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Luxey : culture et agriculture au cœur d’un océan de forêt

Troisième commune des Landes en matière de superficie, Luxey est aussi l’une des moins densifiées. Mais trois jours par an, au cœur de l’été, le village forestier voit sa population multipliée par trente, le temps d’un festival musical.

file-La petite commune landaise se démarque par sa boulimie culturelle. À l’image de Musicalarue, dont la 31e édition, prévue cette fin juillet, a dû être annulée pour cause de crise sanitaire.
La petite commune landaise se démarque par sa boulimie culturelle. À l’image de Musicalarue, dont la 31e édition, prévue cette fin juillet, a dû être annulée pour cause de crise sanitaire.

Si l’on compte une moyenne de 1.300 pins à l’hectare, il y a 22.500 fois plus d’arbres que d’habitants à Luxey ! Avec ses 16.007 hectares, le village est le troisième plus grand du département des Landes (après Sabres et Biscarrosse). La forêt en occupe 13.000, l’agriculture 2.000. Reste à peine plus de 1.000 hectares pour accueillir les 752 âmes enregistrées lors du dernier recensement.

Sans surprise, après la loi d’assainissement et de mise en culture des Landes de Gascogne promulguée en 1857, c’est autour de l’activité sylvicole que le village s’est construit. «Vers 1900, il y avait 1.500 habitants à Luxey, indique Serge Sore, maire de la commune depuis 2014. À l’époque, 200 familles vivaient de la résine». Deux usines distillaient la sève des pins pour en tirer de l’essence de térébenthine et de la colophane. Mais l’arrivée de produits de synthèse en provenance de Chine a entraîné leur fermeture en 1954. Jusque dans les années 1980, quelques scieries et une activité de bûcheronnage ont subsisté. «Après, le village a vivoté…»

Brillante ressource

Avec seulement 70 ha de forêt en propriété, la commune a peu de ressources. Depuis six ans, elle peut néanmoins compter sur le «beau loyer» que lui rapporte un champ photovoltaïque de 20 ha installé sur une ancienne parcelle dévastée par la tempête Klaus. «Seule source de revenu de la commune», la surface pourrait doubler dans les années à venir. Elle ne permet toutefois pas à Luxey de rouler sur l’or. Si l’école a pu être refaite il y a une dizaine d’années, c’est grâce à la mutualisation des services mise en place par la communauté de communes Cœur de Haute Lande.

Du point de vue économique, cinq maïsiculteurs se sont installés depuis une trentaine d’années, diversifiant peu à peu leurs cultures avec des pommes de terre, du blé, des asperges et des carottes. La commune héberge également une maison de retraite qui emploie 40 salariés et une entreprise de BTP qui en compte une trentaine.

Et aussi étonnant que cela puisse paraître, de nombreux commerces de proximité animent toujours le centre bourg. À côté de l’incontournable Cercle de l’Union, bar-restaurant créé en 1900 sur la place du village, on trouve une alimentation tabac papeterie, un boulanger, un coiffeur, une esthéticienne, une onglerie, une pizzeria, un restaurant et même un maroquinier.

Bouillonnement culturel

Mais si Luxey se démarque, c’est par son bouillonnement culturel. Sur les bords du ruisseau qui traverse le village, les visiteurs tombent nez à nez avec Apollon prenant son bain… Cette sculpture de Marine Julié a été installée en 2017. Elle fait partie de la Forêt d’art contemporain, une collection d’une vingtaine d’œuvres monumentales disséminées dans les communes du Parc régional des Landes de Gascogne.

D’un point de vue patrimonial, le village a également accueilli, jusqu’en 2000, une antenne de l’écomusée de Marquèze. L’atelier des produits résineux était installé dans les locaux — devenus trop vétustes — d’une ancienne usine de distillation. Aujourd’hui rénovés, ils pourraient retrouver leur vocation touristique. Une étude muséographique est en tout cas programmée en 2021.

Et comment ne pas évoquer l’attachement de la commune à la musique ? À la fin des années 1960, un groupe d’adolescents a eu envie de «faire la fête autrement». Chaque année, à l’occasion des fêtes du 15 août, ils organisaient des spectacles amateurs attirant de plus en plus de monde. «Après 20 ans à ce rythme, on a manqué d’imagination, sourit Serge Sore. On a décidé de se tourner vers des spectacles professionnels».

Une scène unique

C’est ainsi qu’est né le festival Musicalarue. Pour la première édition en 1989, c’est le saxophoniste Manu Dibango, emporté il y a quelques semaines par le coronavirus, qui était en tête d’affiche. «Année après année, on a trouvé notre chemin», indique François Garrain, président de l’association organisatrice. La bascule entre petit festival de musique et évènement incontournable s’est faite en 2003, avec la venue du groupe Tryo. «On a manqué de billetterie. Ça a été une folie totale», se souvient Serge Sore. La manifestation attire désormais près de 60.000 spectateurs par an.

«Son cadre atypique, son projet artistique mêlant musique, chanson et théâtre de rue dans quinze lieux du village et ses tarifs inférieurs à ce qui se fait ailleurs sont certainement les clés de son succès, estime François Garrain. Sans compter son amplitude horaire, de 15h00 à 6h45, qui en fait une manifestation qui rassemble toutes les générations».

Mais Musicalarue, ce n’est pas qu’un grand raout estival. «Le chant des cigales de l’été accompagne le travail de fourmi que nous faisons tout au long de l’année», se plaît à rappeler le président. Programmation annuelle dans la salle des Cigales, accueil d’artistes en résidence, spectacles chez l’habitant et dans des lieux insolites (Ehpad, centre pénitentiaire, aire d’autoroute) en avril avec “Musicalarue à domicile”, découverte de jeunes artistes début mai avec “Musicalarue sur un plateau”. Les propositions sont multiples.

Évidemment, cette année tout a été annulé. L’affiche estivale promettait pourtant de belles soirées avec M, Philippe Katerine, Angèle, Alain Souchon et tant d’autres. «Nous avons décidé de tout stopper dès le 18 avril. Il n’était pas envisageable de prendre le moindre risque dans la situation sanitaire actuelle.» Seule consolation : le 30 juin prochain sera annoncée la programmation 2021 en même temps que l’ouverture de la billetterie.

Cécile Agusti

 

 

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