La FNPL propose une charte laitière aux membres de la filière
La Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) l’avait promis en décembre dernier. La voilà enfin! La charte laitière de valeurs, destinée à remettre un peu de transparence dans la filière.
«Si les industriels et la distribution veulent aggraver la désertification des campagnes et le chômage, conserver une opacité dans les relations commerciales ou encore voir disparaître les producteurs de lait, surtout, qu’ils ne signent pas la charte de la Fédération nationale des producteurs de lait!». Présentée le 20 janvier dernier par André Bonnard, secrétaire général de la Fédération nationale des producteurs de lait, elle a pour vocation de remettre un peu d’éthique dans la filière, au moins pour un an.
Rédigée en ce sens, elle présente six axes, comme celui de «favoriser le maintien d’un patrimoine laitier économique, sociétal et environnemental durable, support de modernité et d’innovation». Elle instaure également «un tiers extérieur de confiance», le médiateur des relations commerciales, qui devra recevoir chaque trimestre les conditions commerciales négociées entre distributeurs et transformateurs. Les organisations de producteurs pourront alors y faire appel afin de savoir si oui ou non, leur laiterie — coopérative — a bien joué le jeu. La mention de l’origine, source de valeur ajoutée, est également clairement mise en avant.
Des consommateurs bientôt au courant
«Ne pas signer cette charte devient un exercice d’auto-justification compliqué!», souligne André Bonnard avec le sourire. La FNPL souhaite largement communiquer sur celle-ci auprès des consommateurs afin de les éclairer au mieux dans leurs choix… et surtout de mettre la pression sur l’aval de la filière, quelques semaines avant l’ouverture du Salon international de l’agriculture. «Essayez de faire de la Vache qui rit avec du lait de nulle part!», lance André Bonnard. Pas sûr que Bel aura le même succès auprès des consommateurs qui gardent l’image du «comté raté de Lons-Le-Saulnier», continue-t-il.
Pourtant, la partie n’est pas gagnée pour le syndicat laitier. «Les seuls qui vont avoir du mal à signer, ce sont ceux qui ont le plus de mal avec la transparence!», estime le secrétaire général de la FNPL. «Si une coopérative n’adhère pas à ces valeurs-là, ça va être compliqué! […] Côté distribution, on a des chances que cela fonctionne si toutes les enseignes signent en même temps», continue-t-il. Pour Thierry Roquefeuil, président de la FNPL, cette charte est aussi «une main tendue» à la filière, «une manière de relancer un axe de travail» au sein de l’interprofession dans un contexte de crise.
L’an passé, les industriels n’ont pas tous retransmis le niveau de prix payé par les distributeurs. Certains ont donc augmenté leurs marges au détriment des deux autres maillons de la filière. Les distributeurs ne sont pas prêts à continuer de payer dans ce sens. «“À quoi bon faire des efforts, car le maillon du milieu est trop opaque”, disent les industriels», explique André Bonnard. Aussi, les producteurs devaient trouver un moyen de pérenniser les bonnes intentions de la distribution, dans un cadre plus transparent, d’où cette charte. Pour la FNPL, en pleines négociations commerciales, les industriels ont tout intérêt à justifier leur prix avec cette charte, face à une distribution qui demande des baisses de l’ordre de 10%.
«Le terrain est chaud bouillant»
Des questions subsistent cependant: comment taper sur les doigts de ceux qui l’auront vertueusement signée mais qui ne la respecteront pas? Que faire si tous les acteurs ne la signent pas? Certains industriels ne privilégieront-ils pas plutôt leur charte interne? Thierry Roquefeuil imagine déjà de remettre la pression sur le terrain. «Le terrain est chaud bouillant si rien n’avance», souligne André Bonnard. Du côté de la Commission européenne, le syndicat reste serein. Chaque acteur signe individuellement. «La meilleure utilisation de la charte, c’est de l’intégrer dans les conditions générales de ventes ou d’achats», conclut André Bonnard.