Les députés font de nouvelles propositions pour les conditions d’abattage
Vidéosurveillance, formation, comité d’éthique, architecture, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie a passé en revue toute une série d’améliorations possibles en termes de bien-être animal au sein des abattoirs.
À écouter les auditions publiques de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie, il est frappant de constater le statu quo des membres de la filière par rapport aux propositions des associations de protection animale.
Dominique Langlois, président d’Interbev, interrogé le 11 mai, assure qu’entre la création du statut de lanceur d’alerte et du délit de maltraitance envers les animaux, envisagé par le Gouvernement, il «ne voit pas ce que l’on peut faire de plus». Il précise aussi qu’«il faut que les règles (N.D.L.R.: déjà en place) soient appliquées». Et pour cela, il renvoie la responsabilité aux services de l’État avec «une administration qui doit jouer son rôle» et «des sanctions plus lourdes».
À la question de la vidéosurveillance, il parle d’«interrogation sur la pertinence de la mesure», argue que «cela a un coût», évoque «la question juridique concernant le droit de filmer les salariés». Pour le président d’Interbev, «la vidéo, on n’y croit pas. La nuit, à chaque fois qu’il y a un problème, cela n’a jamais fonctionné!». Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, ne s’était pas positionné en faveur de cette mesure non plus, le 5 avril: «Une caméra qui surveille (N.D.L.R.: les employés), cela me pose question».
Éthologie et abattage
Les associations comme la Fondation Brigitte Bardot ou Compassion in World Farming (CIWF), qui ont pu s’exprimer le 11 mai, avancent de leur côté d’autres possibilités. «Un étourdissement systématique de tous les animaux» même en cas d’abattage rituel, la possibilité pour les éleveurs de rentrer inopinément dans les abattoirs, la création de comités d’éthique au sein des établissements, la mise en place de «sanctions dissuasives» ou encore un meilleur aménagement des abattoirs font partie des propositions.
Ghislain Zuccolo, directeur général de l’association Welfarm, fait appel à l’éthologie, «le parent pauvre des sciences du bien-être animal en France». Il propose d’«éviter de mélanger les animaux, mettre à plat les rampes de déchargement, installer des brumisateurs pour les porcs, supprimer les sons aigus des claquements de barrière, éclairer les passages d’animaux, diffuser des phéromones apaisantes, éviter les angles droits».
Cadences et agréments
Il parle de Temple Grandin, une zootechnicienne américaine qui a révolutionné l’architecture des abattoirs pour le bien-être des animaux et la sécurité des employés. Il évoque également le fait que «jusqu’en 1990, le matériel d’abattage recevait un agrément du ministère», une mesure «peut-être à remettre en place».
En effet, les salariés des abattoirs comme les associations de protection animale ont dénoncé les défaillances techniques des matériels utilisés, tout comme les cadences parfois élevées. «Les cadences peuvent faire perdre la notion du temps», observe-t-il.
Caroline Brousseaud, cofondatrice de l’Association en faveur de l’abattage des animaux dans la dignité (AFAAD), propose donc de «normer les cadences au niveau européen», estimant que cela sera bénéfique aussi bien pour les hommes que pour les animaux. «On ne peut pas traiter la question du bien-être des animaux sans traiter celle concernant les hommes», lance-t-elle.
Les abattages rituels en question
Du côté de l’abattage rituel, les associations défendent un étourdissement systématique, comme cela se fait dans une dizaine d’autres pays européens. Christophe Marie, directeur du pôle protection animale de la Fondation Brigitte Bardot, évoque la difficulté des abattoirs à négocier des accords avec la communauté musulmane dans chaque localité pour abattre en halal. Une législation simplifierait le problème.
Dominique Langlois répond par de l’économique: «L’arrêt de l’abattage rituel serait une catastrophe économique». Il susciterait une baisse de 22% d’abattages en ovin et de 14% en bovin en cas d’arrêt de l’abattage rituel. De plus, le marché casher «ne prend que les avants», selon lui. Comment vendre alors les arrières de la carcasse dans le cas d’un étiquetage du mode d’abattage comme le demandent certaines associations? «Le consommateur qui aura devant lui les étiquettes» fera très vite le tri, d’après lui.