Crise laitière: Bruxelles affine son dispositif
La Commission européenne reste très pessimiste concernant le secteur laitier dans les mois à venir. Elle espère que le dispositif de gestion volontaire de l’offre aura un impact.
La dernière réunion en date, le 26 avril, de l’Observatoire européen du marché laitier le confirme: la situation du marché lait est très mauvaise et de très grandes difficultés sont à attendre cet automne pour les éleveurs, si aucune amélioration de l’équilibre entre offre et demande n’est obtenue. Bruxelles compte sur le dispositif de gestion volontaire de l’offre pour inciter les producteurs à lever le pied.
Pour l’instant, c’est la tendance inverse. Sur les deux premiers mois de 2016, la collecte dans l’UE a bondi de 7,4% sur un an, sept États membres enregistrant une augmentation à plus de deux chiffres: Irlande (+35,6%), Belgique (+20,6%), Pays-Bas (+18,5%) et Pologne (+10,3%). Une hausse importante en Allemagne (+7,8%) est également enregistrée.
Le directeur général adjoint à l’agriculture de la Commission européenne, Joost Korte, est venu défendre ce dispositif lors d’une rencontre avec la commission de l’agriculture du Parlement européen le 25 avril à Bruxelles, soulignant qu’il s’agissait d’un des derniers outils à la disposition de la Commission pour agir sur le marché. Mais de nombreux parlementaires ont déploré l’absence d’harmonisation de la mesure au niveau européen.
Bruxelles envisage une aide européenne
Même demande de la part d’Alan Jagoe, président du Conseil européen des jeunes agriculteurs (CEJA), qui, dans une lettre envoyée au commissaire à l’agriculture Phil Hogan le 26 avril, plaide pour des soutiens financiers à destination des producteurs laitiers qui réduisent leur production, sans quoi la mesure de gestion volontaire de l’offre sera parfaitement inefficace.
D’autant plus que la réunion extraordinaire prévue le 25 mai au Parlement européen à Bruxelles pour inciter la filière laitière de l’UE à s’impliquer dans le processus de maîtrise temporaire de la production, n’accueillera finalement aucun ministre de l’agriculture et aucune organisation professionnelle nationale.
Du fait des réticences des porte-paroles de groupes politiques de l’Assemblée au sein de la commission parlementaire concernée, du PPE (Parti populaire européen) notamment, seuls y seront conviés des représentants de la présidence néerlandaise de l’Union, de la Commission et d’organisations professionnelles au niveau européen, dont le COPA-Cogeca.
Pas d’aides directes
Bruxelles pourrait finalement céder à cette demande de nouvelle aide européenne. Le commissaire européen Phil Hogan envisagerait en effet de mettre des fonds pour inciter les producteurs à réduire leur production. Une proposition dans ce sens pourrait être faite à l’occasion du Conseil agricole des 27 et 28 juin à Luxembourg, une fois que la Commission aura plus de visibilité sur ses marges budgétaires, a expliqué Joost Korte. «Mais ces marges seront de toute façon réduites», a-t-il prévenu.
Si des fonds sont trouvés, ils ne seront, quoi qu’il en soit, pas distribués sous forme d’une aide directe à la réduction de la production. À ce stade, seuls 192 millions d’euros sur les 420 millions de soutiens directs débloqués en septembre pour faire face à la crise ont été distribués par les États membres aux agriculteurs.
Un recours à la réserve de crise
En attendant de telles mesures, la Commission européenne continue d’intervenir comme elle le peut sur le marché. Elle a acheté, par adjudication pour la période du 2 au 19 avril pendant laquelle le plafond pour l’intervention publique était atteint, 22.622 tonnes de poudre de lait écrémé à un prix compris entre 155 et 169,80€/100 kg.
Plus de 50% de ce volume ont été achetés à 169,80€/100 kg, soit le seuil de déclenchement de l’intervention. Le volume maximal pour l’intervention publique avait été atteint le 31 mars, mais il a été doublé depuis le 20 avril passant de 109.000 à 218.000 tonnes.
Joost Korte a également évoqué devant les parlementaires européens la question de la réserve de crise. Elle ne sera pas utilisée cette année, mais il faudra sérieusement l’envisager l’année prochaine si le marché continue de se détériorer, a-t-il indiqué.
De nombreux États membres y sont opposés car ce fonds est constitué par une réduction de paiements directs. Mais, a souligné le directeur général adjoint de la DG Agri, «le mécanisme existe. S’il y a des problèmes dans certains secteurs et pas dans d’autres, alors il faut y réfléchir».