Réintroduction de l’ours : De Rugy choisit de raviver les tensions
Sitôt nommé, le nouveau ministre de la Transition écologique est venu à Pau, ce jeudi 20 septembre, confirmer la réintroduction de deux ourses en Béarn «d’ici le début octobre», au cours d’une réunion organisée à la préfecture. Les élus des communes concernées et le président de la chambre d’agriculture ont immédiatement quitté la salle… Au même moment, à Asasp-Arros (notre photo), les éleveurs ont affiché leur détermination à s’opposer au projet.
Pour les éleveurs, élus et autres organisations professionnelles opposées à la réintroduction d’ours dans les Pyrénées, la simple annonce de la venue de François De Rugy en Béarn constituait un signe de très mauvais augure. D’autant que ce déplacement intervient deux semaines à peine après sa prise de fonction au ministère de la transition écologique et solidaire.
Effectivement, ce jeudi 20 septembre, à la préfecture à Pau, le nouveau ministre a prononcé la phrase tant redoutée : «J’ai décidé de donner le feu vert à la réintroduction de deux ours femelles en Béarn». Ce lâcher sera effectué «dans la période prévue pour cela, c’est-à-dire d’ici le début du mois d’octobre».
Les élus des vallées quittent la réunion
Immédiatement, une vingtaine de maires a décidé de sortir de la salle. Idem pour le président de la chambre d’agriculture, Guy Estrade. «La profession agricole avait initialement prévu de ne pas assister à cette réunion, explique le président de la chambre, mais finalement nous avons accepté d’honorer ce rendez-vous par respect des institutions».
Devant la presse, M. De Rugy expliquait qu’il avait décidé de «venir annoncer cette décision ici, et aux personnes les plus directement concernées». Tout en se disant conscient des tensions et difficultés, le ministre affirmait sa volonté de «ne pas se dérober» et «vouloir continuer d’aller sur le terrain» pour «défendre une écologie qui agit». Il disait aussi «comprendre les éleveurs…» et conscient de la nécessité «d’intégrer des mesures spécifiques pour prendre en compte les contraintes du pastoralisme et de la présence de grands prédateurs…».
De son côté, la profession perçoit cette annonce comme une «incapacité à entendre la détresse des éleveurs», alors que d’autres projets, tels que Sivens ou l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, ont eux été stoppés, note Guy Estrade. Pour le président de la compagnie consulaire, «il n’est donc plus possible de continuer à discuter ensemble».
Le président de la FDSEA, Bernard Layre, dénonce pour sa part le comportement des syndicats agricoles minoritaires. «La Coordination rurale et la Confédération paysanne sont restées à cette réunion. Ce n’est pas surprenant quand on sait que le ministre s’est déplacé en estive, sur l’exploitation d’un proche de la Confédération paysanne.»
Huit ours de plus d’ici dix ans
Même rancœur chez les élus. Pour Étienne Serna, maire d’Aramits, «mettre un ours dans nos territoires, c’est comme mettre un loup dans une bergerie». Jean-Pierre Chourrout, maire de Sarrance — qui s’étonnait de la non-invitation à cette réunion de plusieurs de ses collègues, pourtant élus de communes à forte dominante forestière et pastorale (Lourdios, Lees-Atlhas…) —, se disait, quant à lui, attaché à une «société basée sur le respect». Mais avec cette décision, «on n’est plus respectés».
Au-delà du lâcher imminent de ces deux ourses, Jean-Pierre Chourrout s’inquiétait aussi des perspectives à plus long terme avec la crainte d’une réintroduction de huit ours supplémentaires d’ici dix ans. Une information que n’a pas voulu confirmer le ministre lors du point presse. Pourtant, ce projet est bel et bien évoqué dans le plan d’action ours brun des Pyrénées 2018-2028. Plan qui a été validé par Nicolas Hulot, alors ministre de la transition écologique et solidaire.
À l’issue de sa visite à Pau, François de Rugy s’est donc rendu sur une estive en vallée d’Aspe, située sur la commune d’Etsaut. Trois hélicoptères ont été mobilisés pour transporter le ministre…
Guy Mimbielle