PAC : les producteurs de maïs s’opposent à la rotation exclusive des cultures
L’histoire semble se répéter pour les maïsiculteurs français. Comme lors de la précédente réforme de la PAC en 2013, la monoculture est clairement remise en question dans la nouvelle mouture préparée par l’Union européenne. Face à la menace, l’AGPM et le réseau FDSEA/JA contre-attaquent en rangs serrés.
«La conditionnalité se durcit, prévient Daniel Peyraube, le président de l’AGPM. La BCAE 8 (Bonnes Conditions Agricoles et Environnementales) imposerait une rotation annuelle des cultures à la parcelle». Et donc sonnerait le glas de la monoculture du maïs. L’enjeu est de taille pour l’agriculture du Sud-Ouest. En effet, nombre de systèmes et de filières se sont construits autour du maïs : élevage, biocarburant, construction, bioplastique, textile… «La maïsiculture crée une dynamique de territoire, assure Daniel Peyraube. Elle est très créatrice d’emploi. On n’est pas des Khmers du maïs, mais il faut des adaptations pragmatiques et réalisables».
La remise en cause de la monoculture obligerait, notamment, les agriculteurs à trouver des cultures de substitution et revoir leur chaîne de production. «C’est très facile à dire sur un coin de table bruxellois, mais sur le territoire et pour les outils économiques qui en dépendent, c’est une tout autre histoire», lance le président de l’AGPM.
En effet, la maïsiculture est une production à très forte valeur, qui fait vivre des exploitations agricoles à taille humaine. Mais aussi de nombreuses filières agroalimentaires. «Si on veut faire d’autres productions qui ont un plus faible rendement à l’hectare, il faudra décupler les surfaces de production.» Sans être certain de maintenir les revenus des exploitants…
Un effet domino
L’effet domino qui résulterait de l’abandon de la monoculture pourrait donc être dramatique, assurent les professionnels agricoles. Par exemple, le maïs alimente les filières animales. «Si on n’a plus de maïs, on n’a plus d’élevage», souffle Sylvain Bordenave, président de JA 64. «Viande bovine, lait, cochon, canard, volailles, tout est lié», renchérit Marc Dupouy, secrétaire général de la FDSEA 64.
D’autre part, la diversification des cultures va entraîner une utilisation supplémentaire de produits de synthèse, le maïs en étant très peu gourmand. «C’est un élément qu’il faut prendre en compte avec le changement climatique et les évolutions des demandes sociétales auxquelles il faut impérativement répondre», souligne Daniel Peyraube.
La profession agricole reprend donc son bâton de pèlerin pour convaincre que la monoculture n’est pas une pratique nocive pour l’environnement. Et pose ses revendications : «Nous souhaitons que la rotation exclusive d’une année sur l’autre ne soit pas une obligation, explique Franck Laborde, président de la FDSEA 64. On demande que la rotation maïs/couvert soit reconnue et inscrite dans les règles européennes. On sait que le ministère de l’Agriculture va défendre notre position».
Faire reconnaître certaines pratiques
Les négociations sont en cours, notamment sur l’aspect technique de la BCAE 8. «On doit répondre aux critères bruxellois pour parvenir à un accord recevable, conclut Daniel Peyraube. On n’est pas des intégristes du maïs, on est prêt à faire des efforts. Mais on fait des choses aujourd’hui qui ne sont pas reconnues. On veut faire reconnaître tout ce que les agriculteurs font déjà».
Reste la question des éco-régimes, qui pourraient, eux aussi, exclure de nombreux agriculteurs. Les projections avancent une perte pouvant aller jusqu’à 70€ par ha pour ceux qui ne rentrent pas dans les critères. La mobilisation reste donc très active pour porter la voix des maïsiculteurs français.
Y. Allongue