Avec Agrifaune, chasseurs et paysans se retrouvent pour protéger leur environnement
Malgré quelques divergences, agriculteurs et chasseurs se retrouvent sur l’essentiel, protéger leur environnement. C’est l’objectif du partenariat Agrifaune, que la profession agricole et les chasseurs viennent de renouveler pour cinq ans.
Il y a 30 ans, plus d’un agriculteur sur deux était chasseur. Aujourd’hui ils ne sont plus qu’un sur cinq, d’où une moindre inclination à travailler en commun. Mais face à la nécessité de défendre les problématiques du monde rural, les deux parties sont convaincues qu’une approche globale est indispensable.
Ainsi, la FNSEA, l’APCA (chambres d’agriculture), l’ONCFS (Office national de la chasse et de la faune sauvage) et le FNC (Fédération nationale des chasseurs) ont signé la nouvelle convention Agrifaune 2016-2021, le 26 mai à Bonneval, en Eure-et-Loir.
Face à la nécessité de défendre les problématiques du monde rural, agriculteurs et chasseurs sont intimement convaincus qu’une approche globale est indispensable. «Nous avons parfois quelques difficultés avec les chasseurs, pour autant nous sommes dans une phase où l’approche en silo n’est pas porteuse d’avenir», a constaté Xavier Beulin, président de la FNSEA.
Biodiversité en bords de chemin
Cette convention vise, entre autres, «à définir les actions à mettre en œuvre et à promouvoir au niveau national et local […] afin d’assurer un développement agricole compatible avec la préservation et le développement du petit gibier, de la faune et de leurs habitats». La biodiversité est au cœur de cette convention qui existe finalement «depuis plus de vingt ans» à travers l’association Humain et territoires, rappelle Xavier Beulin.
Depuis dix ans, agriculteurs et chasseurs travaillent à mettre en place des pratiques agricoles favorables au développement de la faune, en veillant à préserver le revenu des exploitants. Car «les pratiques agricoles sont l’un des piliers de l’avenir du petit gibier», souligne Jacky Desbrosse, président de la Fédération départementale des chasseurs de la Marne.
Privilégier les espaces non productifs
Pour recouvrer une biodiversité de qualité et en quantité en milieu rural, les zones dites non productives sont ciblées. Il s’agit principalement des bords de chemin et des bandes fleuries, aussi appelées bandes enherbées. Près de 70 départements ont engagé des actions dans le cadre de la convention Agrifaune.
Parmi elles, l’entretien des bords de chemins qui séparent les parcelles agricoles fait figure d’exemple. Caroline Lebris, chargée d’étude pour l’Association des territoires en Eure-et-Loir, explique: «Habituellement, les agriculteurs font le broyage des bords extérieurs des chemins en juin. Ils veulent éviter ainsi le développement des adventices».
La biodiversité de ces espaces (flore, insectes) est parfois sérieusement attaquée (broyage répétitif, phytos, etc.). L’idée a été d’étudier l’évolution de la biodiversité de ces bords de chemin, lorsque le broyage était retardé. Selon les fermes, retarder cette opération de nettoyage permet d’augmenter la biodiversité sans entraîner une colonisation de la parcelle par les adventices.
Néanmoins, les experts précisent que l’étude se poursuit pour «proposer un diagnostic» à la carte. Car toutes les fermes ne réunissent pas les mêmes conditions: «Depuis quelques années, les zones agricoles non productives, les chemins en herbe ont été dégradés», rappelle François Omnès, responsable du programme agriculture à l’ONCFS.
Biodiversité dans la parcelle
La reconquête de la biodiversité au sein des parcelles cultivées mobilise également. Une équipe de chercheurs de l’Inra a lancé une expérimentation à ciel ouvert en 2013. «Il s’agit avant tout d’étudier la diversité fonctionnelle des ressources nécessaires aux auxiliaires», explique Antoine Gardarin, responsable du projet Gargamel (gestion agroécologique des ravageurs de grandes cultures à l’aide de mélanges floraux), au cœur d’une parcelle expérimentale de colza traversée par des bandes fleuries à Grignon, le 20 mai.
La diversité fonctionnelle recense les groupes d’espèces en fonction du rôle qu’ils jouent dans l’écosystème. Les auxiliaires de culture sont des insectes gourmands en ravageurs de cultures. Ainsi, ils permettent de se substituer, en partie, aux phytos.
C’est l’objet même du projet Gargamel, qui permet de remédier au manque de références scientifiques sur la régulation biologique des ravageurs. D’ici fin 2017, l’objectif est d’étudier les effets de ces bandes fleuries de plein champ sur les rendements des cultures. Au final, cette convention Agrifaune se révèle être un partenariat gagnant-gagnant.