La filière des fruits et légumes tire les leçons de la crise de l'E.coli
Les Assises des fruits et légumes, qui se sont déroulées le 25 octobre à Paris, ont consacré de leurs travaux aux leçons à tirer de la crise de l'Escherichia Coli. À défaut d'éviter que ce genre d'événement ne se reproduise à l'avenir, autant le gérer au mieux et en limiter les effets défavorables.
La crise de l'E.Coli a fortement affecté la filière française, en particulier pour les producteurs de concombre, injustement accusé d'être le vecteur de la bactérie. © Réussir
« La gestion de la crise a été épouvantable en Allemagne et dans l'Union européenne. On n'a pas encore réussi à rétablir une situation satisfaisante » déplore Pierre Diot, président de l'AOP nationale Tomates et concombres de France. Accusé au départ d'être porteur d'une souche très virulente d'Escherichia Coli, le concombre a été mis hors de cause quand les autorités sanitaires allemandes ont découvert, quelques jours plus tard, que la bactérie tueuse avait contaminé des graines germées. Entre-temps, le mal a été fait : les consommateurs se sont détournés massivement du concombre, les cours se sont effondrés et la crise s'est étendue à la tomate.
La difficile communication
Première leçon donc : l'absolue nécessité de livrer des informations vérifiées aux médias. Ce que n'ont pas fait hélas les Allemands. La France n'est pas épargnée : « le gouvernement a été frileux pour dédouaner les produits français » estime pour sa part Jacques Rouchaussé, secrétaire général de Légumes de France.
Même si rétorque, Jean-Marc Bournigal, le directeur de cabinet de Bruno Le Maire, les pouvoirs publics étaient dans l'impossibilité de communiquer et de répondre aux attentes des médias puisqu'ils ne savaient pas grand-chose. « Le temps scientifique n'est pas le temps médiatique » observe Ambroise Martin, professeur de nutrition, expert à l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Même s'il faut faire avec.
Se préparer à l'imprévisible
La filière fait également son mea culpa. « Nous n'avons pas parlé d'hygiène » déplore Frédéric Descrozaille, le directeur d'Interfel et Bruno Piton, de l'Union nationale du commerce de gros des fruits et légumes. Surtout les professionnels se reprochent de ne pas voir diffusé le guide de bonnes pratiques d'hygiène pour limiter les contaminations. Ne serait-ce que de se laver les mains, avant de manipuler des fruits et légumes.
Ce que confirme Louis Orenga, directeur du Centre d'Information des viandes, fort de l'expérience acquise dans la gestion de crise de la vache folle. « Il faut donner une info de proximité utile pour le consommateur » avant de délivrer quelques conseils sur la nécessité de diffuser un message cohérent et de ne pas cacher les informations. « Dire quelque chose est dangereux, ne rien dire l'est encore plus », insiste-t-il. Et livrer bien entendu « des informations dont on est sûr ».
Se préparer à d'autres crises
Tout le monde est également d'accord pour reconnaître que d'autres crises surviendront et qu'il « faut se préparer à l'imprévisible ». Ce qui est nouveau, c'est que les crises sanitaires qui frappaient surtout les productions animales, touchent désormais les productions végétales et que la multiplication des échanges, des transports, de la transformation des produits favorisent l'émergence de ces événements.
Vindicte contre Bruxelles
Reste que les professionnels sont très remontés contre Bruxelles et son dispositif d'indemnisation de la crise. Sur l'enveloppe de 227 millions d'euros qui a été débloquée, 1,6 million seulement est réservé à la France, alors que la Pologne en a reçu 46 millions. « Nous sommes scandalisés » fulmine Pierre Diot devant Lars Hoelgaard, de la direction générale de l'agriculture à la Commission européenne.
Avant de reprocher également à l'exécutif européen, la lenteur avec laquelle il a réagi en matière de communication. Son plan de relance de la consommation ne sera opérationnel que lorsque la campagne sera terminée, ce qui veut dire qu'elle bénéficiera aux importations marocaines et autres