La contractualisation laitière a d’abord profité aux entreprises
Dans le rapport sur la contractualisation dans le secteur laitier remis au ministre de l’Agriculture, le 8 février, les auteurs proposent un renforcement des organisations de producteurs, une implication plus importante de l’interprofession ainsi qu’une fixation du prix du lait davantage liée à sa valorisation par l’entreprise.
La contractualisation mise en œuvre depuis 2010 n’a pas été la panacée pour préparer les producteurs à la sortie des quotas laitiers en avril 2015, estime la mission du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) dans le rapport qu’elle a remis au ministre de l’Agriculture, le 8 février.
En tout cas ce n’est pas elle qui est en mesure de régler l’équilibre général des marchés qui relève désormais de l’international et notamment des politiques menées par nos partenaires européens qui poussent plus ou moins leur production.
Les éleveurs n’ont rien gagné
Ceci étant, la contractualisation n’a pas atteint les objectifs qu’on lui avait fixés. «Le point d’équilibre entre producteurs et acheteurs s’est largement déplacé au détriment des producteurs. Les entreprises, au travers de la contractualisation, se sont assurées un approvisionnement ajusté à leurs débouchés, mais sans toujours répondre aux attentes des producteurs de stabiliser leur revenu et de leur donner plus de visibilité», peut-on lire dans le rapport.
D’une façon générale, les auteurs observent que la contractualisation est «insuffisamment évoluée et pas encore stabilisée, appréhendée souvent comme un rapport de pouvoirs entre les différents acteurs de la filière laitière dans leurs relations économique et institutionnelle».
Aussi la mission estime que «le dispositif de contractualisation mis en place doit être adapté et qu’en particulier, il importe de renforcer le rôle, la place des organisations de producteurs (OP) mais aussi d’améliorer leurs performances et de conforter le rôle de leurs présidents». Avant de formuler pas moins d’une trentaine de recommandations.
Concrètement, la mission propose d’encourager la création d’Associations d’organisations de producteurs verticales (AOP mono-acheteur) en charge de la négociation collective avec leur acheteur et d’AOP «territoriales» ou «horizontales» «pour traiter d’approches collectives de territoire, permettre des échanges et contribuer si possible à une vision partagée des évolutions dans la limite du respect de la réglementation en vigueur relative au droit de la concurrence».
L’interprofession pas assez impliquée
S’agissant de la contractualisation au sein de la filière, les auteurs du rapport proposent que l’interprofession «s’implique fortement dans le processus». Ainsi, le Cniel devrait adopter un accord interprofessionnel précisant notamment les relations OP/acheteur(s). «Le Cniel devrait assurer l’élaboration et/ou l’actualisation, rendue nécessaire par les évolutions réglementaires, notamment de documents cadres (guide de bonnes pratiques, contrat-cadre type) ainsi que la diffusion d’indicateurs économiques», souligne la mission.
Quant aux opérateurs économiques, il leur est conseillé dans le cadre des futurs contrats de deuxième génération de faire évoluer les formules de calcul du prix «en intégrant le mix-produit de l’entreprise (PGC) et d’introduire une formule de répartition du risque entre les co-contractants et une certaine prise en compte des coûts de production».
Autrement dit de lier la rémunération du lait à la production à sa valorisation par l’acheteur, notamment pour ce qui est des produits de grande consommation qui ne sont pas exposés à la volatilité des prix.
La mission recommande également d’expérimenter «un contrat long» dans lequel «le transformateur en position centrale, s’étant assuré d’une garantie de débouchés en aval, répercuterait ses besoins par contrat en amont».
Enfin la mission recommande de réunir, au niveau communautaire, un groupe de haut niveau consacré à la volatilité du secteur laitier «pour examiner les améliorations à apporter aux dispositions de la PAC en particulier celles du paquet «lait», pour les rendre plus facilement mobilisables en cas de crise grave». Une proposition reprise dans le mémorandum que la France a soumis à Bruxelles.