Table ronde laitière : les producteurs restent sur leur faim
À l'issue de la rencontre tant attendue entre syndicats agricoles, transformateurs et distributeurs de la filière laitière, le ministre de l'agriculture a annoncé la mise en place de quatre mesures conjoncturelles et la nomination d'un médiateur des contrats.
Guillaume Garot, ministre délégué à l'agroalimentaire, et Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, à l'heure de la conférence de presse. © Réussir
On ne peut pas dire que ça se soit superbement bien passé». Cette petite phrase — au sujet de la table ronde entre producteurs, transformateurs et distributeurs de la filière laitière organisée le 8 avril au ministère de l'agriculture — a été làchée par Stéphane Le Foll, le 9 avril, lors d'une audition devant la commission des affaires économiques du Sénat. Le ministre estime qu'il faut arrêter «ces bagarres où chacun se renvoie la balle». Les filières en France sont «inorganisées», a-t-il ajouté avant de regretter que des maillons de ces filières «ne souhaitent pas se parler».
Ce rendez-vous était très attendu par la filière laitière. À la sortie, des mesures structurelles et conjoncturelles mais rien qui n'apaise finalement les revendications des producteurs de lait. «Les choses ont bougé», a pourtant assuré Stéphane Le Foll à l'issue de la réunion de deux heures trente. Le ministre de l'agriculture a certifié avoir donné les «impulsions» et espère «des traductions concrètes» dès la fin avril pour les mesures conjoncturelles, c'est-à -dire les plus urgentes.
Obstacle européen
Guillaume Garot, le ministre délégué à l'agroalimentaire, a détaillé les quatre mesures: trouver un accord qui concerne toute la production laitière (lait de consommation et lait transformé), la totalité de la hausse au bénéfice des producteurs, des accords transparents et qui, bien sûr sont conformes au droit de la concurrence. C'est peut-être sur ce dernier point que le plus dur reste à faire car les ententes sont interdites par le droit de la concurrence. «Ce n'est pas à nous de donner un prix», a insisté Stéphane Le Foll.
Un médiateur des contrats, Francis Amand, sera en charge du dossier afin de trouver au plus vite un accord. Ainsi, les distributeurs devront lui rendre leurs engagements de réévaluation de prix du lait le 11 avril, à la veille de la mobilisation nationale de la FNSEA. L'ancien chef du service de la régulation et de la sécurité à la DGCCRF travaillera ensuite avec les collecteurs. Le but: déterminer l'impact que les hausses concédées par la distribution auront sur les bénéfices de chacun d'entre eux. Une fois le calcul effectué, Francis Amand pourra déterminer la hausse du prix du lait que devra garantir chaque collecteur pour que l'intégralité de la réévaluation décidée par les distributeurs soit intégralement répercutée aux éleveurs. «Si tout se passe bien, nous aurons terminé toutes ces étapes la semaine du 22 avril», a indiqué Francis Amand.
«C'est agaçant»
Pour les mesures «structurelles», il faudra attendre encore un peu, a indiqué le ministre de l'agriculture. En effet, un «deuxième temps de réflexion» se déroulera en mai concernant la loi de modernisation de l'économie (LME) et la loi d'avenir de l'agriculture (LMA).
Malgré la satisfaction affichée des ministres, à la sortie, les producteurs de lait ne sont pas dans le même état d'esprit. Les industriels laitiers ont déjà quant à eux déserté les lieux pour ne pas avoir affaire aux journalistes. «C'est agaçant», lance sans détour, André Bonnard, le trésorier de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL). «La politique de la distribution c'est: je te donne un tout petit bout pour te faire taire et derrière je ne t'en donne pas plus», ajoute-t-il. À ses yeux, seule une proposition est acceptable (lire également article ci-dessous). Celle de Serge Papin, le président de Système U qui propose trois centimes d'euros pendant six mois sur tous les produits laitiers transformés. «Cette mesure doit être applicable par tous les distributeurs», fait remarquer André Bonnard.
A priori, le médiateur devrait reprendre contact dans les jours à venir avec toutes les personnes présentes à la réunion, selon le trésorier de la FNPL qui n'a pas manqué de rappeler que les producteurs étaient libres toute la semaine pour le rencontrer: «On négocie maintenant ou on repart sur un autre mode de discussion, un peu plus fort!».
Xavier Beulin alerte les parlementairesDans un courrier daté du 9 avril, et prélude à la journée nationale du 23 juin, Xavier Beulin, le président de la FNSEA rappelle les difficultés des éleveurs aux sénateurs et aux députés. «L'élevage connaît une situation économique préoccupante avec la flambée des prix de l'alimentation animale et nous devons lui redonner des perspectives économiques à la hauteur de ses difficultés», lance-t-il. Sans attendre l'examen du futur projet de loi sur l'avenir de l'agriculture, Xavier Beulin souhaite que les parlementaires prennent en compte plusieurs points.
Premièrement, l'évolution de la loi de modernisation de l'économie: à savoir, l'inclusion dans les contrats négociés entre producteurs, transformateurs et grande distribution des clauses de renégociation qui intègrent l'évolution, quand elle est constatée, des coûts de production; la réaffirmation de la primauté des conditions générales de ventes; le renforcement des moyens de contrôles et de sanctions de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des Fraudes (DGCCRF), la reconnaissance et l'application des engagements de prise en compte des variations excessives des prix de l'alimentation animale dans les négociations commerciales (accord du 3 mai par exemple).
Deuxièmement, pour le président de la FNSEA, la généralisation de l'étiquetage de l'origine de la matière première est également une solution pour offrir aux consommateurs une information loyale et valoriser ainsi les efforts de traçabilité réalisés tout au long de la chaîne. Pour finir, la FNSEA veut la simplification des normes environnementales, l'arrêt de toute surenchère réglementaire et fiscale ainsi que l'accompagnement des éleveurs dans la production d'énergie. «Les enjeux de l'élevage, au-delà des aspects économiques, concernent tous nos territoires et le renouvellement des générations de producteurs», conclut Xavier Beulin.
Premièrement, l'évolution de la loi de modernisation de l'économie: à savoir, l'inclusion dans les contrats négociés entre producteurs, transformateurs et grande distribution des clauses de renégociation qui intègrent l'évolution, quand elle est constatée, des coûts de production; la réaffirmation de la primauté des conditions générales de ventes; le renforcement des moyens de contrôles et de sanctions de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des Fraudes (DGCCRF), la reconnaissance et l'application des engagements de prise en compte des variations excessives des prix de l'alimentation animale dans les négociations commerciales (accord du 3 mai par exemple).
Deuxièmement, pour le président de la FNSEA, la généralisation de l'étiquetage de l'origine de la matière première est également une solution pour offrir aux consommateurs une information loyale et valoriser ainsi les efforts de traçabilité réalisés tout au long de la chaîne. Pour finir, la FNSEA veut la simplification des normes environnementales, l'arrêt de toute surenchère réglementaire et fiscale ainsi que l'accompagnement des éleveurs dans la production d'énergie. «Les enjeux de l'élevage, au-delà des aspects économiques, concernent tous nos territoires et le renouvellement des générations de producteurs», conclut Xavier Beulin.