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Christiane Lambert fixe un cap ambitieux à la FNSEA

Redorer l’image de l’agriculture et se réconcilier avec le consommateur. C’est le défi que Christiane Lambert, nouvelle présidente de la FNSEA, souhaite relever avec l’équipe dirigeante fraîchement élue du syndicat majoritaire. C’est aussi une ambition qui révèle la personnalité de la première femme à prendre la tête de la FNSEA.

file-Christiane Lambert a été élue à la présidence de la FNSEA le 13 avril dernier. Elle est la première femme à la tête du syndicalisme majoritaire agricole.
Christiane Lambert a été élue à la présidence de la FNSEA le 13 avril dernier. Elle est la première femme à la tête du syndicalisme majoritaire agricole.

Christiane Lambert l’admet sans détour : elle est une grande émotive. «Ça se manifeste sous forme de boule au ventre et des frissons… Des émotions qui vous prennent le corps tout entier, confie-t-elle. On m’a dit qu’il fallait que je me forge une carapace, mais moi je n’en veux pas». Cette émotivité, la nouvelle présidente de la FNSEA en fait finalement une force. Et ce sont ses expériences passées, ses ressentis et les souvenirs concrets qu’elle a gardés depuis l’enfance qui semblent aujourd’hui encore expliquer son action de syndicaliste.

Au-delà du besoin viscéral qu’elle a de défendre ce métier qui la passionne, Christiane Lambert s’aperçoit, au fur et à mesure de sa vie de syndicaliste, que redorer l’image de l’agriculture est aussi un levier stratégique aux niveaux politique et économique. «Nos leaders politiques, imprégnés d’une communication négative contre l’agriculture, prennent des décisions et durcissent la réglementation», constate Christiane Lambert. Ces nouvelles règles sont porteuses de «surcoûts ou de manque à gagner et assez souvent de distorsions de concurrence avec les autres pays».

Les réglementations en matière de produits phytosanitaires (néonicotinoïdes) ou encore de bien-être animal (caméras dans les abattoirs), en sont l’exemple. Communiquer sur l’image de l’agriculture, ça n’est pas seulement «se faire reconnaître et se faire plaisir. C’est un enjeu politique», estime Christiane Lambert qui remarque qu’à l’heure actuelle, les élus suivent le modèle du «une émotion, une législation».

Signer un «pacte» réciproque avec la société

La FNSEA a mis peut-être trop de temps à s’apercevoir de cet enjeu, estime sa nouvelle présidente. «Pendant longtemps, on a regardé les autres syndicats faire des alliances en se disant : eux, ils parlent à l’opinion, nous, on parle aux agriculteurs. Sauf que l’opinion est plus nombreuse que les agriculteurs et qu’elle influence beaucoup plus les décideurs politiques». Et «l’agriculture, qui touche au vivant, à l’alimentation, à la nature, à l’environnement, à la santé, est un sujet de société», au sens où il interroge beaucoup le grand public.

Forte de ce constat, Christiane Lambert entame un long travail de réhabilitation de l’image de l’agriculture. Au CNJA d’abord, avec «la charte nationale de l’installation», puis à la présidence de Farre pendant cinq ans (1999-2005), elle montre, en partenariat avec la Ligue pour la protection des oiseaux et l’UFC Que choisir «qu’on peut avoir une agriculture moderne et respectueuse de l’environnement».

«Il y a une image catastrophique et apocalyptique de l’agriculture qui a été présentée par des militants qui ont dénoncé des dérives environnementales que nous ne nions pas mais que nous avons, pour beaucoup, résolues». Hélas, «tous les progrès que nous avons faits dans les exploitations depuis 15/20 ans, n’ont pas été intégrés dans les messages qui sont portés aujourd’hui», regrette Christiane Lambert.

Pour elle, il y a urgence à «renouer avec l’opinion publique» et convaincre la société que «la réalité de l’agriculture est plus belle que l’image qu’elle a». Et pour ce faire, «il faut retrouver des traits d’union ; passer du face-à-face au côte à côte ; se côtoyer pour se comprendre». Christiane Lambert veut «montrer que l’agriculture d’aujourd’hui sait concilier économie, environnement, sanitaire, traçabilité parfaite, bien-être animal».

Les consommateurs doivent jouer le jeu

Mais la nouvelle patronne de la FNSEA attend aussi de la société qu’elle soit cohérente et que les individus qui sont à la fois citoyens et consommateurs, ne souffrent pas du syndrome Dr Jekyll et M. Hyde en donnant des «injonctions» aux agriculteurs — «vous devez faire ci, vous devez faire ça» — et finalement en achetant des produits les moins chers importés en supermarché. «D’un côté les citoyens passent une commande» auprès des agriculteurs, en leur posant «des exigences premium : du bon, du sain, de la qualité, du tracé, qui a un coût supérieur au tout-venant qui vient d’ailleurs, mais de l’autre, les consommateurs n’honorent pas leur commande !», regrette la syndicaliste.

Christiane Lambert souhaite créer «un double pacte avec la société» : sociétal et économique. Les agriculteurs sont prêts à répondre aux demandes des consommateurs, car «le client est roi». Mais ceux-ci, de leur côté, doivent jouer le jeu. «Ils ne peuvent pas nous larguer après avoir passé la commande en choisissant finalement des pommes chinoises et raisins argentins» car ils sont moins chers. C’est aujourd’hui qu’il faut mettre le sujet sur la table, estime Christiane Lambert. Car les conditions sont favorables : «le consommateur est prêt, plus qu’il y a deux ou trois ans» à entendre ce discours.

La présidente de la FNSEA s’appuie sur l’exemple du conflit récent entre les producteurs de lait et Lactalis qui «tirait les prix vers le bas». L’affaire, reprise par les médias, a fait réagir. «On a reçu des dizaines de mails de consommateurs nous demandant ce qu’ils pouvaient faire pour nous aider, témoigne Christiane Lambert. Ils nous ont dit qu’ils étaient prêts à payer quelques centimes de plus». C’est ainsi qu’a été lancée l’initiative du lait «C’est qui le patron?». «Depuis, plein d’initiatives de ce type-là naissent», se réjouit-elle. Ce que souhaite aujourd’hui Christiane Lambert pour les agriculteurs, c’est qu’ils «se réconcilient avec le consommateur», car «ils ont des bleus au cœur». Et la nouvelle présidente de la FNSEA, compte bien mettre son énergie à profit pour les soigner. Car, elle, ces «bleus au cœur», elle a pu les ressentir.

Les administrateurs de la FNSEA en détail

Aux côtés de Christiane Lambert, le nouveau bureau de la FNSEA est composé de plusieurs membres de l’ancienne équipe de Xavier Beulin et de nouveau membres (42%) :
- Secrétaire général : Jérôme Despey (65 voix sur 66).
- Premier vice-président : Henri Brichart (59 voix sur 66)
- Deuxième vice-président : Henri Bies-Péré (52 voix sur 66).
- Secrétaires généraux adjoints : Daniel Prieur, Éric Thirouin, Patrick Bénézit.
- Trésorier : Philippe Pinta.
- Vice-présidents : Étienne Gangneron, Joël Limouzin, Luc Smessaert, Thierry Coué, Jérôme Volle.
- Membres : Dominique Fayel, Hervé Lapie, Arnaud Rousseau.
- Membres de droit : Jérémy Decerle (JA), Jacqueline Cottier (commission agricultrice), Guy Jacob (statut et conflit).
- Membres invités : Robert Berger, Arnold Puech d’Alissac, Daniel Peyraube, Marie-Thérèse Bonnot, Éric Lainé, le président des centres de gestion, le président de la MSA.

Parmi les administrateurs, on peut noter :
- 16% de femmes, 84% d’hommes.
- 74 hectares en moyenne par actif exploitant.
- 90,6% sont engagés en forme sociétaire.
- 78% des administrateurs emploient un ou plusieurs salariés.
- 72% des administrateurs sont membres de CUMA.
- 47% des administrateurs accueillent le public sur leur exploitation.
- 25% font de la vente directe.

Répartition par productions
- 25% en grandes cultures.
- 32% en polyculture-élevage.
- 18% en culture spécialisées.
- 25% en élevage.
- 7% sont spécialisés en bio.
- 53% sont engagés dans des démarches qualité.
- 31% produisent sous signe de qualité.
- 17% produisent de l’énergie.
- 74% sont engagés dans des actions en faveur de l’environnement.
Source : FNSEA

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