Danone sacrifie ses laitiers du Sud-Ouest
D’ici 2023, l’usine Danone de Villecomtal (32) ne collectera plus de lait. En effet, le groupe laitier a décidé d’investir 43millions d’euros pour transformer son site gersois et y produire exclusivement des boissons végétales. La profession agricole dénonce «une trahison, une décision unilatérale et inique.»
«Après avoir investi 16,5millions d’euros en 2021 sur notre site historique Alpro basé à Issenheim (Bas-Rhin) pour soutenir la croissance du végétal en France, nous prévoyons d’investir 43millions d’euros supplémentaires en 2022 pour convertir notre site basé à Villecomtal-sur-Arros dans le Gers, en un site de production de boissons végétales», note le communiqué de Danone pubmlié le 15 novembre.
Le groupe justifie cette décision. «Nous observons l’engouement des consommateurs pour les recettes végétales qui constituent une solution simple pour ceux qui souhaitent adopter un régime alimentaire plus varié et diversifié» explique notamment François Eyraud, directeur général de Danone produits frais France, cité dans le communiqué.
Une décision «inique»
Cette réorientation du site de Villecomtal a provoqué une levée de boucliers de la part de la profession agricole. Dans un communiqué, les FDSEA et JA des Landes et des Pyrénées-Atlantiques dénoncent une décision «unilatérale et inique.» Selon les syndicats, «les producteurs de lait sont les sacrifiés d’un choix industriel, choix décidé en catimini, sans aucune concertation.»
Pour l’heure, selon nos informations (N.D.L.R.: de source syndicale), les 237 producteurs livrant à Villecomtal n’ont toujours pas été officiellement mis au courant de ce changement de cap. «Grandeur d’une multinationale qui n’ose pas communiquer auprès de ses agriculteurs, tancent les syndicats agricoles. Quelle honte, les éleveurs attendent toujours des explications!»
Cette décision de Danone pose maintenant la question de la pérennité de la filière lait dans le bassin de l’Adour. Depuis plusieurs années, les effectifs et les volumes s’érodent. Pour autant, la profession ne veut pas voir disparaître un pan entier de l’économie agricole du Sud-Ouest. «À ce jour la seule solution trouvée par Danone, c’est d’abandonner l’élevage au profit de productions plus rentables. Des solutions alternatives doivent être proposées! Nous serons très vigilants sur les négociations avec l’OPSOL et aux solutions proposées pour maintenir les éleveurs laitiers de la zone», concluent les syndicats.
Évoquant «un sentiment de mépris des producteurs», les chambres d’agriculture des Landes et des Pyrénées-Atlantiques ont, elles aussi, réagi à cette annonce. «Nous déplorons fortement le sacrifice infligé à la production de lait de vache du bassin du Sud-Ouest et le sort que Danone réserve aux éleveurs de nos territoires», écrivent-elles dans un communiqué. Assurant aux producteurs qu’elles seront à leurs côtés, les chambres d’agriculture regrettent que «le Sud-Ouest n’entre plus dans leurs plans d’avenir» de Danone, et que le groupe laitier «abandonne unilatéralement ses producteurs là où, hier encore, ces femmes et ses hommes concédaient des efforts, adaptations et autres investissements pour répondre à leur laiterie!»
De son côté, le groupe Danone promet «des mesures d’accompagnement» pour les salariés et «de travailler main dans la main avec l’organisation de producteurs du Sud-Ouest afin de trouver des solutions concrètes et adaptées aux différentes situations.»
Y. Allongue