Un pacte pour l'après-quotas
Une forte hausse de la production laitière dans le monde entraîne une chute des cours, qui pourrait plonger la filière dans une crise alors que s'ouvre une nouvelle ère, celle de la libéralisation, avec la fin des quotas. Dans ce contexte, la FNPL souhaite faciliter les projets des éleveurs.
La production de lait, qui sera dérégulée au 1er avril 2015 par la fin des quotas laitiers, risque de subir de lourdes turbulences dans les prochains mois. © Réussir
La production de lait en Europe, qui sera dérégulée au 1er avril 2015 par la fin des quotas laitiers, risque de subir de lourdes turbulences dans les prochains mois. Une collecte très élevée dans les principaux bassins d'exportation, et particulièrement en Europe, plombe les cours. Du côté de la demande, l'eldorado asiatique reste dynamique, mais ralentit ses importations, alors que l'embargo russe a fermé un marché important. Mais l'ampleur et la durée de cette chute des cours des produits laitiers sur le marché mondial, qui pèsera sur le prix du lait payé aux éleveurs, restent la grande inconnue.
Sur la plate forme d'enchère néo-zélandaise Fonterra, qui fait référence pour les prix mondiaux, le prix de la poudre de lait maigre est passée de 4.780 dollars la tonne en février à 2.299 mi-novembre, même si la baisse s'est ralentie depuis début septembre. En France, elle s'échangeait à 2.880 euros début août, puis 1.860 mi-novembre, selon les cotations de l'association des transformateurs laitiers. «Le prix beurre-poudre diminue dans le monde et en France, il est voisin du niveau plancher atteint en 2012», commente Benoît Rouyer, économiste à l'interprofession laitière (Cniel). En cause, une production élevée dans le monde entier: sur la campagne, la collecte a augmenté de 4,5% en Europe et de 9,5% en Nouvelle-Zélande.
Pilotage à vue
En cette fin d'année, «il y a un fléchissement de la collecte en France et en Allemagne, la hausse se tasse, mais elle reste dynamique en Irlande, Italie, États-Unis et Nouvelle-Zélande: il y a toujours trop de lait. S'il n'y a pas d'accident climatique, il n'y a pas de raison que la production diminue, et le prix pourrait baisser jusqu'au prix d'intervention début 2015», analyse l'économiste. Mais «il est difficile d'établir des pronostics pour début 2015», nuance l'économiste. Seule certitude, «la conjoncture sera temporairement difficile».
Dans ce climat d'incertitudes, les éleveurs veulent assurer leurs arrières. C'est pourquoi, un pacte a été signé, le 27 novembre, à la Maison du lait à Paris, par la FNPL, le ministre de l'agriculture ainsi que douze autres partenaires de la filière (lire ci-dessous). «C'est notre nouveau code de la route sans les quotas qui doit baliser notre chemin et être notre GPS» a insisté Thierry Roquefeuil, le président de la FNPL, qui s'est félicité de la mobilisation de tous les partenaires dans ce projet.
Faciliter la production
Ainsi par la voix du ministre de l'agriculture, les pouvoirs publics se sont engagés à mettre en place à FranceAgriMer, et avec l'appui du Cniel, un observatoire des volumes pour disposer d'outils performants d'observation des marchés et des volumes produits pour pallier à la fin de l'encadrement administratif. «Ces informations fiables et leurs analyses nous permettront d'avoir une visibilité et de driver la filière laitière française non pas à vue mais avec des panneaux de signalisation» souligne Thierry Roquefeuil.
Les pouvoirs publics s'engagent également à demander à BPI France de travailler en partenariat avec les banques. Objectif: obtenir des garanties bancaires et soutenir les investissements des exploitations laitières, en machine à traire et stockage du lait notamment. La FNPL estime entre 800 millions et 1 milliard d'euros le besoin d'investissements pour lesquels trois banques, le Crédit agricole, le Crédit mutuel et le groupe BPCE ont promis de se mobiliser. Côté assurance, Groupama et Pacifica Crédit agricole se sont engagés pour leur part à dégager des moyens techniques et financiers pour développer l'assurance fourrage. Le dossier est en bonne voie. Stéphane Le Foll a promis «qu'un contrat socle devrait voir le jour d'ici l'été 2015».
En attendant des évolutions favorables en ce sens à Bruxelles pour laquelle la France est en première ligne. L'APCA a promis d'intégrer un volet «suivi des volumes laitiers produits» dans l'observatoire de l'installation. Quant à Vivea, l'organisme de formation des agriculteurs, il s'est engagé à optimiser les offres de formation pour les producteurs de lait. La présidente, Christiane Lambert, a annoncé la mobilisation de 2 millions d'euros dans ce sens.