Retenues d’eau : violent bras de fer dans les Deux-Sèvres
Malgré l’interdiction de la manifestation, entre 2.000 et 3.000 manifestants ont investi les 28 et 29 octobre le village de Sainte-Soline (Deux-Sèvres) pour s’opposer à la construction d’une retenue d’eau. Des affrontements ont eu lieu. Plusieurs blessés sont à déplorer. Les manifestants qui ont causé d’importants dégâts entendent rester sur place.
Malgré l’interdiction de la manifestation, entre 2.000 et 3.000 manifestants ont investi les 28 et 29 octobre le village de Sainte-Soline (Deux-Sèvres) pour s’opposer à la construction d’une retenue d’eau. Des affrontements ont eu lieu. Plusieurs blessés sont à déplorer. Les manifestants qui ont causé d’importants dégâts entendent rester sur place.
La manifestation se voulait pacifiste. C’est finalement la violence qui a parlé dans le Sud Deux-Sèvres sur le site de Sainte-Soline où les travaux d’une retenue de 630.000 mètres cubes d’eau ont déjà commencé. Entre 2.000 et 3.000 opposants venant d’associations environnementalistes et de groupes anticapitalistes se sont rassemblés à proximité de ce point d’eau au mépris de l’interdiction préfectorale de manifester.
Pas moins de 1.500 membres de forces de l’ordre ont été mobilisés pour contenir le flot des anti-bassines dont certains sont venus avec des boules de pétanques, des cocktails Molotov et des mortiers. Selon les services de la préfecture des Deux-Sèvres, ce sont environ de «400 profils de black blocks et activistes très violents» qui accompagnaient les opposants.
De nombreux blessés de part et d’autre
L’affrontement tant redouté a eu lieu le samedi 28 octobre. À 15 heures, les grilles du chantier ont été forcées par des protestataires, certains réussissant à pénétrer brièvement à l’intérieur avant d’être repoussés manu militari. Les échauffourées ont duré environ une heure trente avant que la situation ne se calme. Selon le ministère de l’Intérieur le bilan est important : une soixantaine de gendarmes ont été blessés dont 25 «sérieusement». Parmi les manifestants, on dénombre une vingtaine de blessés. «Une quarantaine de personnes fichées S à l’ultra-gauche ont été repérés dans cette manifestation, avec des modes opératoires qui relèvent de l’écoterrorisme, que nous devons absolument combattre», a précisé le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.
Le lendemain, dimanche 29 octobre, les opposants menés et galvanisés par la présence des députés Nupes Sandrine Rousseau (Paris), Lisa Belluco (Vienne), le porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) à la présidentielle, Philippe Poutou et des députés européens Yannick Jadot et Benoît Biteau ont réalisé «une action de désobéissance civile».
Des militants cagoulés et revêtus de bleu de travail pour éviter d’être reconnus par les forces de l’ordre ont sectionné une canalisation qui alimente la future réserve d’eau. La violence s’est aussi retournée contre Yannick Jadot qui a vu la voiture qu’il avait empruntée vandalisée. Il a découvert l’inscription «crevure» peinte, en larges lettres blanches, sur les deux flancs de celle-ci.
«Préserver l’équilibre des milieux»
Rappelons que la construction de cette retenue d’eau a fait l’objet d’une concertation et qu’elle a été légalement approuvée. Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, interrogé par France Inter le 28 octobre s’est étonné des «tensions nouvelles alors qu’on entre dans la phase de chantier», quatre ans après «un plan signé par tout le monde», agriculteurs, élus, autorités et associations. La concertation a d’ailleurs conditionné l’accès à l’eau à des changements de pratiques comme la réduction des pesticides, la conversion à l’agroécologie, à la plantation de haies…
Cette retenue est la deuxième d’un projet de seize réserves de substitution élaborée par un groupement de 400 agriculteurs réunis dans la Coop de l’eau. Ces réserves ont également pour objectif de faire «baisser de 70% les prélèvements en été», «selon des règles très strictes, sous contrôle des autorités et lorsque les nappes sont aux niveaux de hautes eaux. Ce système permet d’avoir de l’eau potable, de préserver l’équilibre des milieux et les sols», a indiqué Joël Limouzin, membre du bureau de la FNSEA sur BFMTV.
«Apologie de la violence»
Les opposants au projet entendent ne rien lâcher et ont construit un «village gaulois» sur un terrain agricole prêté par un agriculteur qui les soutient, pour en faire une Zone à défendre (ZAD). De son côté, Gérald Darmanin qui a affirmé sa «volonté qu’aucune ZAD ne s’installe dans les Deux-Sèvres comme ailleurs en France» a laissé plus de 1.000 gendarmes sur les lieux.
Le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, interrogé par BFMTV, a condamné les agressions et les dégradations en parlant «d’apologie de la violence». «Ils ont détruit un bien qui est légalement installé. Dans quelle démocratie vit-on ? », a-t-il déploré. «Honte à ceux qui saccagent le travail et les outils de travail des agriculteurs. Sous la cagoule de l’anonymat. Et sous le prétexte du militantisme». «Et merci aux agriculteurs qui malgré la colère restent dignes et aux forces de l’ordre qui, une fois encore, protègent», a-t-il indiqué sur son compte Twitter.
Quant à la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert, elle a dénoncé «la violence des émeutiers (non ce ne sont pas des manifestants) et les élus de la république qui les soutiennent dans le périmètre interdit». Elle a également apporté son «soutien aux forces de l’ordre et aux agriculteurs locaux victimes de harcèlement».
Christophe Soulard