Malgré de nombreuses incertitudes, la PAC d’après 2020 déjà en discussion
Les négociations de sortie du Royaume-Uni de l’UE risquent de retarder l’entrée en application de la prochaine PAC prévue pour 2020, sans compter qu’en 2019, le Parlement européen et donc la Commission seront renouvelés. Néanmois, le commissaire à l
Il sera «difficile» de finaliser la prochaine réforme de la PAC pour qu’elle entre en vigueur comme prévu en 2021, a prévenu le ministre français de l’agriculture, Stéphane Le Foll, le 6 mars à Bruxelles à la sortie de ce qui était son dernier conseil des ministres européens. En effet, planent sur cette nouvelle réforme les pourparlers sur la sortie du Royaume-Uni de l’UE qui vont occuper, pendant au moins deux ans, le devant de la scène.
Des pourparlers qui vont retarder d’autant les discussions sur le prochain budget européen, préalable indispensable à la conclusion d’un accord sur la PAC. À cela s’ajoute que le Parlement européen sera renouvelé fin mai 2019 et qu’il en sera de même pour la Commission de Bruxelles, six mois plus tard.
Pas de révolution
La Commission européenne fait néanmoins comme si l’échéance de 2020 restait tenable. Elle a lancé début février, pour douze semaines, une consultation publique pour laquelle elle a déjà reçu 13.000 réponses, et qui servira de base à sa communication sur l’avenir de la PAC attendue pour le mois de novembre, puis à des propositions législatives formelles en 2018.
Mais, sans même parler de budget, tant que Bruxelles n’aura pas mis sur la table ces propositions concrètes, les discussions sur la future réforme de la PAC en resteront au stade des généralités. Comme en a témoigné le tour de table des ministres de l’agriculture des Vingt-huit, organisé le 6 mars par la présidence maltaise.
Il ressort quand même de ce débat que les États membres demandent surtout des adaptations du dispositif en place plutôt qu’une réforme en profondeur. Ils se sont globalement dits attachés à la structure actuelle de la PAC avec ses deux piliers. De nombreuses délégations ont également défendu les aides couplées nécessaires à la protection des secteurs les plus fragiles.
Mais, répondant à une question sur ce point précis de la présidence maltaise, nombreux sont ceux qui ont souhaité augmenter les marges de manœuvre pour transférer des fonds dans un sens ou dans l’autre entre les deux piliers. Seuls les Pays-Bas ont exprimé leur volonté de supprimer les paiements directs au profit du seul développement rural qui permet de mieux répondre aux spécificités locales.
Un certain nombre de «nouveaux» États membres ont, pour leur part, de nouveau plaidé pour une convergence totale du niveau des aides directes. Tous s’accordent surtout à plaider pour une simplification de la réglementation qui signifie pour la plupart accorder plus de subsidiarité à chacun pour mettre en œuvre le cadre général. «Il faut se faire confiance, nous ne devons pas constamment risquer d’être rattrapés par des apurements des comptes» de la part de Bruxelles, a résumé Stéphane Le Foll.
«Faire des choix»
Même chose, par exemple, pour la République tchèque qui, au nom de la diversité du secteur agricole, estime qu’il ne devrait pas y avoir de plafonnement des aides. C’est aussi le cas pour le dispositif de verdissement des aides (30% des soutiens directs sont conditionnés à la mise en place de mesures favorables à l’environnement) mis en place en 2013, qui a fortement complexifié la PAC, que ce soit pour les agriculteurs ou les administrations nationales.
Le ministre français a plaidé pour un dispositif qui repose sur les résultats plutôt que des normes. Pour son homologue danois, il faudra revoir ensemble l’écoconditionalité et le verdissement pour éviter les chevauchements entre les deux systèmes voire les rapprocher.
Mais d’autres ne l’entendent pas de cette oreille. Plus de 150 associations de protection de l’environnement se prononcent, dans une position commune adoptée le 5 mars, pour une remise à plat radicale de la PAC afin de mieux prendre en compte l’environnement et d’assurer «des revenus équitables et des conditions de travail décentes pour les agriculteurs».
Le commissaire européen à l’agriculture, Phil Hogan, s’est, lui, contenté d’être à l’écoute, prévenant néanmoins qu’avec 9 milliards d’euros en moins dans le budget de l’UE du fait de la sortie du Royaume-Uni, il «faudra faire des choix. On ne pourra pas faire plus avec moins de moyens».