Les marchés céréaliers broient du noir
Les prix des grains affichent un repli quasi-général en 2017. En cause, des fondamentaux de marché négatifs avec notamment une offre pléthorique en blé et maïs.
D’importantes récoltes ont encore pesé sur les marchés des grains en 2017. Au record mondial de l’année précédente succède la «deuxième plus grosse moisson jamais enregistrée», à 2.079 millions de tonnes, toutes céréales confondues en 2017-2018, souligne le Conseil international des céréales (CIC) dans son dernier rapport. Cette offre pléthorique dans le monde limite la volatilité, observe, chez Vivescia, le responsable de l’analyse des marchés Alexandre Marie, pour qui «les prix sont restés plutôt stables». Rien à voir avec le yo-yo d’il y a une dizaine d’années, les cours restent englués dans le rouge. Une tendance baissière amplifiée par le renchérissement de l’euro, qui a gagné 14% face au dollar.
» Blé tendre : - 16€/t, à 151€/t rendu Rouen - Dans son bilan conjoncturel 2017, FranceAgriMer note que «les cours du blé meunier départ Eure-et-Loir baissent sensiblement sur un an» : en moyenne, 154,40 €/t de juillet à octobre contre 161,50 €/t en 2016-2017, qui était déjà un point bas depuis 2009-2010. Fin décembre, la cotation affiche même 144 €/t, selon La Dépêche-Le Petit Meunier. Le marché croule sous la production russe, chiffrée par l’USDA au niveau record de 83 millions de tonnes.
Même tendance à Chicago, où le blé termine l’année à 4,27$/boisseau contre 5,60$ mi-juillet : la bulle liée au coup de sec sur le blé de printemps aux États-Unis s’est dégonflée, indique Alexandre Marie. Agritel juge qu’«il y a peu de potentiel de rebond», avec la Russie encore très présente à l’exportation grâce à une météo clémente et une logistique à la hauteur. Reste à surveiller les conséquences de la vague de froid Outre-Atlantique.
» Maïs : - 16€/t, à 151€/t Fob Bordeaux - «Des volumes records de maïs sud-américains entrent sur le marché européen», selon l’analyste de Vivescia, Alexandre Marie. Tout le continent inonde la planète. L’Argentine augmente sa production de 25 millions de tonnes, à 40/45 millions, dopée par une levée des taxes et une plongée du peso, explique-t-il. Le Brésil enregistre un bond à quelque 100 millions de tonnes, après les 67 millions d’une année plus sèche. Les États-Unis profitent aussi d’une bonne récolte. Dans ce contexte, «le maïs français manque de compétitivité», souligne Agritel.
» Blé dur : - 25€/t, à 215€/t départ Sud-Ouest - Les cours du blé dur terminent 2017 comme ils l’ont commencée, dans le rouge, relève Agritel. La production mondiale apparaît en nette baisse, sous l’effet de la sécheresse en Amérique du Nord. Mais l’abondant stock du début de campagne neutralise la chute du volume récolté. Et la demande mondiale s’avère décevante, ajoute la société de conseil.
» Orge : +7€/t, à 146,75€/t rendu Rouen - La demande mondiale en orge fourragère se montre «dynamique, surtout venant de la Chine et de l’Arabie saoudite», avec à la clé une hausse des prix, d’après la note de FranceAgriMer. Côté offre, la production ressort à un niveau plutôt correct, mais «comme il s’agit d’une petite céréale, un léger accident suffit à tendre le marché», pointe Alexandre Marie. La moisson australienne, en nette baisse, contribue à resserrer le bilan mondial. Conséquence, l’écart de prix avec le blé s’amenuise : l’orge rendu Rouen apparaît 5€/t en dessous fin 2017.
L’orge de brasserie signe une bonne performance sur l’année écoulée : +1€/t, à 194€/t Fob Creil pour les variétés de printemps, d’après les indications d’Agritel. «La production européenne est mauvaise pour la deuxième fois de suite», note l’analyste Alexandre Boy. Cela génère «des prix relativement corrects». «L’agriculteur couvre ses coûts de production, si la qualité est au rendez-vous», avance-t-il. Un cas à part dans l’univers des céréales.
» Colza : - 66€/t, à 349€/t Fob Moselle - La plus forte baisse en 2017 vient du colza, qui partait toutefois de haut. «El Niño a fortement soutenu les cours de l’huile de palme en 2016», rappelle l’analyste Alexandre Marie. Les effets du phénomène climatique ont ensuite disparu. «Jusqu’au mois de mai 2017, les cours du colza rendu Rouen ont été plus élevés» que lors de la précédente campagne, indique FranceAgriMer.
Septembre marque un décrochage. «Une récolte canadienne record, supérieure à 21 millions de tonnes de canola, a calmé le marché», analyse Alexandre Marie. Les cours de l’huile sont repartis à la baisse, plombés par la production de palme en Asie. Agritel voit dans l’actuel renchérissement du pétrole, au plus haut en trois ans, «un élément de soutien à long terme».