Présidence de l’Union européenne : l’Allemagne à la manœuvre
Après la Croatie, c’est au tour de l’Allemagne de prendre la présidence du Conseil des ministres de l’Union européenne pour le second semestre 2020. La chancelière allemande, Angela Merkel, veut impulser des réformes profondes. Dans sa déclaration gouvernementale devant le Bundestag, et sur fond de pandémie, elle a plaidé pour plus de solidarité au sein de l’UE.
La présidence allemande doit faire avancer d’importantes réformes parmi lesquelles le Green deal, qui doit rendre la croissance plus durable, y compris en agriculture. Mais du point de vue de l’agriculture, cette présidence risque d’être contrariée par les divergences nationales allemandes entre la politique agricole et la politique de l’environnement au sein même du gouvernement de grande coalition.
La présidence croate a été terriblement handicapée par la pandémie de coronavirus. Elle n’a pas pu véritablement faire avancer la réforme de la politique agricole commune car, dès le départ, les ministres de l’Agriculture avaient affirmé que sans sécurité financière, ils ne concluraient pas cette réforme.
Puis à partir de mars, la pandémie étendait sa paralysie. La présidence croate n’a pu régler finalement que la question de la transition entre l’ancienne et la nouvelle PAC. La Commission voulait limiter cette transition à un an, pour faire pression en faveur d’une solution rapide. Une partie des ministres voulait deux ans. La décision est tombée finalement pour un an, avec possibilité de prolongation.
Tout reste à faire
Pour la suite, la présidence allemande devrait concentrer son action sur deux points importants : le financement de l’Union européenne pour les années à venir, de concert avec le programme de relance consécutif à la crise de coronavirus, et la PAC. Avec un budget agricole, pour le moins stable, la ministre de l’Agriculture, Julia Klöckner, aura un parcours un peu plus facile, même si sa présidence sera encore marquée par la pandémie.
Cela fait deux ans que l’on discute de cette réforme de la PAC, avec peu d’avancées. Pourtant la majorité des ministres de l’Agriculture acceptent les propositions d’attribuer plus de marge de manœuvre aux États, c’est-à-dire un catalogue européen dans lequel les États puiseront. Mais dans le détail les opinions des ministres divergent.
Ligne verte de démarcation
La moitié du Conseil, avec la France et l’Allemagne, veut lier les aides directes plus fortement à des contraintes environnementales. Les éco-schèmes devraient aller plus loin que le verdissement passé et intégrer des éléments “de la Ferme à la table” et de la stratégie “Biodiversité 2030”. L’autre moitié du Conseil ne veut pas de règles écologiques obligatoires, ni d’un budget minimum pour cela.
Il appartiendra à la ministre allemande de rechercher un compromis entre ces opinions éloignées. Elle aura donc à trouver des solutions à la fois pour la période de transition et pour la réforme de la PAC. Elle vise un accord pour octobre au niveau du Conseil des ministres, afin de pouvoir ensuite engager les discussions en trilogue avec la Commission et le Parlement européen. Mais, peut-être la période de présidence allemande ne sera-t-elle pas suffisante ? Et ce sera au Portugal, qui prendra la suite, de conduire la réforme de la PAC à bon port.