L'Etat veut siphonner les chambres d'agriculture
Après les chambres de commerce et d'industrie, l'État a l'intention de prélever 100 millions d'euros sur les réserves des chambres d'agriculture. Cette ponction prévue pour 2015 devrait être réalisée sur les réserves qu'elles ont provisionnées. Elle intervient au plus mauvais moment puisque les chambres auront à subir, à cette date, une amputation de leurs ressources liée à l'entrée en vigueur de la révision à la baisse de 2 % de la taxe sur le foncier non bàti (TFNB) qui représente 45 % de leur budget total.
Le président Guy Vasseur ne cache pas sa rancoeur et ses inquiétudes pour l'avenir des chambres d'agriculture, du fait de la volonté de l'État de ponctionner les budgets des instances consulaires.
Les chambres seront-elles dans l'obligation de réduire leur emploi?» s'interroge Guy Vasseur. «Considère-t-on que leur rôle est nuisible à l'efficacité des exploitations agricoles françaises?» tempête le président de l'APCA (Assemblée permanente des chambres d'agriculture). S'il se hérisse ainsi, c'est qu'il conteste une volonté du gouvernement de ponctionner les budgets des chambres d'agriculture. «Les chambres d'agriculture ne refusent pas de contribuer au redressement budgétaire du pays, assure le président national, mais au moins de manière intelligente». Or, à l'entendre, la ponction est excessive.
Cette ponction est la résultante de la programmation budgétaire 2015-2014 dont les éléments ont été transmis aux parlementaires le 9 juillet. Mais dont le dispositif est en concertation depuis plusieurs jours. Les chambres d'agriculture, établissements consulaires, sont financées en général, pour moitié de leur budget, par une taxe additionnelle à la TFNB (taxe sur le foncier non bàti).
Dans le cadre de la programmation budgétaire, l'objectif de l'État, selon Guy Vasseur, est double. D'une part, il s'agirait de réduire la contribution de cette taxe sur les trois prochaines années, de 2% supplémentaires chaque année, c'est-à -dire 2% en 2015, 4% en 2016 et 6% en 2017. Soit au total, sur trois ans, un prélèvement de 36millions d'euros.
Programmation et fonds de roulement
Deuxième étage de la ponction, toute trésorerie serait prélevée au-delà de ce qui constitue 90 jours de fonds de roulement. Ce qui représenterait, selon les experts du ministère des Finances, un montant de l'ordre de 100 millions d'euros. Impossible! clame Guy Vasseur.
Cette évaluation a été faite sur la base d'une image budgétaire qui date de 2013. Or, depuis, l'État lui-même a demandé aux chambres de provisionner les sommes prévues pour les congés payés de leurs salariés. Ce qui réduit donc la trésorerie disponible.
La bonne gestion pénalisée!
De plus, bon nombre d'entre elles ont dû provisionner des budgets conséquents pour des travaux à réaliser sur 2014 et les années suivantes. Tout cela fait que la trésorerie des chambres d'agriculture a considérablement baissé. Il faudrait donc que le ministère des finances reconsidère la question en fonction de la situation de 2014 et qu'il renonce, sans doute, à prélever 100 millions d'euros.
Or, «on sent Bercy inflexible», s'inquiète Robert Chaze, président de la chambre d'agriculture d'Indre. Et de regretter que ce soient «les chambres d'agriculture les mieux gérées qui seront les plus pénalisées». Celui-ci ne comprend pas qu'à une époque de grande mutation agricole, à la demande même du gouvernement qui prône l'agroécologie et le développement du savoir-faire agronomique, on rogne les ailes financières des chambres d'agriculture. Réduire l'emploi? «Déjà , je n'embauche plus qu'en CDD», affirme Robert Chaze qui s'attend à devoir renoncer à remplacer des départs à la retraite.
Affaiblissement
Sa rancoeur est d'autant plus grande que les chambres d'agriculture les plus riches ne sont pas forcément celles qui ont les trésoreries les plus importantes mais celles qui se situent dans une région où l'assiette fiscale est la plus élevée. De plus, il ne faut pas affaiblir l'aide au développement agricole qui est aussi une aide permettant de lutter contre les inégalités, insiste Robert Chaze.
Guy Vasseur a rencontré les ministres du budget et de l'agriculture et a envoyé une lettre au Premier ministre en espérant bien convaincre l'État de renoncer à ces prélèvements. Ou tout au moins de les baser sur la réalité économique de 2014 et non celle de 2013.