Au Space, le ministre laisse les professionnels sur leur faim
Venu inaugurer la 31e édition du Space, le salon des productions animales, à Rennes le 12 septembre, le ministre de l’Agriculture a reçu un bon accueil, réaffirmant sa volonté d’écouter et de soutenir la profession agricole, notamment dans le cadre des États généraux. Il a cependant incité les agriculteurs à prendre en main les transformations nécessaires pour répondre aux attentes des consommateurs.
Pour sa première visite au Space, le 12 septembre dernier, le ministre de l’agriculture a passé un long moment dans les allées, à la rencontre des professionnels agricoles. Les agriculteurs lui ont réservé un bon accueil, sensibles à ce «signe d’attention» vis-à-vis de l’agriculture française, comme l’a souligné Marcel Denieul, président du salon.
Ce dernier lui a néanmoins rappelé les attentes des agriculteurs qui, en manque de prix rémunérateurs, comptent sur les conclusions des États généraux de l’alimentation pour aller de l’avant : «Le Gouvernement auquel vous appartenez n’a pas le droit de décevoir l’espoir initié par cette démarche», a insisté le président du Space.
De fortes attentes
Le ministre, qui tient «à mettre le dialogue et le respect des gens au cœur de son action», a réaffirmé l’engagement du gouvernement à aboutir sur des éléments concrets dans le cadre des États généraux. «Dès le mois prochain, nous serons dans l’action pour proposer un certain nombre de solutions», a-t-il rappelé dans les allées du salon, évoquant les ajustements de la LME, un encadrement incitatif pour renforcer la structuration des filières, ou encore la mise en application de toutes les dispositions de la loi Sapin 2. «Je sais qu’il y a beaucoup d’attente et qu’il faut aller vite», notamment pour mettre en œuvre ces nouvelles dispositions dès les négociations commerciales entre les industriels et la grande distribution, en fin d’année, a ajouté Stéphane Travert.
Ces États généraux doivent aussi permettre de créer davantage de valeur ajoutée. Et sur ce point, le ministre a renvoyé les filières à leurs responsabilités, répétant à deux reprises que «l’État ne doit pas tout faire, au risque de mal faire, voire de faire moins bien que vous». Il a notamment insisté sur «les opportunités exceptionnelles» que représentaient les attentes des consommateurs, à condition de relever «des défis nouveaux […], c’est le cas notamment sur le plan environnemental ou sanitaire».
«La question à se poser, ce n’est pas de savoir comment on pourra s’affranchir de cette évolution de la demande. La question à se poser, c’est comment être les premiers à répondre aux nouvelles attentes des consommateurs», a poursuivi Stéphane Travert, avant de conclure avec une référence claire à l’interdiction possible du glyphosate, qui inquiète beaucoup les agriculteurs : «Au final, celui qui décide, ce n’est pas le ministre qui autorisera ou interdira telle ou telle molécule».
Obligations en hausse, prix en baisse
Un discours qui a fait réagir la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert : «C’est le consommateur qui décide, oui, c’est vrai, mais les agriculteurs s’évertuent à répondre mieux aux demandes des consommateurs et malgré tout, les prix sont toujours tirés vers le bas !». Or, malgré le début des ateliers des États généraux, «les relations entre les acteurs n’ont pas changé, ça nous inquiète», explique la présidente de la FNSEA, qui «en appelle à Emmanuel Macron pour un rééquilibrage de ces États généraux».
Car si les mécanismes d’un retour de valeur aux producteurs ne sont pas encore définis, et sachant que la transformation «prend du temps», les déclarations «sans concertation» de Nicolas Hulot sur l’interdiction du glyphosate ne sont «pas possibles», s’indigne-t-elle.
D’autant plus que ces déclarations ont été corroborées par celles du Premier ministre, en marge de son déplacement à la foire de Châlons. Comme pour les antibiotiques, «les phytos, c’est quand il faut, comme il faut», ajoute Christiane Lambert, paraphrasant la campagne de réduction des antibiotiques lancée par le ministère de l’agriculture.
Même si les attentes sociétales poussent à la suppression totale des produits phytosanitaires, aujourd’hui, «ce n’est pas possible», explique-t-elle, rappelant par ailleurs l’engagement de la profession à faire baisser leur usage dans le cadre du plan Ecophyto 2.