Agriculture biologique : ces freins qu'il faut desserrer
L'année dernière, les premières assises de l'agriculture biologique organisées par la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques étaient l'occasion de faire un état des lieux dans un souci de valorisation et d'interaction entre les filières. Cependant, une fois que l'on a déterminé la capacité de développement des volumes et des surfaces ainsi que le moyen de gérer les flux de production, il convient d'analyser les freins.
En ce domaine, l'autonomie alimentaire des élevages bio constitue la préoccupation principale de tous ceux qui ont choisi cette démarche. Cette thématique a ponctué la deuxième édition organisée ce mardi 7 février, au lycée agricole d'Orthez.
Encore faut-il s'entendre sur ce que l'on appelle autonomie alimentaire. «Il y a ce qui relève de l'exploitation, la part du fourrage et des concentrés, mais également, tout ce qui touche à la filière et au territoire (autonomie territoriale, relocalisation des ressources alimentaires, liens entre les producteurs)», expliquait Jean-Marc Arranz (GIS-id64). Si le seul mot d'ordre est d'être plus autonome, il est indispensable, pour aller dans ce sens, d'ajuster la taille des ateliers aux ressources d'exploitation, de mieux valoriser la production et de réduire les coûts. «En ce sens, l'herbe est l'aliment le moins cher et celui de meilleure qualité nutritionnelle, qu'on se place sur le plan des vitamines ou des acides gras», commente le technicien.
Autonomie alimentaire
Les Pyrénées-Atlantiques ont la chance de bénéficier de zones de parcours et d'estives. «Dès que cela est possible, il faut envoyer les animaux en montagne. Les coûts sont imbattables, cela est bon pour la gestion des parasites, on crée des vides sanitaires et on gagne en autonomie protéique», souligne M. Arranz.
De grandes tendances se dégagent sur le département. «On note, poursuit le responsable du GIS, une augmentation des conversions en ovins et caprins, et il est plus facile de parvenir à l'autonomie sur de l'allaitant maigre. Cependant, deux tiers des exploitations d'élevage du département sont en zone piémont, ce qui rend l'autonomie difficile».
Chers achats
Conséquence de tout cela: la majorité des producteurs bio est amenée à acheter concentrés et litière, ceci constituant un frein à la conversion. «Il existe peu de céréales à paille dans le département et elles sont chères. Nous travaillons sur un moyen pour revenir aux litières traditionnelles telles que la fougère». Il est de plus nécessaire de mettre en place une complémentarité plaine/montagne ou encore de favoriser le développement de graminées (dactyles) et légumineuses (trèfles, lotiers riches en tannins) locales.
Outre les ressources, les échanges suscitent nombre d'interrogations. Comme le précisait Laurent Chériti (GAEC La Clé des Champs en deuxième année de conversion): «En bovins lait, malgré l'affouragement vert dans le cadre d'un système polyculture/élevage désintensifié avec plus de jours de pàture (à condition d'avoir les surfaces) et une meilleure culture de l'herbe, le principal problème reste l'apport en protéines».
Sécuriser les achats
Pour acquérir aliments et compléments, certains voudraient privilégier les échanges en circuits courts et en bio. Se posent alors des problèmes, non seulement de volumes et de qualité, mais également, de prix et de contrats. «Faut-il indexer ou pas et sur quoi?», s'interrogeait la juriste de la FDSEA Hélène Lavedrine, préconisant, pour l'achat en direct, des contrats sur papier afin de sécuriser vendeur et acheteur. Risque de requalification au bail dans le cadre de la vente d'herbe sur pied, taxe parafiscale sur certains volumes céréaliers, tout cela rend la contractualisation plus complexe qu'avec des organismes stockeurs. «Il faut engager une réflexion, complétait Jean-Marc Arranz, sur le partage de la valeur en circuit court, sur le gain entre vendeur et acheteur».
Marc Pousin, éleveur de poulets bio en Poitou-Charentes, invité par le maître de cérémonie de ces assises, Michel Vive-Lespérance, expliquait sa façon de procéder avec ses 19 autres collègues de Volailles bio bocage. «Il faut rester raisonnable et se mettre d'accord sur un prix variant de plus ou moins 10% mais pas plus. Un mais à 300 ou 350€/t cela reste correct que les cours soient à 250 ou 400€. Les achats doivent être cohérents, structurés, pour un prix de produit final stable». Mais, même dans ce type de configuration, il est difficile de freiner les attirances spéculatives de quelques-uns, surtout lorsque les prix passent du simple au double (particulièrement pour le mais) que l'on vende soit en conventionnel soit en bio.
Philippe Delvallée
J.-M. Anxolabéhère : éviter les apprentis sorciers C'est à Jean-Michel Anxolabéhère, président de la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques, qu'il appartenait de clore ces assises de l'agriculture biologique. «Le bio, lançait-il, n'est pas une affaire d'apprentis sorciers. Il convient de bien l'intégrer à chaque exploitation. Aujourd'hui nous en sommes tous au stade de retenir tous les paramètres qui font que ce segment puisse être pérennisé et se développer». Organisation, qualité, sérieux, communication, fonds de solidarité, mieux vendre, régularité tels étaient les mots que l'on retrouvait dans la bouche du responsable consulaire.
«La spéculation, en bio comme en conventionnel, est un travers humain qui fait qu'il y aura toujours quelqu'un qui essaiera de tirer un maximum de ce qui est rare. Nous devons élargir le potentiel de départ afin de développer l'offre pour calmer ce type de comportement». Il soulignait aussi le travail de Michel Vive Lespérance qui a su démontrer à la chambre que le mais bio est aussi bon, voire meilleur que le conventionnel.
Le président de la chambre d'agriculture se faisait plus nuancé quant à la contractualisation écrite. «Le papier doit plus être un pense-bête qu'un moyen d'imposer ou de réprimander. Parfois un papier signé a l'effet inverse que celui escompté. Il peut faire peur, surtout lorsque l'on aspire à une forme de liberté en produisant chez soi». Plus que jamais, c'est le mot «compromis» qui ressortait des débats.
«La spéculation, en bio comme en conventionnel, est un travers humain qui fait qu'il y aura toujours quelqu'un qui essaiera de tirer un maximum de ce qui est rare. Nous devons élargir le potentiel de départ afin de développer l'offre pour calmer ce type de comportement». Il soulignait aussi le travail de Michel Vive Lespérance qui a su démontrer à la chambre que le mais bio est aussi bon, voire meilleur que le conventionnel.
Le président de la chambre d'agriculture se faisait plus nuancé quant à la contractualisation écrite. «Le papier doit plus être un pense-bête qu'un moyen d'imposer ou de réprimander. Parfois un papier signé a l'effet inverse que celui escompté. Il peut faire peur, surtout lorsque l'on aspire à une forme de liberté en produisant chez soi». Plus que jamais, c'est le mot «compromis» qui ressortait des débats.