Les Régions dénoncent le retard de paiement des fonds Feader
Concernant la mise en œuvre de la gestion des fonds Feader par les Régions «le dispositif national retenu ne sera jamais efficace», a alerté Philippe Mangin, vice-président du conseil régional Grand-Est, le 1er mars dernier lors d’une conférence de presse organisée au Salon international de l’agriculture à Paris.
Régions de France a dénoncé les dysfonctionnements logistiques de l’État qui retardent, de plus d’un an à certains endroits, le versement des aides aux agriculteurs. «Le ministre de l’agriculture n’a pas toujours été franc en laissant entendre que les retards étaient le fait des Régions alors que c’est l’outil de gestion national (N.D.L.R.: le logiciel dédié, Osiris) qui ne fonctionne pas», a regretté Philippe Richert, le président de Régions de France.
Alors que l’agriculture française traverse une crise sans précédent, il déplore l’incapacité de l’Agence de services et de paiement (ASP) à verser en temps et en œuvre les aides dues aux agriculteurs. «L’ASP a embauché 200 personnes, mais ça ne suffira pas!», estime Philippe Mangin. «On ne peut pas tout gérer au même endroit, poursuit-il, car c’est nier toute la diversité de l’agriculture».
Transfert des moyens financiers et humains
Les Régions en sont convaincues, elles sont les mieux à même de définir les politiques agricoles en fonction des spécificités de leurs territoires. Ainsi, depuis qu’elles ont récupéré cette nouvelle compétence, elles travaillent à la «coconstruction, avec la profession agricole, des orientations politiques en fonction des réalités territoriales».
Pour mettre en œuvre ces politiques, il est «absolument indispensable», selon les termes du président Philippe Richert, que les Régions aient «tous les moyens […] pour exercer leurs compétences», c’est-à-dire que les «moyens financiers et humains» dédiés leur soient transférés. Pour Régions de France, cette régionalisation est la clé de la réussite de l’agriculture française.
Philippe Richert est d’ailleurs très critique à l’égard des programmes présidentiels de Marine Le Pen (Front national) et Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche), qui tendent, pour la première, à «supprimer les Régions» et, pour le second, à «renationaliser la prise de décision».
Preuve de l’opportunité de la régionalisation, Région de France cite l’exemple de l’Allemagne qui a délégué sa politique agricole aux länder et ravi, en même temps, à la France la place de leader européen agricole.
Coprésidence État-Régions des CSO
Le transfert des moyens aux Régions pourrait également permettre de ne pas renouveler l’accident relatif aux MAEC (mesures agro-environnementales et climatiques) et aides bio: les enveloppes régionales ont été consommées en un temps record. Là encore, Régions de France rejette la faute sur l’État: «On nous a imposé une maquette (N.D.L.R.: fixation nationale des montants alloués par hectare) qui n’était pas tenable», explique Philippe Richert.
Dans sa région Grand-Est, par exemple, il a fallu rajouter 10 millions d’euros pour répondre au succès des conversions en bio (+25% en 2015 et +25% en 2016). Si les Régions avaient pu moduler les modalités de mise en œuvre des aides, les budgets auraient été mieux répartis, estime Régions de France.
Plutôt que de réclamer des correctifs a posteriori, les régions voudraient faire entendre leur voix «en amont de l’élaboration des politiques». Elles demandent donc, à ce titre, la mise en place d’une coprésidence — État/régions — des Conseils supérieurs d’orientation (CSO) agricole et forêt. Les revendications sont grandes, mais le calendrier peu propice. L’élection présidentielle laissera probablement un temps de latence, mais l’essentiel pour Régions de France reste de faire passer ses revendications pour la mise en œuvre de la PAC post-2020.