OGM : les semenciers dénoncent un cadre réglementaire bancal
Pourquoi importer des OGM et ne pas en cultiver? Pourquoi proposer un décret sur la coexistence des cultures et déclarer vouloir annoncer un moratoire avant les prochains semis? À la veille des élections présidentielles et législatives, l'Institut des biotechnologies végétales (IBV) qui regroupe l'Union française des semenciers (UFS), le Groupement national interprofessionnel des semences (GNIS) et l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP) déplore «le positionnement incompréhensible du gouvernement sur les biotechnologies végétales».
Pour le collectif IBV (Initiatives biotechnologies vétégales), le gouvernement français se trompe de combat en déposant un nouveau moratoire contre la culture du Mon 810 et ferait mieux de travailler aux règles de coexistence. © Réussir
Toutefois, Philippe Gracien, le directeur du GNIS, se félicite de la mise en oeuvre progressive de la loi sur les OGM de 2008 et notamment de l'arrêté sur la coexistence des cultures OGM et non OGM. Cet arrêté qui est actuellement soumis pour avis aux autorités communautaires fixe les conditions techniques de mise en culture, de récolte, de stockage et de transport des végétaux génétiquement modifiés. Le texte a été construit pour respecter un seuil de présence fortuite de 0,9% d'OGM dans les productions non OGM. «Un projet de texte pragmatique reprenant les dispositions professionnelles mises en place lorsque la France cultivait des OGM avant 2008», a salué Philippe Gracien.
Il instaure notamment des distances d'isolement entre les parcelles OGM et non OGM, de 50 mètres pour le mais, de 5 mètres pour la pomme de terre et le soja. Pour la betterave, aucune distance d'isolement n'est requise car les montées en graines sur la parcelle sont éliminées systématiquement. Il s'agit «d'un projet de texte pragmatique qui reprend les dispositions qui avaient été établies en 2004-2008», quand la culture du mais OGM était autorisée, déclare Philippe Gracien.
Quelques avancées
Le décret sur l'étiquetage «sans OGM» a également été publié en janvier2012. Et même si IBV juge le texte «compliqué», voire «irréaliste» pour tenir la contrainte de 0,1%, (N.D.L.R.: seuil en deçà duquel la mention «sans OGM» peut être affichée), il reconnaît qu'il a le mérite d'exister. Reste encore à déterminer le seuil de présence fortuite d'OGM dans les semences conventionnelles pour que la loi sur les OGM devienne opérationnelle. Un texte qui est très attendu par les semenciers, déclare Éric Devron, directeur de l'UFS.
Mais au-delà des signes positifs affichés sur la mise en oeuvre de la coexistence, IBV ne comprend pas l'annonce par la ministre de l'Écologie de la reconduction du moratoire sur le mais Mon 810. Surtout après que la Cour de justice européenne ait jugé de l'illégalité de la décision française en septembre2011, confirmée par le Conseil d'État en novembre dernier. «Aujourd'hui, il faut que les agriculteurs qui le souhaitent puissent cultiver les OGM autorisés en Europe», plaide IBV, tout en déclarant que l'industrie semencière «sera légaliste», si le Gouvernement persistait dans son intention.
Nouveau moratoire La France a déposé, lundi 20février, auprès de la Commission européenne, un nouveau moratoire interdisant d'urgence la culture du mais OGM Mon 810 dans toute l'Union européenne. Pour justifier cette nouvelle demande d'interdiction, le ministère de l'Environnement indique s'appuyer sur de nouvelles études scientifiques notamment sur un avis de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) montrant «que la culture de ce mais présente des risques importants pour l'environnement». Cet avis de l'Efsa porte sur le mais OGM Bt11 mais «on argumente que nombre de problèmes soulevés par le Bt11 est transposable au Monsanto 810», précise Nathalie Kosciusko-Morizet.