Sécheresse : les Corréziens récoltent la luzerne landaise
Trente-six agriculteurs de Haute-Lande ont mis leurs surfaces à disposition pour cultiver du ray-grass au profit des éleveurs sinistrés de la Corrèze. La récolte s'annonce prometteuse.
Faisant suite à un hiver long et rigoureux qui a épuisé les réserves de foin, la sécheresse printanière a entraîné en Corrèze, une perte de récolte de 47 % des fourrages nécessaires à l'hivernage. Ce déficit correspond, pour le cheptel corrézien, à un manque de 276.000 tonnes de matière sèche et de 180 millions d'unités fourragères.
Pour pallier à cette situation, de nombreuses actions ont été menées localement : achat de paille, de fourrages secs, de céréales et d'aliments composés à l'extérieur du département, utilisation de plaquettes de bois et de balle de riz pour limiter la quantité de paille nécessaire à la litière
Mais pour leur venir en aide, les éleveurs corréziens ont également pu compter sur l'incontournable solidarité du monde agricole. Trente-six agriculteurs de Haute-Lande ont, en effet, mis des terres à disposition pour cultiver du ray-grass dont ils pourront nourrir leurs animaux.
1.175 hectares mobilisés
L'idée est venue de Ludovic Pontico, ingénieur irrigation au GRCETA (groupement de recherche sur les cultures et techniques agricoles) des sols forestiers d'Aquitaine. « Un de mes camarades de promo est technicien à la chambre d'agriculture de la Corrèze. Il m'a parlé des difficultés rencontrées par les éleveurs de son département. Connaissant les spécificités de la Haute-Lande dont 40 % des surfaces sont dédiées aux cultures légumières et donc libérables rapidement, j'ai proposé aux adhérents du GRCETA de mettre leurs terres à disposition pour semer des plantes fourragères à l'intention des Corréziens. Spontanément, près de 500 hectares ont été proposés ». Le bouche à oreille a finalement permis de mobiliser 1 175 hectares dans les Landes et en Gironde.
Les analyses techniques et économiques approfondies, réalisées par les ingénieurs des chambres d'agriculture et du GRCETA ont conduit à faire le choix de semer du ray-grass italien de variété Andie. Implanté entre le 27 juillet et le 25 août, il est actuellement en cours de récolte.
Vendredi 21 ocotbre, une visite de chantier était organisée sur l'exploitation de François Gautier à Lipostey. « J'ai été informé de l'opération par le GRCETA et j'ai décidé d'engager 45 hectares derrière du mais doux, explique l'agriculteur. D'habitude, sur ces terres j'implante des CIPAN (Cultures intermédiaires pièges à nitrates). Au nom de la solidarité agricole, il m'a paru intéressant de les remplacer par du ray-grass ». Comme lui, trente-cinq autres agriculteurs ont répondu à l'appel du GRCETA et gratuitement mis leurs terres à disposition, effectué les opérations de semis, de fertilisation et de traitement des adventices, surveillé la culture et déclenché les séquences d'irrigation.
Près de 10.000 tonnes récoltées
Les estimations initiales prévoyaient une récolte de 7 000 tonnes. Mais les résultats pourraient être meilleurs, jusqu'à 10.000 tonnes. « À l'origine, nous devions venir en aide à 150 éleveurs, indique Pierre Chevalier, président de la chambre d'agriculture de la Corrèze. Mais, compte tenu des excellents rendements, nous devrions pouvoir en épauler près de 200. J'adresse donc mes sincères remerciements et ma profonde gratitude à tous les agriculteurs qui ont participé à cette opération qui va bien au-delà du prêt de leurs terres ».
Christophe Barrailh, président du pôle élevage de la chambre d'agriculture et de la FDSEA des Landes, n'y voit qu'un « juste retour de solidarité ». « Nous avons reçu beaucoup d'aide et de soutien après la tempête Klaus et, gràce à cela, nous sommes parvenus à reconstruire en six mois notre potentiel de production, particulièrement en aviculture. Aujourd'hui, c'est à notre tour de faire preuve de solidarité professionnelle, une solidarité organisée. Car, s'il est bien d'avoir des idées, encore faut-il avoir un réseau structuré pour pouvoir les mettre en oeuvre. Et c'est toute la force du monde agricole que d'avoir des organisations professionnelles capables d'organiser de telles opérations ».
Cécile Agusti Nécessaire irrigation
Quelque 200 éleveurs corréziens devraient pouvoir bénéficier de ray-grass landais et girondins à prix coûtant (86 euros la tonne). Au-delà de la solidarité dont ont fait preuve les agriculteurs participants à cette opération, c'est un véritable « pari technique qui est en passe d'être gagné », estime Christophe Barrailh. En effet, semer de l'herbe sur du sable en plein été n'était pas gagné d'avance. Seuls un suivi cultural poussé et surtout une « capacité de sécuriser la production gràce à l'irrigation » ont rendu possible les rendements exceptionnels qui sont en train d'être récoltés.
Cécile Agusti Nécessaire irrigation
Quelque 200 éleveurs corréziens devraient pouvoir bénéficier de ray-grass landais et girondins à prix coûtant (86 euros la tonne). Au-delà de la solidarité dont ont fait preuve les agriculteurs participants à cette opération, c'est un véritable « pari technique qui est en passe d'être gagné », estime Christophe Barrailh. En effet, semer de l'herbe sur du sable en plein été n'était pas gagné d'avance. Seuls un suivi cultural poussé et surtout une « capacité de sécuriser la production gràce à l'irrigation » ont rendu possible les rendements exceptionnels qui sont en train d'être récoltés.