cette attente.
Quelques assurances nouvelles
Appelé à clôturer les travaux, le directeur général de la DGPE (direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises), Hervé Durand, représentant le ministre de l’agriculture, a invité la filière à «ne pas douter des engagements de l’État et des moyens très importants mobilisés pour traverser cette crise». Concrètement, il a réaffirmé le paiement du solde pour l’épisode 2016 (H5N1) à la mi-juillet. Par ailleurs, la mise en œuvre des avances de 50% afin de prendre en charge les pertes de production jusqu’au 29 mai pour cet épisode 2017 (H5N8) a été confirmée. Leur paiement a débuté.
Une des annonces nouvelles a concerné la mise en place d’une deuxième avance, qui sera effectuée sur le même modèle qu’en 2016. Quant à l’allongement de la période de référence au-delà du 29 mai, pour prendre en compte la totalité des pertes de production, le haut fonctionnaire a indiqué que l’État allait «reprendre le chemin de Bruxelles» afin d’y négocier une nouvelle enveloppe.
Enfin, Hervé Durand a mis en avant les dispositions obtenues pour l’aval de la filière. Malgré les règles contraignantes de l’Union européenne en matière de libre concurrence, un dispositif d’accompagnement des entreprises va être déployé. Pour l’heure, il ne concerne que l’épisode 2016, mais «il y aura une suite», a-t-il affirmé.
Menace pour la santé publique
Avant ces annonces, les premiers chapitres de l’assemblée générale étaient consacrés aux aspects sanitaires des deux crises. Tour à tour, Nicolas Eteradossi, représentant de l’Agence nationale de la sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses), puis Patrick Dehaumont, directeur de la direction générale de l’alimentation (DGAL), ont tenu à pointer du doigt les risques accrus vis-à-vis des virus influenza aviaire. Certaines souches, dont la présence est confirmée en Asie, représentent un danger pour la santé publique. Pour le directeur de la DGAL, cette menace zoonotique ne doit pas être prise à la légère.
Un tel contexte donne une ampleur plus grande encore aux enjeux de la biosécurité au sein de la filière. Dans ce domaine, l’intervention du professeur Jean-Pierre Vaillancourt, de la faculté de médecine vétérinaire à l’Université de Montréal, s’est révélée riche en enseignements. La présentation de l’expert québécois, spécialiste mondialement reconnu des problématiques de biosécurité, a notamment mis en exergue quelques notions essentielles pour la protection sanitaire des élevages avicoles. Il s’agit par exemple du principe de séparation. L’expert a surtout insisté sur l’importance de la lutte collective. Si la biosécurité commence chez soi, elle doit se raisonner de manière organisée et coordonnée.
Jean-Pierre Vaillancourt martèle que le salut passera par la filière. «Même si le monde scientifique peut apporter sa contribution, il faut que les acteurs eux-mêmes trouvent les solutions et se les approprient». Car un autre défi majeur de la biosécurité se situe au niveau de l’observance. «Les barrières sanitaires ne servent à rien si elles ne sont pas appliquées par tous et dans la durée…».
Modification de l’arrêté biosécurité
Rappelant l’avancée que constitue la signature du pacte de sécurisation de la filière en avril, les représentants de l’État ont indiqué la modification à venir de l’arrêté biosécurité de février 2016. Sa nouvelle version devrait paraître la semaine prochaine. Elle devrait apporter des précisions sur les règles en matière d’abreuvement et d’alimentation des animaux. Patrick Dehaumont a aussi évoqué la publication d’un arrêté spécifique “transport” à l’automne.
Il a également souligné le besoin de systèmes d’alerte sanitaire associée à un outil cartographique, pour assurer un tableau de bord fiable des élevages et de leur activité. «Ces systèmes seront opérationnels à l’automne». De plus, l’État a lancé un appel d’offres afin de se doter de capacités d’intervention sur site pour l’abattage de cheptels frappés par un incident sanitaire. «En cas de foyers, l’idée est de pouvoir vider puis geler une zone très rapidement».
Pour le Cifog, le déploiement de ces règles devra se faire dans le respect d’un certain nombre de notions sur lesquelles l’interprofession entend ne pas s’écarter. Le président, Christophe Barrailh, a redit le préalable indiscutable que constitue l’élevage en plein air, ainsi que la nécessité de conserver des modes de production divers et complémentaires. Les enjeux, conclut le Cifog, consistent désormais à définir un modèle sanitaire robuste, en collaboration avec les pouvoirs publics, et préserver l’image du produit et de la filière.
F. Brethes