Les commerces de proximité parmi les grands gagnants du confinement
Proposant des produits locaux à des prix plus accessibles, les épiceries de quartier et de centre-bourg pourraient voir l’embellie se poursuivre après le confinement.
En l’espace de deux mois, le confinement pourrait bien avoir redistribué les cartes dans le paysage du commerce alimentaire. «Pendant cette période, de nombreuses personnes se sont rendu compte qu’elles disposaient de nombreux commerces alimentaires autour d’elles et qu’elles n’avaient pas besoin de se rendre dans des grandes surfaces en périphérie», se félicite Cédric Szabo, directeur de l’Association des maires ruraux de France.
«Cette séquence un peu inédite a fait émerger trois types de commerces en milieu rural : ceux qui ont été fortement affectés par l’interdiction de rester ouverts, comme certains marchés de plein vent ; ceux qui ont réussi à s’adapter et ceux qui, comme la plupart des épiceries, sont parvenus à devenir incontournables dans leur commune et à capter une population qui se rend d’habitude en grandes surfaces», explique-t-il.
Incontournable, le Comptoir du Village à Courzieu, 1.100 habitants, l’était déjà, depuis son ouverture il y a deux ans. Dans cette commune de l’ouest de Lyon, ce commerce propose non seulement une épicerie mais aussi un bureau de poste, tous deux restés ouverts pendant la durée du confinement.
«Le plus dur a été le début du confinement, nous avons dû repenser tout le fonctionnement du magasin pour garantir le respect des mesures barrières et accueillir les clients, maximum trois en même temps dans la boutique. Nous avons maintenu nos horaires habituels car il était nécessaire pour nous que les habitants trouvent ce dont ils avaient besoin», explique Marion Laprevotte, l’une des salariées du point de vente.
Hausse du chiffre d’affaires
Comme de nombreux autres commerces de centre-bourg, l’épicerie a vu son activité augmenter en même temps que les bénévoles, qui complètent habituellement ses effectifs, se faisaient moins nombreux. «Cela a représenté une charge de travail plus importante que d’habitude, mais après quelques jours de rodage, nous sommes parvenus à prendre le rythme», raconte Marion Laprevotte. À l’heure du déconfinement, les mesures barrières resteront encore en vigueur, de quoi rassurer les nouveaux clients qui ont rejoint le magasin pendant ces deux mois.
Installé à Chabanière dans le Rhône, Pierre Journoud es,t depuis plus de dix ans, le gérant de l’enseigne Vival. Avec son épouse, ils n’ont pas hésité à se retrousser les manches pour faire face à une hausse d’activité soudaine. «Pendant deux mois, personne n’a bougé du village et ils sont tous venus s’approvisionner dans notre magasin. Par rapport à d’habitude, nos ventes ont explosé et notre chiffre d’affaires a augmenté de 30% sur la période», témoigne-t-il.
«Nous travaillons avec des producteurs locaux, c’est une démarche qui est essentielle pour nous. Cette période nous a permis de booster nos ventes de fruits et légumes et de renforcer notre collaboration avec ces producteurs en nous ouvrant à des produits comme le miel, le fromage, les jus de fruits ou encore la bière. Grâce à cette offre plus locale, nous sommes parvenus à capter environ 10% de nouveaux clients venus de villages alentour que nous espérons garder par la suite», raconte-t-il.
Après avoir majoritairement profité du confinement, les épiceries pourront-elles poursuivre sur la même dynamique ? C’est la question qui trotte aujourd’hui dans toutes les têtes, entre espoir d’une prise de conscience durable des citoyens pour le consommer local et crainte de les voir retourner vers les enseignes de la grande distribution. «Avec la fin du confinement, nous cherchons aujourd’hui à faire le bilan de cette période et à valoriser ce qui a pu être positif. Le potentiel des commerces de proximité en milieu rural est très intéressant même si nous ignorons si les gens continueront de venir y faire leurs achats, c’est encore trop tôt pour le dire. Ce que cette période nous a appris, c’est qu’un modèle différent peut fonctionner en dehors des enseignes de la grande distribution et ce sera aussi aux élus de mieux mettre en valeur ce marché local à l’avenir», conclut Cédric Szabo.
Pierre Garcia