Les éleveurs de volailles, victimes collatérales de l’influenza aviaire
Impactée par les mesures de protection qui empêchent les nouvelles mises en place et de restriction des mouvements des animaux prises pour endiguer l’épizootie de l’influenza aviaire H5N8, la filière des volailles de chair du Sud-Ouest bat de l’aile. Bernard Tauzia, président de l’Association régionale volailles de chair d’Aquitaine (Arvol) attend un engagement fort de l’État.
Lors d’une réunion d’information organisée le 5 janvier dernier dans la salle des fêtes de Cazères-sur-l’Adour (Landes), jour du lancement de l’abattage préventif dans les zones concernées, Christophe Barrailh avait tenu à saluer la solidarité des éleveurs de volailles landais envers leurs confrères producteurs de palmipèdes. «La filière volaille est une victime collatérale du virus», avait souligné le président du Cifog.
Ce jour-là, Bernard Tauzia s’était exprimé et espérait pouvoir relancer au plus vite la production de volailles en plein air «sur un marché très concurrentiel où chaque jour de production en moins représente une part du marché perdue pour les éleveurs landais». Reçu ce jeudi 19 janvier au cabinet du ministère de l’Agriculture à propos de la crise aviaire, le président de l’Arvol attend un engagement fort de l’État dans l’accompagnement des producteurs sur le plan financier et technique.
Remise en place des volailles demandée
Si la mesure préventive d’abattage n’a pas été appliquée aux volailles, l’impossibilité de remettre en place des bandes pose problème. Jour après jour, les conséquences financières se font ressentir. Mais le président de l’Arvol ne désespère pas : la filière n’en est pas à son premier tour de force. Ainsi, il y a un mois, à l’amorce de cet épisode sanitaire, elle avait obtenu la sortie des volailles festives dans les périmètres de protection et de surveillance.
De même, la semaine dernière, «on a réussi à remettre en place des volailles dans cinq zones stabilisées : celle d’Ibos dans les Hautes-Pyrénées, de Monbahus dans le Lot-et-Garonne, celle de la commune tarnaise d’Almayrac et celles autour de Beaumont et de Mansempuy dans le Gers». Ces zones, dites stabilisées, ne comptent plus de nouveaux cas depuis plus de huit jours et sont dépeuplées. Ce sont les raisons pour lesquelles la réintroduction des gallinacés a été autorisée. «Une satisfaction minime» pour l’éleveur de Campagne au vu du reste de la situation…
Deux millions de pertes
Depuis l’instauration des mesures de protection sur les premières zones contaminées, l’interdiction de mises en place a coûté environ 500.000 volailles en moins par semaines. Une situation pire que lors du précédent épisode sanitaire. «Poulets standards, cailles, en label, cela concerne tous les gallinacés et toute la région. Sur une base moyenne de 4,10 euros par tête, la perte est estimée à plus de 2 millions d’euros. C’est une perte généralisée de l’ensemble des acteurs de la filière», déplore Bernard Tauzia.
Le président de l’Arvol souhaite donc remettre des poulets en place et au plus vite dans les zones actuellement dépeuplées. «C’est vraiment difficile à encaisser et frustrant de ne pas pouvoir continuer de produire. Nous travaillons avec les acteurs de la direction générale de l’alimentation (DGAL) pour pouvoir rapidement relancer la production». Les professionnels de la filière continuent de travailler d’arrache-pied pour faire avancer la situation, notamment sur les modalités de reprise.
Les derniers cas de H5N8 recensés en volailles ne paniquent pas l’éleveur landais. «Je n’accuse personne. Au contraire, depuis le début, nous partageons le désarroi des éleveurs de palmipèdes à qui, encore une fois, nous exprimons toute notre solidarité. Mais les cas de H5N8 sur des volailles sont certainement dus à la contamination par le transport ou par la proximité avec des élevages de palmipèdes. Nous devons parvenir à contrôler ces aspects pour endiguer le virus».
Deux systèmes différents
Justement, la maîtrise des mesures de biosécurité différencie le système d’élevage des volailles de chair de celui des palmipèdes à foie gras. «Dans notre filière, il y a une approche différente de la biosécurité car notre système est structuré différemment que celui en palmipèdes. Depuis 2006, nos élevages sont, par exemple, équipés d’une chape sanitaire et les transports entre les différents stades de production sont limités. On reçoit les poussins et on les fait partir à terme vers l’abattoir».
Les représentants professionnels continueront d’insister, dans les semaines, à venir auprès de l’État sur ces notions. Ils misent d’ailleurs beaucoup d’espoir sur le dossier du fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental. «Nous espérons que ce fonds va être abondé par l’État afin de pouvoir apporter un soutien financier aux éleveurs, frappés de plein fouet par une crise sanitaire».
Baptiste Ducasse