Kiwi : mobilisation générale contre la PSA
Tandis que l'année 2012 avait été marquée par une relative accalmie sur le front des dégàts sanitaires liés à PSA, laissant d'ailleurs espérer un problème moins sévère que prévu, les dernières observations sur le terrain changent profondément la donne. Aujourd'hui, la bactérie ne se cantonne plus aux vergers initialement affectés, mais touche l'ensemble des variétés et des plantations de tout àge. «On ne peut plus sous-estimer cette problématique, martèle le président, François Lafitte. Il faut une prise de conscience de tout le monde».
Favorisée par les conditions climatiques, la bactérie PSA est responsable d'une recrudescence des dégàts au sein des vergers de kiwi. « On ne peut plus sous-estimer cette problématique », martèle le président de la Scaap Kiwifruits, François Lafitte.
Favorisés par des conditions climatiques fraîches et humides, les dégàts de la bactérie PSA (Pseudomonas syringae pv. Actinidiae) du kiwi enregistrent une recrudescence très sensible, depuis quelques semaines. Des exsudats sur les troncs et les branches des arbres sont apparus dans un grand nombre de plantations. Ce sont les symptômes les plus flagrants du développement du chancre bactérien. Suivant le degré de contamination, les producteurs sont contraints de recéper voire d'arracher certains arbres, puis de brûler ces parties atteintes. Ils n'ont d'autre choix. De manière évidente, le climat froid et pluvieux du printemps 2012 a favorisé la circulation du micro-organisme.
Repérée pour la première fois en France en juillet 2010, la bactérie PSA poursuit donc sa propagation. Le plan de surveillance, mis en place depuis 2011 sous l'égide du service régional de l'alimentation (SRAL), révèle clairement ce phénomène. Son responsable, Jérôme Fritsch, était invité à venir présenter les dernières données. «La situation est très évolutive, confirme-t-il. Le printemps et l'automne sont les principales saisons d'activité de la bactérie, mais ce n'est qu'au printemps que l'on observe la plupart des symptômes».
Renforcement de la lutte préventive
Localement, les variétés de kiwi à chair jaune ont été les premières touchées. Elles sont clairement les plus sensibles. Aujourd'hui, plus aucun verger de ce type ne paraît exempt de la maladie dans le bassin de l'Adour. «La tendance est à l'arrachage sur ces variétés», note Marie-Pierre Durpaire, technicienne de la Scaap kiwifruits. Cependant, les variétés à chair verte, dont l'emblématique Hayward, ne semblent plus épargnées, contrairement à ce qui avait pu être imaginé. «En général, les màles sont les premiers atteints», précise la technicienne de la coopérative.
Face à la reprise des dégàts, il est actuellement impossible de dresser un état des lieux précis du niveau de contamination. «Dans le secteur historique de Peyrehorade, on peut estimer que les trois quarts des vergers sont touchés», note toutefois la technicienne. De très nombreuses plantations, affectées par de simples nécroses des feuilles ou des bois l'an dernier, sont touchées par des exsudats très prononcés depuis quelques jours. «On se rend compte qu'il va falloir vivre avec cette bactérie, commente François Lafitte. Aujourd'hui, on n'imagine plus l'éradiquer».
Les moyens de lutte
L'heure est donc au renforcement de la stratégie de lutte préventive. Elle se résume en trois mots: surveiller, traiter, couper. Certaines de ces pistes ont été largement détaillées à l'occasion de la réunion. La première d'entre elles concerne la surveillance des vergers. Les techniciens de la coopérative préconisent notamment des inspections minutieuses, dès le mois de mars, afin d'identifier les arbres «suspects». Dans les vergers de Hayward, les màles doivent être particulièrement surveillés.
L'hygiène des engins, la gestion des feuilles mortes à l'automne, ou la réalisation de la taille constituent d'autres éléments à maîtriser. Certaines observations tendent aussi à proscrire les excès d'azote, au printemps. Mais l'action la plus essentielle consiste sans doute à traiter les vergers à l'aide de cuivre, aux propriétés fongicides, et de stimulateurs des défenses naturelles (SDN). «La combinaison de cuivres couvrants et pénétrants, à faible dose, et de SDN a montré son efficacité», insiste Fabien Bec, un autre technicien de la structure. Un bulletin récapitulant les conseils en matière de traitement devrait être diffusé prochainement par la structure à ses adhérents.
Pour l'heure, les producteurs ont sous le coude une panoplie relativement réduite de produits. La filière reste dans l'attente d'une dérogation pour utiliser une substance active, analogue de l'acide salicylique, vendue sous la marque Bion® de Syngenta. Selon les responsables présents, l'accès à ce produit constitue un enjeu capital. Son homologation était à l'ordre du jour d'une rencontre avec l'administration le 9 avril.
La guerre est déclarée
Quoi qu'il en soit, la résolution de ce problème sanitaire, le plus grave depuis l'implantation de cette production dans le Sud-Ouest, promet d'être longue. Exposés en première ligne, les producteurs ne vont pas livrer une simple bataille. Une guerre laborieuse s'annonce. «Nous devons réaliser un combat continu et sans relàche, insiste le président de la coopérative. Ce n ‘est que l'action collective qui nous sauvera Tout le monde doit s'engager dans le processus de lutte préventive, même ceux qui, pour l'instant, ne sont pas concernés par des dégàts». Dans ce contexte, la mise en place d'un arrêté préfectoral encadrant les opérations de lutte représente une solution pour enclencher le mouvement. Pour l'heure, les représentants de la filière ont refusé cette option, mais la question reste posée.
Afin de renforcer les connaissances scientifiques autour de cette bactérie, un plan de recherche est aussi sur les rails. Il devrait entrer dans le cadre des fonds Casdar (Compte d'affectation spécial pour le développement agricole et rural). «Nous devons aller plus loin dans le plan de surveillance, explique Jérôme Fritsch. Une enquête épidémiologique beaucoup plus lourde est nécessaire pour comprendre l'évolution spatiale de la bactérie». L'objectif de ces recherches sera aussi d'évaluer l'efficacité d'une gamme d'options de lutte afin de bàtir une stratégie de protection.
Fabien Brèthes
La bactérie PSAResponsable du chancre bactérien du kiwi, la PSA a été identifiée pour la première fois au Japon en 1984. Sa présence a été enregistrée en Italie, en 1994, où la région du Latium a connu une grave épidémie en 2009. En France, des cas ont été identifiés dans la Drôme puis en Aquitaine, à partir de juillet 2010. Les Néo-Zélandais l'ont observé quelques mois plus tard, en octobre. Le Portugal, puis le Chili sont également touchés depuis2011 et2012. La PSA est en mesure d'infecter et de voyager dans le système vasculaire des arbres. Elle entre par les fleurs, les blessures de tailles, les dommages sur l'écorce dus au gel