L’inexorable baisse des prix du lait
Le dispositif de réduction volontaire de la production, introduit par la Commission européenne, semble être le dernier outil sur lequel peut compter cette dernière pour ralentir la chute des cours.
Alors que le programme de gestion volontaire de l’offre laitière, permettant aux organisations de producteurs de déroger pour une période de six mois (jusqu’au 12 octobre) aux règles de la concurrence, est entré en vigueur, la production européenne continue de grimper (+5,6% sur les deux premiers mois de l’année) et les prix de chuter.
Des cours au plus bas
En moyenne, le prix du lait à la production dans l’UE a encore reculé de 4% au mois de mars à 28,1 ct/kg. Pour toutes les catégories de produits laitiers, les cours sont beaucoup plus bas qu’il y a un an. Les baisses les plus fortes sont enregistrées par la poudre de lait entier et le beurre avec des chutes respectives de 23 et 18%.
La poudre de lait écrémé reste au niveau du prix d’intervention. Le volume maximal pour l’intervention publique avait été atteint le 31mars mais il a été doublé depuis le 20avril, passant de 109.000 à 218.000 tonnes. Un peu plus de 51.000 tonnes ont déjà été stockées entre le 20 avril et le 2 mai, selon le dernier relevé de la Commission européenne.
C’est donc, en moins de trois semaines, quasiment la moitié du nouveau volume qui a été consommée alors que la période d’intervention se termine le 30 septembre. Si le plafond est de nouveau atteint, Bruxelles ouvrira alors un dispositif d’adjudications.
La production ne grimpe pas qu’en Europe
Et les cours ne devraient pas remonter d’ici peu, l’Europe entrant dans sa période de pic de production. À l’échelle mondiale, la production de lait a augmenté d’environ 3,4% en janvier-février 2016, tirée principalement par l’Union européenne. Mais dans les autres grands pays producteurs, aussi, la collecte progresse.
La production américaine a été plus élevée que prévu en mars (+1,8%). Le département américain à l’agriculture s’attend pour 2016 à une hausse de 1,5%. Même situation en Nouvelle-Zélande où la production est plus élevée que prévu en février (+2%), mais devrait être en baisse sur l’ensemble de la campagne. La demande mondiale montre plus de dynamisme avec une impulsion majeure des importations chinoises en janvier 2016.
Face à cette situation qui ne cesse de se dégrader, la Commission européenne devrait débloquer au mois de juin une nouvelle enveloppe d’aide d’urgence au secteur. Une initiative que soutiennent de nombreux États membres qui ont pourtant consommé à peine la moitié du paquet de 420 millions d’euros, lancé en septembre 2015. Lors du comité spécial agricole le 10 mai dernier, certaines délégations ont demandé que les fonds non utilisés au 30 juin (date limite fixée pour avoir recours à ces aides européennes) soient réalloués.
L’Allemagne prépare un plan d’envergure
L’Allemagne préparerait de son côté un vaste plan de soutien national. Ce plan pourrait être constitué de 80 millions d’euros pour un régime d’assurance, de 150 millions d’euros de garanties pour les producteurs contraints de contracter de nouveaux crédits et de différentes mesures d’abattements fiscaux supplémentaires.
«Pour le moment, seuls les agriculteurs paient les pots cassés, la distribution et les laiteries continuant à bien gagner. Il est important que nous arrivions enfin à une répartition juste du fardeau le long de la chaîne de création de valeur», a souligné le ministre allemand Christian Schmidt dans un entretien accordé à la presse nationale. Un grand sommet laitier allemand réunissant toute la filière sera organisé le 30 mai.
Afin d’inciter à la réduction de la production, la commission de l’agriculture du Parlement européen tiendra le 25 mai prochain à Bruxelles une conférence réunissant, là aussi, la filière européenne: syndicats de producteurs, transformateurs privés (EDA) et coopératives ainsi que le commissaire européen Phil Hogan et le ministre néerlandais, Martijn van Dam, qui préside le Conseil de l’UE.